It's your golden hours, shine.
♫ La maison n’était pas très grande, mais juste assez pour pouvoir élever un enfant. Le bois craquait sous leurs pas mais les fenêtres possédaient une bonne isolation pour contrer la rudesse du général hiver. Ses habitants avaient tout ce dont ils avaient besoin, si bien que leur bonheur pouvait se faire entendre, surtout en été, lorsque les fenêtres étaient ouvertes. La musique résonnait dès lors que les yeux étaient ouverts, jouant parfois jusque tard dans la nuit. Les vinyles étaient sûrement la plus belle collection que pouvait posséder Mikhaïl Loskoutrov. Récemment s’était ajouté un des tout premier enregistreur K7 afin de ne rien louper des musiques passant sur l’antenne moldue qu’ils avaient. Cette maison était une parfaite harmonie entre la technologie moldue et la magie utilisée par Mikhaïl. Chaque chose avait sa place, comme si l’engrenage avait été parfaitement pensé pour que tout fonctionne ainsi.
Geoffrey était né dans cette maison à la douceur d’un soir, le 4eme jour du mois de juin. L’été semblait commencer doucement, les terres gelées se réchauffant avec le maigre soleil qui pointait le bout de son nez. Le bonheur en personne frappait les nouveaux parents, tenant leur premier et seul fils. Prenant la décision qu’un enfant serait assez pour la vie qu’ils avaient décidé de mener. Le père se demandait s’il allait hériter de sa magie. La mère, elle, plutôt de son nez. Évidemment que le couple n’avait pas les mêmes questionnements mais cela importait peu. Cet enfant serait aimé.
Né d’un père sorcier Russe et d’une mère purement moldue originaire d’Angleterre, le jeune garçon eut la joie de pouvoir socialiser dès le plus jeune âge. Ainsi, il rejoint les bancs de l’école et l’enseignement de son pays. Les relations étaient parfois difficiles, surtout à cet âge. Pourtant, pour rien au monde ils n’auraient retiré cette expérience à leur fils. Assis parfois des heures, le nez plongé dans les livres, Geoffrey démontre une curiosité insatiable. Il n’était pas rare que la mère doive le forcer à poser ses livres afin de jouer dehors. Mais qui voudrait sortir, quand il ne fait jamais plus de zéro degré la moitié de l’année ?
I try to capture every minute, the feeling in it.
♫ Dix années s’étaient écoulées aussi rapidement que l’érosion se creusait sur les nombreux disques bien trop souvent écoutés. Chacun se préparait avidement dans la maison, ou du moins, des parents bien trop stressés par la grande rentrée scolaire de leur enfant. Attendant sagement dans l’entrée, il était vêtu d’une longue robe fluide d’un bleu marin profond. Le tissu ne semblait pas chaud et bien court, provoquant de multiples questionnements dans l’esprit du jeune garçon de dix ans. Faisait-il chaud à l’école Koldovstoretz ?
-
Ya gorzhus' toboy, Jeffenka ! (*Je suis si fier de toi, mon Jeff)Son père l’observe, un sourire collé sur ses lèvres. Dix ans déjà qu’il avait obtenu grâce à ce petit bout d’homme le titre de papa. Il pose ses deux grandes mains sur ses épaules, tandis que son corps s’affaisse sous le poids de l’affection. Son visage semble boudeur, presque honteux qu’on lui témoigne autant d’affection. Pourtant, il n’aurait pas passé une bonne journée sans le sourire réconfortant de son père. Il entrait enfin officiellement dans le monde des sorciers, comme lui bien des années avant.
Son statut de sang-mêlé posa évidemment quelques problèmes. Dans le grand palais de l’école, le petit garçon âgé d’à peine dix-ans paraissait encore plus petit. Écrasé par la grandeur des murs et des huitièmes années. Tandis qu’il se donnait consistance en gonflant sa poitrine d’air, Geoffrey remonte nerveusement ses lunettes lui glissant sur le nez. La première année était sûrement comme toutes les autres; découvrir un monde totalement nouveau. Rencontrer ses premiers amis, cachés parfois en la personne avec laquelle il était assis en cours de potions.
Rapidement, il se fait connaître. Pour ses grandes convictions, ses rêves de grandeurs et le fait qu’il parlait sûrement bien trop dans une journée. Chaque mercredi, il ne manquait pas de prendre le temps de s’asseoir à son bureau pour rédiger une lettre à ses parents. Il omettait peut-être certains détails... Comme ces fois où un sixième année avait décidé de publier sur les murs de la salle à manger la déclaration d’amour qu’il avait écrite à une fille. Ou ces autres fois où on l’avait volontairement poussé et insulté pour avoir une mère non-magique.
Être jeune est souvent une étape difficile dans la vie. Rapidement, Geoffrey comprend qu’il y avait des combats à mener dans la vie et qu’il n’était pas le seul à les vivres. Il put donc entrer en deuxième année, découvrant à quel tribunal il allait appartenir.
La cérémonie était tout ce qu'il y avait de plus solennel. L'hymne de la Russie jouait au travers des instruments enchantés, tandis que les aînés des autres années avaient tous revêtus leurs uniformes de cérémonie. La salle était bruyante, animée et vivante. L'on pouvait entendre de nombreuses discussions, parfois couvertes par la musique. Mais le silence tombe dès lors que le directeur se présente à son pupitre. La cérémonie de réparation allait commencer. Les futurs 2eme année, âgés alors de 11 ans, se sont tous mis en ligne, attendant les uns après les autres assez sagement. Ou peut-être que leur sagesse n'était dû qu'aux innombrables regards rivés sur eux. Quand Geoffrey eut à s'avancer, il découvrit un altar très simple, habillé d'une simple nappe noire. Dessus se trouvaient quatre supports d'un tissu fastueux, sur lesquels se trouvaient des pierres différentes. Son regard se pose instinctivement sur la pierre de Rubis, avant de se relever vers le précepteur lui indiquant qu'il devait passer sa main par-dessus chacune des pierres.
Geoffrey s'exécuta derechef, bien trop curieux de savoir à quel tribunal il allait appartenir. Malgré son regard fixe posé sur le Rubis, ce fut la pierre du Lapis-Lazuli qui s'illumina. Les acclamations se firent entendre en arrière de lui : Il rejoignait le tribunal de Grigorieva.
Érudit - Attentif - Altruiste - Débrouillard
Il pu rejoindre l'estrade sur laquelle se tenait tous les élèves à l'uniforme ayant des touches de turquoise. Applaudit, sifflé et bousculé, Geoffrey se rendit compte qu'en cet instant peu important s'il était de sang mêlé ou bien d'une famille puriste... Ils étaient tous unis sous une même insigne.
Let the sky fall when it crumbles.
♫ Ilssss arriiiiveent... Ilssss ssssont proschhesss...
Le jeune garçon se redresse en sursaut, provoquant le questionnement dans le regard de ses parents. Une nouvelle fois, il entend cette voix sifflée, venant de l’extérieur. D’un geste rapide, il redresse ses lunettes sur l’arche de son nez, fixant la porte de l’entrée.
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Jeffenka ?, demande son père en se levant à son tour.
Un pied à peine déposé sur la neige, le craquement de sa pantoufle fut multiplié dès lors que plusieurs serpents semblaient partir rapidement dans la même direction. Dansant quelques secondes sur ses pieds, Geoffrey se rend compte qu’aucun des rampants ne s’occupait réellement de lui. Pourtant les voix se multipliaient.
Ffffuiiir... Ilssss tueeent... Mikhaïl pose sa main sur son épaule, le faisant sursauter.
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Papa, chto-to proiskhodit... (*Papa, il se passe quelque chose...)Ssssang mêssslé, ssssang molssssdu, tousss mortsss...
Une explosion se fit entendre, venant d’une rue ou deux plus loin. Alertée par la porte ouverte et le bruit, Cordelia s’était jointe à eux sur le perron frissonnant de froid. Le silence si caractéristique des nuits d’hiver venait encore une fois de se briser, tandis que plusieurs personnes sortaient à leur tour.
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MAGI-SOLDATY ! Begi, yesli tvoya krov' nechista ! (*LES SOLDATS MAGES ! Fuyez si votre sang est impur !)Soudainement l’alarme parti à résonner produisant ce son si distinctif qui annonce un désastre. La famille Loskoutrov se regarde, leurs visages tous apeurés. La Perestroïka
(*Reconstruction) avait été lancé. Cette rumeur courait depuis des mois, que le gouvernement voulait mettre fin à l’impureté dans le sang des sorciers. La société russe entière vivait dans l’incertitude : était-ce une simple fantaisie ou une promesse électorale de leur Chef d’État ?
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Sobiray sumku, my ukhodim ! (*Préparez vos affaires, on s’en va !)Cordelia attrape le bras de son fils, comprenant très bien ce qu’il se passait dehors. Elle se précipite dans la chambre, attrapant ce qu’elle estimait d’important. Elle fut rapidement rejoint par Mikhaïl, leur maison autrefois si tranquille se transformant sous l’horreur et le stress en débarras d’affaires estimées inutiles. Geoffrey s’était figé, ne comprenant pas réellement l’ampleur de ce qu’il se passait, ni pourquoi ses parents semblaient aussi pressés de partir. Partir ou, d’ailleurs ? Devaient-ils partir le temps que l’alerte se calme et qu'ils reviennent ensuite ? Évidemment bien trop jeune pour saisir l’ampleur de ce qui leur arrivait, le jeune garçon ne pris avec lui qu’un livre, son album photos et sa baguette.
Les Magi-soldaty couraient dans les rues de la ville, dont leurs pas se faisaient entendre distinctement. On pouvait déjà entendre qu’ils forcent les maisons pour en extirper les habitants malchanceux. Chanceux s’ils étaient tués sur place, malchanceux pour ceux qui finiraient sûrement à la Goulag... Nom si bien donné à la prison qui méritait une réputation aussi sinistre qu’Azkaban.
Passant par la porte arrière, la famille Loskoutrov réussit à éviter la vague de Magi-soldaty. Ils n’étaient clairement pas au bout de leurs peines car un long périple d’exil dans les froideurs de l’hiver les attendait...
Maybe a change is what we deserve.
♫ -
On va s’en sortir, d’accord ? Soyons patients. On va y arriver.-
Khorosho Mama. (*Ok, maman) Le train qui devait les transporter jusqu’en Estonie était froid, humide et sentait le vieux foin ramassé durant la fin de l’été. La petite famille n’était pas la seule à fuir la Perestroïka car plusieurs personnes s’étaient entassées dans le wagon se protégeant du froid en se tenant le plus proche les uns des autres. Le trajet allait être rude et long, les vivres n’étaient pas grands… Beaucoup de sorciers au sang impur se dirigeaient vers le pays voisin dans l’espoir d’une vie meilleure. Loin de s’imaginer que ce qui les attendait là-bas était peut-être pire que ce qu’ils venaient juste de quitter. L’Estonie avait vécu la même révolution mais semblait beaucoup plus préparée à aider ceux voulant fuir leurs terres. Ce fut donc un portoloin qui fut distribué aux déserteurs, les faisant tournoyer inconfortablement jusqu’à la ville portuaire d’Esbjerg.
Ce périple semble durer un an aux yeux du jeune garçon de onze ans et demi. Il n’en voit pas la fin, la fatigue l’assaille et il avait beau nettoyer ses lunettes avec le tissu de son haut, elles devenaient aussitôt sales. Pouvait-il seulement se plaindre d’un détail aussi futile alors qu’il voyait la peur détruire le regard si doux de sa mère ? Que son père, malgré la crasse, se rongeait les ongles jusqu’au sang ? Son regard noisette se baisse sur ses propres mains, dégoûté de les sentir aussi sales. Plus de vingt heures de train, succédé par un voyage en poudre de cheminette pour arriver à Tallinn. Ville Estonienne où ils avaient pensé terminer leur périple… qui ne faisait que commencer. Puis le portoloin, remplissant leurs narines d’une odeur saline et de poisson. S’en suivit d’un autre long trajet en bateau. Ils ne comptaient plus les heures, ni les jours. Ils préféraient compter le nombre de rations de survie qu’il leur restait jusqu’à la prochaine étape où ils pourraient de nouveau faire le plein. Mikhaïl avait pensé avec justesse en gardant le plus gros de sa fortune loin des banques de Gobelins. La banque moldue avait été beaucoup plus facile à vider, ainsi que l’argent permettant par la suite de circuler en Europe.
L'Angleterre arrive telle une terre promise. Tandis que le capitaine crie qu'il voit les berges, la famille se redresse pour venir voir de leurs propres yeux. Enfin ils étaient loin des affres des Magi-soldaty, enfin ils entrevoient un avenir ou leur fils pourrait grandir sans crainte de pouvoir dire : je suis un sang-mêlé ! Ils étaient si naïfs...
Après encore deux semaines interminables de marche, Mikhaïl, sa femme et son fils, trouvent pieds à terre sur l'un des hameaux sorciers proche de l'école Poudlard. Ils purent trouver asile et réconfort auprès de plusieurs acteurs de l'Ordre du Phoenix, leur assurant protection et une place dans la prestigieuse école de Poudlard. Cordelia sourit enfin pour la première fois depuis des mois, respirant à plein poumons cette odeur qui lui rappelait son enfance.
***
-
Gryffondor !, crie le Choixpeau à peine déposé.
Sentant tous les regards posés sur lui, Geoffrey se dirigea vers la table qui semblait l’acclamer le plus fort. Il vit les couleurs rouges et vives arborées leurs uniformes, avant de se rendre compte que le sien venait de prendre les mêmes teintes. Malgré la timidité, un grand sourire naquit sur son visage. Il prit place vers les bancs où semblaient être les plus jeunes, où alors était-ce cette jolie demoiselle à la chevelure turquoise, qui avait attiré son regard…? À peine fut-il assis, ajustant son uniforme neuf à sa nouvelle position que la jeune fille en question se mit à lui parler :
-
Saluuut ! Moi c'est Sloane, et toi ? Tu viens de Russie, c'est ça ? Je suis irlandaise. Du Nord, évidemment. C'est rare d'avoir des transferts en milieu d'année. Au fait, bienvenue à Gryffondor ! C'est la meilleure maison, et je dis ça en toute objectivité, affirme t-elle ironiquement en jouant avec sa cravate rouge et or.
-
Je… Je n’ai pas bien comprendre, avoue-t-il penaud.
Un malaise s’installe durant quelques secondes, ces secondes qui s’éternisent tandis qu’ils se regardent l’un l’autre dans les yeux. Sloane finit par s’excuser, tentant de s’adapter au nouveau venu qui ne comprenait pas encore très bien l’anglais. Rapidement, la jeune gryffonne s’était portée garante de tout : le présenter aux autres tout comme lui faire visiter les dortoirs de leur maison. Ce fut donc le soir même que Geoffrey rencontre
@Roseann R. Leigh, camarade de chambre de la jeune fille avec qui elle était devenue amie. Assis sur les coussins de la salle commune, ils avaient passé le reste de la soirée à discuter de tout et de rien, tentant de se faire comprendre malgré la barrière de la langue.
Ce fut la première journée de classe qui marqua la vraie rencontre avec le groupe d’amis auquel il allait finalement appartenir. C’est aussi cette première journée qu’il la rencontre, Nolwen Petitjean. Une blondinette au joli sourire se cachant derrière ses lunettes. Rapidement il comprend que la jeune fille était loin d’être timide et qu’elle rayonnait solairement partout où elle passait. Sa lumière ne put empêcher son cœur de valser : il était réellement tombé amoureux pour la première fois.
Here comes the sun.
♫ L'adolescence commence, son corps grandit, change. Les traits rondouillets de l'enfance disparaissent, creusant ses joues et ses yeux. Geoffrey se rend compte que finalement il a trouvé sa place ici, à Poudlard. Sa deuxième année officielle commence en septembre 1977. Il a de nouveaux amis, dont certains rencontrés comme camarade de chambre, comme
@Flynn A. Shacklebolt. Malgré toutes les tensions que connaît le gouvernement d'Angleterre, il ne se pose plus la question. Ici, il se sent chez lui avec un large sentiment de sécurité. Il se sent entouré et peut se le confirmer d'un simple regard balayé sur ce petit groupe d'amis qu'ils étaient devenus. Tous assis dans le parc, à profiter de cette rare journée ensoleillée au mois de septembre. Les rires se faisaient entendre, synonymes de l'insouciance. Les premiers amours naissent également.
Le regard songeur, Geoffrey observait Nolwen Petitjean pratiquer sa passion : la photographie. Elle semblait si absorbée que c'en était presque fascinant. Chaque détail n'échappe pas à ses yeux aguerris. De tout ce petit groupe, son caractère solaire était ce qui l’attirait le plus. Son regard ne cessait d’alterner entre elle et Sloane, ne sachant laquelle des deux il trouvait la plus rayonnante et la plus belle. Alors, il se contentait d’observer le bonheur au travers de ses yeux naïfs, profitant du havre de paix et du soleil réchauffant à la fois son cœur et sa peau. Soudainement, le déclencheur de l'appareil qu'elle tenait en main se fit entendre, faisant comprendre au garçon ce qu'elle venait de faire.
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Arrête avec les photos…, rit-il gêné en se cachant légèrement le visage derrière sa main.
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Ja-mais! C'est ça qui fait nos souvenirs, renchérit Nolwen.
Les souvenirs… Le visage du jeune Gryffondor se fit penseur. Il se souvint de ce seul album photo de sa famille et de son enfance qu'il lui restait après leur départ de Russie. La Poufsouffle marquait un point. Le bruit si caractéristique du déclencheur à photos se fit de nouveau entendre.
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Hey!!Nolwen part rire sous les protestations de son ami. Derechef Geoffrey se redresse, désormais bien plus grand qu'elle en taille, pourchassent celle qui lui faisait affront. Les deux adolescents courent en riant, oubliant de reprendre leur souffle dans cet instant d'euphorie. Peu importait qu'on les entende, ce petit monde qui n'existait qu'entre eux était bien suffisant. Après de longues minutes à jouer au chat et à la souris, il finit par trouver l'ouverture parfaite : la capuche de l'uniforme de Nolwen se retrouve sur sa tête, barrant sa vue. Aussitôt fait, il s'empare du bien précieux de la jeune fille avant qu'elle ne revienne à elle et contre attaque. Encore une fois, le déclencheur se fit entendre.
Le visage de Nolwen se déforme sous la surprise, outrée d'avoir été posée avec l'uniforme à l'envers et les cheveux portant les dernières traces de leurs chamailleries. Alors qu'elle s'apprêtait à fondre sur lui, le jeune russe monte l'appareil photo devant son visage en espérant qu'il lui serve de bouclier ultime contre la tornade Petitjean.
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C'est toujours toi qui prend les autres en photos. Avec celle-là on ne pourra jamais t'oublier.-
C'est sûr qu'avec une coiffure comme celle-là on risque pas de m'oublier, Jeff !!Malgré son ton dur et presque fâché, son sourire était toujours présent sur ses lèvres. Tout le monde riait. Et c'était tout ce qui pouvait compter en ce moment. Le cœur rempli d'espoirs et de promesses sur l'avenir, Geoffrey se dit qu'il ne souhaiterait pour rien au monde que cela change.
We carry on through the storm, tired soldiers in this war.
♫ [Geoffrey, rentre à la maison le plus tôt possible, s’il te plait. Je t’aime - Maman]
TW - Décès d’un proche.28 février 1978.
Il sent l’urgence dans ses tripes. L’école est sans dessus-dessous, il se doute que les choses n’avaient pas dû être plus belles à l’extérieur. La réalité le rattrape soudainement tandis qu’il se demande comment vont ses parents. Cette attaque marquant l’histoire fait remonter en lui bien des souvenirs qu’il aurait voulu échapper. Il ne prend pas la peine de dire quoi que ce soit ni à Nolwen, Roseann ou Katya, se trouvant pourtant à côté de lui alors qu’il avait reçu la lettre dans les mains. Et s’ils devaient à nouveau fuir ? Changer de pays ? Partir pendant de longs mois avec peu de nourriture et à peine de quoi se réchauffer ? Est-ce que tout allait recommencer encore une fois ? Lui qui n’avait pourtant pas de souffle court jusqu’à en perdre haleine. La maison semblait si loin maintenant qu’il ressentait l’envie pressante de pouvoir s’y rendre. Le froid lui brûlait les poumons autant que la peau sur ses joues, tandis qu’il passait devant de nombreuses habitations brûlées et de longs pleurs sortant des chaumières encore intactes. Il l’avait senti. Il en était certain. Tout a recommencé. Ils allaient partir. Il ne reverrait plus personne et n’aurait même pas le temps de leur adresser un adieu.
Si seulement fuir avait été ce qui l’attendait.
Son monde s’écroule tandis que ses jambes flageolent sous son poids. Le poids de la nouvelle le frappe en plein cœur. Ce n’était pas tout le monde qu’il allait perdre mais son père. Encore allongé dans la maison, déposé sous un drap détrempé par les larmes de sa mère. Il ne l’avait même pas atteint qu’il s’était effondré. Son corps au complet tremblait sans même qu’il ne s’en rende compte. Ce fut l'embrasse de Cordelia qui le ramène dans son corps, sentant l’émotion le secouer plus qu’il ne l’aurait pensé.
Il ne reviendrait pas.
Mikhaïl Ivanovitch Loskoutrov était âgé de 37 ans quand il succombe à ses blessures, défendant le village qui l’avait accueilli de l'assaut des Mangemorts. Il avait protégé sa femme avec un sortilège de désillusion, la cachant ainsi aux yeux de quiconque voulant s’en prendre à son statut de moldue vivant parmi les sorciers. Cordelia n’avait rien pu faire, prostrée et cachée, assistant à tout ce qui pouvait se passer autour d’elle sans la moindre défense. Elle y avait pensé, de si nombreuses fois pensé… sortir et combattre comme elle le pouvait avec ses maigres défenses. Et si elle l’avait fait, elle serait morte en héros auprès de lui. Mais le visage de son enfant s’était alors imprégné dans sa rétine et elle prit la lourde décision de ne pas bouger. Condamnant ainsi celui qu’elle aimait.
***
Les semaines qui suivirent furent difficiles pour beaucoup de sorciers et leurs familles. L’école s’était mise en pause le temps de pouvoir aider les alentours et les élèves à se reprendre face à cette nuit qui marqua l’histoire : La nuit pourpre. La présence de Sloane et ses amis permirent à Geoffrey de pouvoir rester debout. De retrouver une once de sourire dans la tempête qu'étaient ses sentiments. La Gryffondor qui l’avait accueilli lors de sa première journée n’avait plus quitté ses côtés depuis qu’il était revenu dans les murs de l’école. Geoffrey ne pourrait jamais assez l’en remercier.
Ils s’aimaient et enfin, ils se l’étaient réciproquement avoués. Et dire qu’il avait fallu quasiment tout perdre pour ça…
Little Joe was blowin' on the slide trombone !
♫ -
Oh, c’était le vinyle préféré de па́па… (*Papa)-
Oui, il l’avait mis au grenier avant de pouvoir racheter un lecteur de disques. Il l’a complètement oublié après ça. Je viens de le retrouver en faisant le ménage. Les prunelles brunes de l’adolescent reste fixée sur la pochette, lui rappelant les lointains souvenirs de Russie ou la musique jouait constamment chez eux. Il n’arrivait pas à décider si le souvenir lui faisait du bien ou s’il faisait extrêmement mal, car cela faisait un an
et demi que son père les avaient quittés déjà. Cordelia le sortit de sa rêverie en lui arrachant la pochette des mains. Il ne dit rien mais il la suit attentivement du regard, constatant qu’elle le sort pour l’installer dans le lecteur de disques. Les premières notes caractéristiques de la chanson d’Elvis résonnent, ramenant une ambiance oubliée dans la maisonnée. Cordelia n'attend pas pour se mettre à danser, levant ses bras en l’air et secouant ses hanches à la rythmique de la chanson. L’adolescent l’observe, s’amusant de la voir ainsi danser en ayant les yeux fermés.
-
Jeffenka ! -
Quoi ?-
Tantsuy ! (*danse)-
M’maaaan, sérieux… Évidemment qu’elle ne l’entendait pas de cette oreille, s’approchant de lui tout en continuant de danser. Il savait à son regard qu’elle ne lâchait pas prise et se mit à rire. Ce fut d’abord quelques pas maladroits, comme un vieux disque rayé n’ayant pas joué depuis longtemps. Mais rapidement la bonne humeur musicale fut partagée entre la mère et le fils. Geoffrey attrape les mains de sa mère et la fait tournoyer tandis que ses jambes dansent enfin le rock comme il se le devait. Comme son père lui avait appris.
-
Et bien…, fait alors une voix au travers de la musique.
Si seulement mon fils pouvait me faire danser comme ça moi aussi !-
Teresa, Dale ! Entrez donc !Gêné d’avoir été surpris, Geoffrey s’enquit d’aller éteindre la musique. Le couple rentre finalement avec leurs deux enfants, mais le regard de Geoffrey s’était posé sur Nolwen tandis qu’un large sourire s’était dessiné sur son visage. Accueillant son amie à bras ouverts,
@Caleb E. Petitjean ne put pas échapper au câlin quand vient son tour. Le jeune russe était bien trop accueillant pour ça. La journée était ensoleillée et la maisonnée qui avait paru vide pendant si longtemps se remplissait de rires aux éclats et d’une délicieuse odeur de nourriture. Quelques minutes seulement après, Sloane et leur nouvelle amie Serdaigle Katya, arrivent à leur tour. Tout le monde s’était porté volontaire pour aider Cordelia à installer son jardin en arrière de la maison en échange d’une grande tablée de nourriture et d’un bon moment entre amis.
-
Ah ! Voilà ma chanceuse !-
Mama, ne nachinay! (*Maman, commence pas) -
Arrête, depuis le temps que tu m’en parles de ta petite Sloane !Accueillant la jeune fille dans ses bras, Sloane se mit à rire. La situation était cocasse mais surtout très malaisante pour le jeune garçon.
-
On est plus ensemble, tu sais…-
Quoi ?! Bougre tu ne me dis rien ! Sloane, ma chérie, il ne t’as rien fait j’espère ? Dis-moi ce qu’il a fait comme bêtises !Existait-il un trou assez profond pour qu’il puisse s’y cacher…?
-
Cordelia… Le plat dans le four sent le brûlé, ajoute Roseann calmement.
Sauvé in extremis par le gigot peut-être brûlé, Geoffrey lance un regard de remerciements à Roseann avant d’aller la serrer dans ses bras. Il lui en devait une. Ils finirent par en rire ensemble, tandis que le Gryffondor remarqua qu’elle ne s’était pas tendue à son contact. Au contraire, Roseann Leigh semblait… sourire. Alors il l'imite finalement, observant les autres s'amuser autour d'eux tandis que son bras était resté posé sur ses épaules.
Un an après cette fameuse nuit pourpre et le décès de son père, les choses n'allaient peut-être pas aussi mal qu'il le pensait. Geoffrey avait du soutiens autour de lui et une famille qui s'était agrandie avec ce groupe d'amis qu'ils étaient. Tant qu'il n'était pas seul, tout irait bien.
Should've took more photographs and asked you all my questions, like : "What would you do if you were me?".
It feels too soon to let you leave.
♫ -
Ça ne peut pas nous faire de mal, puis avec le début des procès, les derniers partisans du Lord se font discrets - y a pas trop de risque d'aller à Pré-Au-Lard boire une bièraubeurre ou un thé si vous préférez, tente Katya excitée à l’idée d’enfin faire quelque chose de normal pour leur âge.
-
Alleeeez, j'ai l'impression que ça fait des années qu'on a pas eu un petit moment sympa, c'est que le temps d'une nuit et je connais un passage qui nous mènera sur le chemin sans se faire repérer, pas loin de la forêt, continue Geoffrey.
-
Ça serait l'occasion de relâcher un peu la pression, Roseann, tu ne penses pas ?, renchérit Nolwen, terminant de la convaincre.
L’adolescence est un moment charnière dans la vie de tout être humain. C’est ici que tout se construit, que l’identité se définit. Alors on se cherche, on se trouve parfois au travers des autres. L’on prend des mauvaises décisions qui feront partie de l’apprentissage de la vie. Et qui en termineront d’autres.
Les mauvaises décisions, Geoffrey en a souvent pris. Enfant toujours un peu maladroit et souvent empêtré avec son anxiété, le Gryffondor avait mangé énormément de coups. Mais sa force le faisait se relever à chaque fois. Les mots de sa mère résonnaient souvent dans son esprit, l’aidant à se relever à chaque chute :
Dans la vie, ce sont les épreuves qui nous corrigent et nous aident à grandir. L’erreur est humaine, mais parfois elle est fatale. Dans cette simple sortie qui aurait dû punir quatre adolescents après le couvre-feu, seuls deux en reviendront.
AVADA KEDAVRA !
Il se réveille en sursaut, le corps complètement en sueur. À peine son cerveau eut le temps de constituer la salle dans laquelle il se trouvait que déjà le décor tangue, le rendant nauséeux. L'infirmière accourt juste à temps, déposant un seau dans lequel il put restituer ce qui lui restait dans l’estomac… autrement dit, rien. Haletant, totalement penché dans le lit, il ravale plusieurs fois sa salive en tentant tant bien que mal de respirer. Sa tête le martele, son corps est faible et il ne remarque pas encore que ses jambes, elles, ne répondent plus.
L’infirmière lui frotte le dos, l’appelant par son nom. Sa vision est floue et il se rend compte qu’il n’a plus ses lunettes sur le nez. La femme à ses côtés est habillée de blanc… Comme pris d’un nouvel électrochoc, il se met à regarder avec rapidité autour de lui en distinguant vaguement des formes familières.
-
Jeffenka, les dieux soient loués…, prononce sa mère en lui tenant les joues, les larmes coincées dans sa gorge.
Un flash de lumière semble passer devant ses yeux tandis qu’il les plient sous la douleur lancinante qui venait de lui traverser le crâne. Sa main était venue rejoindre son front, cherchant par un quelconque moyen à apaiser la douleur. Sa vision fut cette fois-ci claire, car de près, lui permettant de superposer les souvenirs. Il se revoit tendre la main, hurler le nom de Nolwen, avant que son corps ne tombe telle une poupée de chiffon.
-
Nol..Nolwen… Et Rose ! Katya ! Elles… Elles sont…Cordelia était partagée entre le sentiment de vouloir réprimander son fils pour avoir pris de tels risques mais le ton brisé de sa voix lui déchire tellement le coeur qu’elle s’en trouve incapable. Alors à la place, elle l’enlace. Le serrant si fort qu’elle avait la maigre impression de pouvoir tenir les morceaux brisés de son fils en place. Geoffrey était persuadé d’être le seul survivant. Et que tout était entièrement de sa faute.
***
-
Allez, encore un essai Mr Loskoutrov !, l’encourage l’infirmière.
Il se lève, tente de rester debout, titube. Tombe. Il n’a plus la force de se tenir. Plus la force de se battre. Ses jambes semblent se remettre difficilement du courant électrique qui l’avait traversé de part en part. Il avait été chanceux que le courant réussisse à trouver un chemin de sortie sans passer par son cœur.
Chanceux… Qu'elle maigre consolation face à la mort. Mais sous le regard de sa mère, s’accrochant à la vie au travers de lui, que pouvait-il faire si ce n’était qu’essayer ? Inlassablement. Indéniablement. Mais sans aucune once d’envie.
Se rendre aux funérailles en fauteuil n’avait pas été la chose la plus aisée. S’y serait-il rendu si sa mère n’avait pas insisté ? Sûrement pas. Comment allait-il encore pouvoir regarder la famille de Nolwen et celle de Katya dans les yeux ? Auraient-ils souhaité sa mort, à la place de la sienne ? Pourquoi avait-il survécu ?
De nombreuses questions existentielles pesaient sur son cœur. Tellement qu’il n’en comptait plus. Tellement qu’il ne savait parfois pas quoi dire au psychomage qui le suivait avec tant de bienveillance et de douceur. Parfois les larmes coulaient à flot, parfois il n’était pas capable de prononcer de simples mots. Tout était rythmé autour de sa convalescence, si bien que les études avaient dû passer au second plan. Geoffrey n’avait pas touché un seul livre que Sloane lui avait apporté. Après avoir passé vingt-trois jours à Ste Mangouste, il pouvait rentrer, lui. Le chanceux qui n’avait eu la chance que de survivre.
Il s’était présenté à ses examens, puis les avaient échoués, incapable de se souvenir de ces années d’apprentissage qui avaient pourtant tant compté pour lui.
Raté. Meurtrier meurtri, incapable de se pardonner. Mais de nouveau capable de marcher.
All of these years when we were here, are ending. But I'll always remember.
♫ 5eme année. Une seconde fois. Ses pieds foulent les pavés pourtant si familiers de l’école. Il voit au loin les fantômes du passé, certains vivants et d’autres dansant comme un leurre. Sur sa propre table, des cheveux blonds dont il est surpris de revoir la couleur. À celle voisine, un géant qui dépasse toutes les autres têtes et dont le regard hante chacun de ses cauchemars. La gorge serré, il se rassoit à la longue table des Gryffondors, constatant que plus personne n’y est pour s’asseoir. Les couleurs de Sloane avaient elles aussi disparues, alors qu'elle avait décidé de ne plus jamais revenir face à la nouvelle politique de l'école. Il avait longuement hesité à la suivre dans sa protestation, mais il se ravise. Il voulait et aller changer les choses depuis l'intérieur.
Il se demande alors à quoi vont ressembler ses après-midi ensoleillés. Sans le sourire de Nolwen, sans le regard protecteur de Caleb, sans les rires de Katya et l’humour de Sloane, et sans la complicité de Roseann avec sa compère Poufsouffle. Il reconnaît quelques visages au sein de cette nouvelle classe à laquelle il appartient. Certains semblent nouveau et s’il avait bien vu le groupe d’admission à la répartition, il n’y avait pas eu que des premières années. Son regard roule sur le parchemin de présentation des examens à venir, ceux qu’il avait loupés. Comme beaucoup d’autres choses dans son existence, pensait-il.
Prenant une grande respiration il déplia le parchemin, l’heure n’était pas à s'apitoyer sur son sort. Il n’avait plus le droit à l’erreur maintenant que le Conseil des purs avait accepté sa demande de seconde chance.