“Who in the world am I? Ah, that's the great puzzle.”
♫ L’amour semble illuminer la pièce tandis que le soleil se couche tranquillement. La cuisine s’habille de cette couleur dorée, alors que les rires se peignent les murs marbrés. Enivrés par un amour naissant, tout paraissait parfait. Problèmes oubliés, relations passées envolées. Les séances de vaisselle se transformaient en bataille où la mousse virevoltait jusqu’au sol et où la jeunesse brillait sur leurs traits. L’insouciance coulait dans leurs veines, pensant que l’avenir leur ouvrait soudainement les bras.
Alors que l’enfant atteignait ses neuf mois, le couple avait décidé sur un coup de tête de se marier. Amis depuis plusieurs années sur les bancs de l’école de magie, Chén Lù n’avait jamais osé avouer ses sentiments à son amant. Prise d’un élan de courage, tandis que l’homme qui faisait vrombir son cœur s’était engagé et venait d’entamer sa paternité, elle s’était confessée. Il n’en fallut pas plus pour que le petit foyer ne tombe en morceaux comme un jeu de cartes, tandis qu’il s’échappait avec sa nouvelle bien-aimée. Un amour fou, des sentiments juvéniles qu’ils retrouvaient. Leurs cœurs se joignent enfin, tandis que de l’autre côté quelque chose prend fin. Une femme et un bambin.
Petite poupée aux yeux distraits par tout ce qu’ils voyaient, habillée d’une robe ajustée, elle se promenait d’invités en invités, toujours avide d’être au contact de ces adultes. La cérémonie avait été assez sobre, quelques bouquets, un buffet. Membres les plus proches, famille et amis, ne remplissant même pas la salle. Peu leur importait, un million de papillons dansaient dans leurs yeux.
☆ ☆ ☆
La petite avait grandi. Trois années et les joues bouffies, elle témoignait d’une curiosité sans faille. Ses parents étaient si fiers, car rapidement, ils s’étaient rendu compte qu’elle était sûrement la plus belle chose qu’ils aient accomplie.
Les rires étaient déjà devenus vieux. Quelque chose ne brillait plus en eux. Ce souffle si revigorant n’avait été qu’une flamme passagère dans deux cœurs bien trop heureux de se retrouver. Victor Mandragoran s’était encore une fois lassé. Les voix se haussaient, tandis que leurs cœurs se séparaient. La jeune mère, aux joues rosies et aux émotions agitées, se demandait ce qui avait bien pu changer. Avec lui, les lundis matin devenaient des vendredis soir, tandis que pour lui, elle semblait presque accessoire.
“But, if the world doesn’t make any sense, why can’t I create my own ?”
♫ Assise sur un grand banc de bois, les bouclettes pendues sur chaque côté de sa tête, elle n'écoutait guère les adultes parlant en émoi. La discussion tournait pourtant bien autour de son joli minois. Son esprit vagabondait, ailleurs et dans ses pensées, les images qui défilaient l’intéressaient. Le livre, bien trop grand pour ses petites jambes, de chaque bord, dépassait. Sa marraine, Li Xiu Chang dénommée, était la seule à s’en préoccuper dans la salle bondée. Quatorze années et déjà le cœur affiné à tant aimé.
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Tu ne comprends pas encore tous les mots, mais les images en disent bien plus, tu vois, dit-elle dans une voix rassurée.
Son index s’exprime dans un tracé, passant sur les lettres dorées. Alice aux pays des merveilles allait devenir son livre préféré. Pas celui qui a la couverture ébréchée, mais bien celui coloré. Ses parents s’étaient divorcés, tiraillant les deux familles qui ne s’étaient apparemment jamais aimées.
Petite poupée aux yeux discrets, aucun mot ne pipait. C’est sa mère qu’ils avaient choisie, sans avoir évidemment demandé son avis. Que pouvait-elle comprendre de tout ce charabia dans lequel chaque parti pouvait se méprendre ? Alors, pour s’occuper, de ses petits doigts de fée, elle commençait à créer. Bien silencieuse, elle rendait sa mère bien heureuse. Peinture, crayonnés et quelques papiers, rapidement, elle s’était mise à rêver.
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L’enfance défilait, son regard s’était affuté. Rapidement, la maisonnée avait retrouvé vie, malgré qu’il en manquait l’envie. La mère, essoufflée, tentait comme elle pouvait de ne pas abandonner. Agenouillée et torturée, souvent, elle pleurait. Bien démunie, la petite fille sourit. Si elle ne pouvait la rassurer, alors, elle l’épaulerait. Très vite rapprochées, mère et fille s’étaient liées. Envers et contre tout, c’était tout ce qui comptait. Confidences pour confidences, elles se faisaient confiance. Sans remontrances, car jamais la petite poupée n’était disputée. Bien trop sage, comme une image, jamais un mot ou une action déplacée.
Niamh avait grandi avec sa mère. Non sans revoir celui qu’elle pouvait appeler père, quelques fins de semaines ou des journées de vacances, dans l’insouciance. Car toute la responsabilité, à Chén Lù, incombait. Bien aidée par tante, oncle et cousine, les sourires étaient grés, de nouveau édifiés dans la cuisine.
“You must close your eyes. Otherwise... You won't see anything.”
♫ Les premiers pas d’une nouvelle vie, entourée de pierres vieillies par le temps et d’un millier de tableaux loin d'êtres muets. Bagages de culture déjà bien imprimés, son adaptation n’est en rien difficile. Elle retrouve une partie de sa famille, découvre des amis et apprend à vivre loin de sa mère tant aimée. Régulièrement, elle lui envoie des lettres, conservant cet échange épistolaire comme un bien apprécié. Étrangement, elle ne manquait jamais de sujets. D’abord craintive de devoir l'abandonner, seule chez eux, son esprit devint rapidement bien trop occupé pour y penser.
L’univers des découvertes s’ouvre à elle, parmi les nombreux ouvrages et les pages grattées et usées. Le tableau semblait parfait, maîtrisé. Sans un pli, réglée comme une horloge et précise comme une boussole, elle ne paraît jamais dévier du droit chemin. Sérieuse et appliquée, elle cherche la reconnaissance dans le regard des adultes et l’assurance de ne jamais l'alarmer. Puisqu’elle réussissait tout ce qu’elle entreprenait, jamais sa mère n’aurait à s’inquiéter. Un peu romancée et quelques gouttes rosées, chacune de ses lettres semblait décrire l’univers irréprochable qu’elle construisait.
Les grandes allées de la bibliothèque étaient devenues son nouvel endroit préféré. L’apprentissage était important, mais plus précisément, elle aimait dévorer les histoires fabulées. Contes et légendes, dont le maître Beedle le barde, n’avait rien à envier, elle découvrait des nouveaux mondes insoupçonnés.
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Les mystères regorgeaient partout où sa tête semblait tourner. Au détour d’un couloir, derrière un tableau, dans une allée, derrière des rosiers… Les enquêtes venaient d’obtenir une nouvelle passionnée, tout comme le journal de l’école. Toujours prête à noter et à décrire ce qu’elle voyait, elle s’était rapidement engagée. L’œil affuté, sans néanmoins déroger au règlement, elle investiguait. Dans sa poche se cachait toujours un millier d’histoires prêtes à être contées à qui seulement voudrait l’écouter.
“She was falling down the rabbit hole.”
♫ Tout était prêt. Il ne lui restait plus qu’à décoller. Le dos droit et un sourire parfaitement affûté. Perdue entre l’océan Pacifique et la mer des Philippines, l’île Minami Iwo se dresse, majestueuse. Les pétrels-tempête, tous alignés, amènent les quelques élèves ne résidant pas encore entre les murs. L’étendue d’eau semblait époustoufler quiconque s'approchait, alors que son regard, lui, ne savait plus où se poser. Un nouvel uniforme lui avait été donné, dont la différence avec Poudlard était notoire. La jupe était plus longue, plus ronde et moins plissée. Savant mélange entre le Hakama et le Sailor Fuku occidentalisé. L’uniforme paraissait bien trop petit, affûté normalement aux premières années. Il prit rapidement forme dès qu’ils posèrent sur elle le nouvel uniforme. Grandissant à vue d'œil, forcée de constater que l’habit était certainement enchanté. Le léger rosé lui rappelait les nombreux arbres fournis de fleurs de cerisiers. Le professeur lui dit que si ses notes sont au sommet, alors il deviendra rapidement doré. Un défi plus qu’accepté, le regard brillant de fierté.
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Nieshve…-
Īe, Neeve matawa Nieve ? Dochira no kata ga jōzu ni hatsuon dekimasu ka? (*Non, Neeve ou Nieve ? Lequel arrives-tu le mieux à prononcer ?)-
Nashi, conclut l’élève frustré.
Furunēmu o mōichido itte itadakemasu ka? (*Aucun. Peux-tu répéter ton nom en entier ?)-
Niamh Yīnghuā Mandragoran.-
Yīnghuā Mandlagolanu, Motto kantandesu ! (*Yīnghuā Mandragoran, c’est plus facile !)Alors Yīnghuā se sera. À nouveau baptisée, l’écolière transférée pouvait enfin s’intégrer. Rapidement, elle se rend compte que le niveau ici était bien plus élevé. Malgré toute sa bonne volonté, elle rencontre beaucoup de difficultés et ne verra jamais son uniforme devenir doré.
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Motto ochitsuite! Anata wa arashi yori mo urusai nodesu!, lui assène sèchement le professeur.
(*Plus calme ! Tu es plus bruyante que la tempête !)-
Tameshite mimasu…, couine la jeune fille en larmes.
(*J'essaie...)Une nouvelle bourrasque s’élève tandis que la jeune fille, assise en seiza, tentait de se contrôler. Il lui sommait de se calmer, tout en faisant trembler les murs boisés. Complètement secouée, il lui était difficile de retrouver un calme. Tout se reposait sur l’amalgame des sentiments bien trop présents. Progressivement, chaque brin de conscience trouve son compartiment. Si bien qu’après quelques mois seulement, les premiers résultats se présentaient. Magie de l’air, développant un nouveau flair.
Une année vite écoulée, il était maintenant temps de rentrer.
“The secret, Alice, is to surround yourself with people who make your heart smile.”
♫ TW : Santé mentale d’un proche.Son retour ne s’était pas passé comme prévu, car le destin l’avait prise au dépourvu. Ce n’était ni sa mère, ni son père, qui sur le quai l’attendait. Les visages radieux de la famille Chang avaient toujours pour but de la rassurer, alors, elle se dit que sa mère devait simplement être occupée. Les lettres s’étaient raccourcies, les échanges s’étaient amoindris. Bien occupée avec sa scolarité, la petite Serdaigle n’y avait même pas songé. Comment sa mère aurait-elle pu ? Désespérée, laissée à ses pensées, le sourire de Chén Lù, lui, avait totalement disparu. La culpabilité se mit à ronger la nouvellement arrivée. Sa fille partit à l’autre bout du monde pour sa formation, elle avait perdu son étançon. Sa dépression avait fini par toucher le fond, et ça, elle ne l’aurait jamais deviné. Fort heureusement pour l’accablée, sa famille avait rapidement su l'épauler. Car à sa vie, elle avait attenté.
L’appartement fut vidé, ses affaires transportées. Sa marraine était là pour l’accompagner, mais avant tout pour l’héberger le temps que sa mère soit internée.
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La rentrée avait rapidement pointé le bout de son nez, tandis que les étudiants se racontaient avec gaieté leurs vacances. Si tous se parlaient avec aisance, elle se trouvait sans concordance. Une année passée et ils s’étaient éloignés. Une année passée et il l’avait oublié. Les premières journées s’écoulaient, difficiles, malhabiles. Pourtant, un espoir naît. Nathaniel, explorateur aux ambitions démentielles, était venu lui parler.
“It’s then, only then, that you’ll find Wonderland.”
♫ Nouvelle année, rien n'a changé. Ou peut-être beaucoup de choses. Bien loin d'être revenue morose, elle sentait la chance revenir tout près. Amour rapproché, de son malheur elle se sentait comblée. Redoublé, de sa 5e année, il était désormais quotidiennement à ses côtés.
Bien contente et accueillante, elle se faisait d'autant plus plaisir de briller. Ses efforts récompensés, ils l'avaient nommé préfet. Un nouveau titre, de grandes responsabilités.
Niamh Mandragoran n'abandonnera jamais.
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