Tétanisé. Les muscles tendus à en faire hurler, la bouche fermée dans un cri silencieux, les yeux ouverts sans pouvoir bouger, les sens en alerte mais l'esprit endormi. Terreur, serrant le palpitant qui s'accélère d'angoisse, incapable de penser autrement qu'en inquiétantes litanies, il restait figé en espérant que la nuit ne vienne pas le dévorer. Il restait là, l'oeil ouvert et le corps inerte, incapable du moindre mouvement, incapable de la moindre parole, comme déjà mort n'ayant pour preuve de son existence que le tambourinement de son coeur dans ses tempes.
Badoum. Badoum. Autour il n'y a que les ombres allongées de la nuit, formant des monstres inexistants - il tente de reconnaitre son lit, l'armoire, un meuble et n'y voit que des crocs, des mâchoires, des griffes. Il devine la silhouette de la harpie, du lycan, du vampire. Il tente de se souvenir de quelque chose, de quelques paroles ou des cours pour se prouver qu'il n'avait pas de raison d'avoir peur.
Mais ils s'approchaient pour le dévorer.
Puis plus rien. Le noir intense qui accompagne les ombres devient un brouillard qui lui ôte la vue. Fermé ou ouvert il n'existe plus de différence, se trouvant dans des ténèbres si obscurs qu'il ne sait s'il est en rêve ou en réalité. Il tente de se souvenir comment reprendre son souffle, respirant l'air froid de la nuit avec difficulté. La douleur se fait intense, les pensés plus sévères, le coeur s'arrête à défaut de pouvoir frapper plus vite. Puis le silence. Le silence qui l'entoure où il ne se passe rien - il voudrait entendre la pluie, la vent ou le ronflement du locataire d'à côté. Mais rien simplement. Un sourire qui se forme, les monstres disparus ne pourront plus l'atteindre - il voit rouge, l'hémoglobine éclaboussant à son visage et envahissant ses sens. Un rire, heureux, ravissement terrifiant d'un meurtrier fier de son acte qui lui glace le sang. Familier, trop pour qu'il n'en soit perturbé. Il tente de se souvenir s'il a les yeux ouverts ou fermés - le rouge devient ombre, l'ombre devient terreur. Puis une silhouette - il n'y a qu'eux dans la chambre, et il reprend le contrôle de ses membres pour s'avancer. Se redresse dans les draps qui dévoilent sa presque-nudité, il s'avance pour faire fuir l'intrus. Lui-même s'avance aussi, dans le même mouvement hésitant. D'un geste il tend le bras et saisit sa baguette - Sirius fait de même. Il s'approche, avise la tenue plus qu'étonnante de son adversaire. Il se fige un instant à un mètre de distance, son regard s'habitant à la nuit pour lui permettre de voir plus.
Tires moi. Ordonna-t-il en grognant les mots dans un murmure - la gorge trop sèche pour gueuler, trop serrée pour intimer l'ordre avec violence.
L'autre sourit, lâche un rire qui sonne en écho dans la chambre - Sirius lève sa baguette et tape contre la vitre, la glace résonnant dans la chambre et lui rappelant ce qu'il en est. Reflet. C'est lui, l'inconnu, le rire lui rappelant le sien, la silhouette n'étant autre que la sienne et les mains couvertes de sang - il regarde ses paumes pour les trouver aussi rouges, le liquide chaud y coulant abondamment. Il fixe le reflet, le coeur qui frappe la cadence avec férocité. Il reconnait les cicatrices des combats, les tatouages qui dessinent des souvenirs sur sa peau, les muscles qui disparaissent sous ses poils bruns, ses yeux gris où frappent la tempête. La marque du Seigneur des Ténèbres qui danse sur son bras.
Le monstre c'est toi. - Coup de tonnerre, la tempète qui reprend. La chambre s'illumine de blanc pour le montrer sans artifice. Là, devant le miroir de plein pied, s'observant comme s'il se découvrait pour la première fois. Il a perdu son combat, se retrouvant à jouer le rôle de l'ennemi dans son histoire. Il sert les poings, hurle en silence, frappe le miroir. Et se maudit pour sept années.