momentary masters (neo)

Garçon sérieux, calme presque mutique. Neodymius ne sort pas, ne triche pas, ne ment pas. Bon parti aveugle à ses chances il néglige les bals et ignore les belles, n'embrasse que le travail. Un jeune de sa promotion pour seul ami, la famille s'inquiète en secret et les autres le craignent plus qu'ils ne l'apprécient. Il mettra les voiles tout juste diplômé et Neodymius s'enferme dans l'atelier.
N'en sort que pour dispenser conseils et décrocher (très rares, écorchés) sourires à ses deux petits frangins. ± Dialogues sans émois, ses transports passent par les actes, ses présents alourdis des mots qu'on ne lui arrachera pas. ± Plus vieux, pluvieux, on pourrait les croire amoureux. Elle se tire des griffes d'un prétendant moins arrangeant et lui s'assure une descendance, les époux ajoutent les dernières noises des Nott à l'héritage déjà remarquable. Mariage solide, silence, où nul n'a plus que ce qu'il négociait. ± Bang.
Claque résonne et les tympans souffrent et sifflent et le ciel chute avec les corps. Neo trébuche de la poussée qu'a donnée Evarist - Rhodius tombe et jamais plus ne rira. Neo sombre et jamais plus ne voudra. Ils découvrent surpris que c'est rouge et rose et blanc dedans, ils en ont sur le costume la figure les cheveux et le trottoir des éclats de crâne et des bouchées de viande crue.
Ça leur apprendra.
A jouer aux divins, à menacer les plus faibles, à tricher avec le temps et attaquer les traîtres à leur sang. ± Evarist ne pose pas un œil sur lui quand on descend la carcasse. Ça aurait dû être moi il avait dit et confirme le regard fuyant. ±
Laissé seul à un cœur qui bat trop, palpite de plus de douleur qu'il ne peut en supporter. Une peine sans pareille, sans promesses d'éclaircies, le seul soleil dans la mémoire fragmentée. Il se laisse aller à rêver croire qu'il pourrait le retrouver, ramener Rhodius d'une limbe où personne ne veut de lui. Dans une flambée il le perd encore, genoux dans le labour, coruscant mort dévore leurs rétines et encore les lie.
Il prend ce qu'il a pu ramener, Neo, y tirera le pouvoir de réessayer. ± Battements d'ailes dans la sciure, plumettes liliales secouent l'atelier sans l'égayer. Un temps ses sinistres croassements sont les seules voix qu'il entend. Le corvidé lui a été offert comme une corvée plus qu'un présent, placé entre ses mains par leur prince qu'il croyait perdu. ± Mal ronge. Thériaques, essences de vulpins, alexipharmaques ne font qu'adoucir, rendent le monde et les couleurs quelques heures, jours, années pour certaines. Inexpiable la mort noire veille et arrache son dû, voile les iris et brûle les paupières qu'il faut découvrir, inlassable. ±
Des deux bambins il n'en reconnaît qu'un, d'abord aux rages de ses pleurs criards. Rhodius dont il ne veut pas, veut rien, dont chaque raison est un uppercut dans le marbre des côtes. Tout dans sa naissance est à vomir, et le nom usurpé à pleurer. Lui aussi il les aurait données, ces foutues lettres s'il avait eu un garçon. Les deux pourtant qu'il verra le plus, la fille qu'il chérit et le filleul qu'il subit - les suivants n'apportent pas tant, et lui peine à y perdre du temps. ± D'autres mômes qui suivent, par devoir, jamais par envie. Il les surveille de loin, tente un mot parfois pour les attirer dans ses contrées - ne bataille pas quand ils refusent tout ce qu'il défend. ±
Les ans taciturnes, les ères sans joie à se noyer dans ce qu'il a perdu. Neodymius froide figure, revenant dans sa propre maison où le portrait de son cadet demeure gris absent. Il l'appelle pourtant, de sa voix ou de ses sorts, enferme ses quelques restes ravivés. ± Un mot, deux parfois, pour ces clichés qui traversent sa vie sans que ses iris cataracte ne les fige. Les enfants, leurs braillardes querelles, l'épouse qui offre calme comme Evarist porte tempête. ± Il fréquente pour toute sortie ces salons noirs, où l'on est triste d'être humain, où l'on tord la magie pour une douteuse éternité, débat grandiloquent et presque onanique. Toutes portes ouvertes, par son nom, par son art, par les inclinaisons tyrans qu'il a de tous temps revendiquées. ± Comète anonyme, dans la farandole des faucheuses, dans la guerre qu'ils agitaient secouaient depuis l'époque des littéraires. Pour venger, pour brûler, pour défaire ce nœud dans la trachée et se souvenir comment respirer.  ±
Traître. Pour un tressaut, vil palpitant.
Dans un grand tapage, dans un faste serpentin. Mercymorn est tombée la première - il n'a pas cillé. Nott allait suivre et un mythe dira que l'âme d'un autre s'est éveillée, ses abats secoués pour défendre l'ami. Neo n'a pas réfléchi. Chaque cadavre éloigne le premier - plus soigné, plus discret, toujours justifié. Plusieurs baguettes étaient brandies quand Neo a retrouvé son souffle coupé, deuxième jeunesse embrasée. ± Un éclat infime dans l'œil quand enfin il choisit la vie, ment pour la préserver. A la foire aux couleuvres il s'invente d'autres idéaux, offre son art à leur cause après le lui avoir tant refusé. ±
Il ne s'excuse-ra pas. Le chef reste haut quand il oublie de nier qu'il aurait pu la sauver, qu'elle n'avait pas besoin de les quitter. N'est que la peine dans les cérules assorties pour que son timbre module, que l'acide s'invente une infime douceur qu'il voudrait compatissante. ± Il combat pour ce qu'il ne croit pas, recouvre barbouille les doutes de bonne foi. Assez pour se maintenir sur le fil, échapper aux purges qui suivent armistice : Neodymius se préfère cent fois traître que mort. Les mots collent au corps vapeurs d'essence, offrent refuge tant que les sien.nes ne prennent pas chasse. Iels sont trop occupé.es à fuir l'ire du phénix.