[Narculus] Maybe we have to get a little messed up before we can step up

Lorsque Narcissa avait quitté le manoir ce jour-là, jamais elle n’aurait pu prévoir ce qui allait se dérouler. Même le meilleur médium équipé des meilleurs outils de divination n’aurait pas su le deviner. Ce jour-là, la vie avait décidé de se faire imprévisible et facétieuse. Sortie à l’origine pour s’offrir un petit moment de tranquillité en tête à tête avec elle-même pour pouvoir plus tard profiter d’un instant de qualité en compagnie des nouveaux livres qu’elle aurait déniché au Book Wizz, c’est sur son cousin Regulus qu’elle était tombée. Oh, elle était bien partie avec de quoi garnir les innombrables tablettes de la bibliothèque familiale, mais elle était aussi sortie avec un léger mal de crâne et un petit cœur qui se remettait à peine des montagnes russes émotionnelles qu’il venait de subir.

Avec la guerre et la montée au pouvoir fulgurante du Seigneur des Ténèbres, Regulus et elle s’étaient perdus de vue. Éloignés et bien qu’ayant traversé cette période sombre de manière différente, ils avaient pourtant quelque chose en commun : la survie. Ils s’étaient accrochés, ils avaient serré les dents, ils s’étaient redressés après avoir été contraints de s’incliner. Et fidèles à leur nom de famille, leur orgueil les avait empêché de s’enquérir de l’état physique et mental de l’autre, si bien que les mois et les années passèrent sans qu’un seul hibou ne vole chez l’un ou chez l’autre. Autrement, la confrontation qui eut lieu entre deux rayons de librairie n’auraient jamais eu lieu. L’incompréhension, la peur, la tristesse et la frustration ne se seraient pas accumulées au point de menacer de tout faire sauter. Des reproches, des vérités, une claque, quelques larmes et une étreinte plus tard, la pression avait enfin été relâchée. Le venin qui avait macéré dans des plaies laissées béantes pendant une décennie avait été purgé.

Alors qu’ils sortaient de la boutique les bras chargés de livre, Narcissa avait le sentiment que les blessures du passé pouvaient peut-être avoir un espoir de guérir. Au moins, elles pourraient commencer à lentement se refermer. Alors qu’ils apparaissent au bout de la grande allée menant jusqu’à la somptueuse demeure, la blonde se tient tout près du brun, gardant un œil attentif sur lui. Regulus est excellent pour cacher ses émotions les plus profondes, mais maintenant qu’elle sait ce qu’elle sait, elle parvient à déceler le doute et l’appréhension. Elle ne pouvait pas vraiment le blâmer; elle-même n’était parfois pas sereine lorsqu’elle se baladait toute seule dans les interminables couloirs de la demeure ancestrale des Malefoy, craignant de tomber nez à nez avec un Mangemort égaré.

« Tu te doutes bien que si », répondit-elle à sa question, un petit rire sarcastique lui échappant. « Ne pas me laisser y mettre ma touche aurait été une grave erreur. »

Une parmi tant d’autres, pensa-t-elle en levant les yeux au ciel, soupirant longuement. Comme des timbres, Lucius semblait les collectionner depuis un moment déjà. D’abord en acceptant de suivre aveuglément Voldemort dans sa croisade, puis en acceptant que le manoir devienne son quartier général et, pour couronner le tout, en s’enfermant dans son bureau pendant des heures pour ensuite jouer les maris absents. Non, il valait mieux laisser le sujet « Lucius » de côté pour le moment. Une fois arrivée devant les deux grandes portes principales, elle sortit sa baguette pour les ouvrir.

« Entre, je t’en prie. »

Elle se décala sur le côté pour laisser son cousin et la pile de livres qui flottait derrière lui s’engouffrer à l’intérieur, puis leur emboîta le pas. À peine eut-elle fermé la porte que des petits bruits de pas résonnèrent dans le grand hall. La petite silhouette chétive de son fidèle elfe de maison déboucha du couloir menant aux cuisines, posant ses grands yeux globuleux sur Regulus, puis sur elle, tirant sur la taie d’oreiller qui lui servait d’uniforme.

« Bienvenue à la maison, M-Maîtresse. »

« Merci, Dobby. Peux-tu nous préparer un thé et quelques gâteaux et faire monter le tout à la bibliothèque? »

« T-Tout de suite, Maîtresse. »

Il jeta un dernier regard au Black, puis retourna d’où il était venu. Narcissa fit alors glisser son long manteau de ses épaules, celui-ci s’envolant de lui-même une fois qu’il fut retiré. D’un simple regard, elle invita son cousin à en faire de même. Lorsqu’il mentionna son fils, elle esquissa un petit sourire, comme chaque fois que son prénom était prononcé. Elle hocha la tête, puis s’avança jusqu’au grand escalier central.

« Bien sûr! Suis-moi. »

La décoration du manoir était sombre et juste assez opulente. Les murs étaient drapés de papier peint aux motifs élégants. Des candélabres illuminaient les couloirs, s’allumant et s’éteignant au gré des allées et venues. Et, comme dans toute demeure familiale, de nombreux portraits des différents membres du clan Malefoy – pratiquement tous aussi blonds qu’elle et Lucius – les dévisageaient sur leur passage. Cissy s’arrêta devant une autre paire de grande porte, prenant une poignée dans chacune de ses mains avant de regarder Regulus par-dessus son épaule, une excitation presqu’enfantine dans les yeux.

« Prêt? »

Et elle ouvrit les grandes portes, entrant à l’intérieur pour venir se placer en plein centre, fermant les yeux en prenant une grande inspiration, expirant et relâchant ses épaules en désignant ce qui était indéniablement sa pièce préférée du manoir. C’était celle qui, malgré les autres grands portraits d’ancêtres, reflétait le plus sa touche personnelle. Élégante, mais pas aussi austère que le grand salon qui se trouvait au rez-de-chaussée. Grandiose, mais chaleureuse; les nombreuses plantes et le plaid laissé sur son fauteuil préféré invitant à se perdre dans le monde imaginaire de la littérature. Bien que le temps fût maussade, les grandes fenêtres laissaient entrer beaucoup de lumière et laissaient deviner qu’elles rendaient la pièce encore plus conviviale lors de journées ensoleillées. Quant aux nombreuses étagères, elles étaient remplies des collections accumulées pendant des siècles par les Malefoy, mais également de romans et autres manuscrits dénichés par la Black.

« Alors, qu’en dis-tu? »