[Regudice] Trading yesterday

La dernière fois qu’il est venu à Pré-au-Lard, il est tombé sur Narcissa. Des retrouvailles houleuses qui, au final, ont été plus qu’heureuses. Le brun dépasse cependant l’endroit, ayant un rendez-vous dans quelques minutes. Il n’a pas l’habitude d’être en retard, c’est pourquoi il se fait la promesse de revenir au Book Wizz une fois sa rencontre avec Eurydice terminée ou avant, si elle souhaite également s’y rendre. Une fois qu’il est arrivé à destination, il a presque envie de tourner les talons pour rejoindre la librairie. Pourquoi, par Salazar, Eurydice lui a-t-elle indiqué dans son hibou de la retrouver chez Madame Pieddodu ? C’est un endroit romantique, petit et donc encombrant et agaçant. Regulus n’a jamais apprécié l’endroit, mais souhaitant prendre des nouvelles de l’étudiante, il pousse avec effroi la porte.

Installé à une table près de la porte afin d’avoir l’occasion de sortir rapidement, au besoin, Regulus attend avec un thé chaud. Au moins, le liquide est absolument délicieux. C’est d’ailleurs ce que le Black confirme à la propriétaire lorsqu’elle repasse près de lui quelques instants plus tard; elle le remercie d’un grand sourire.
Cela termine pour le moment son interaction, le laissant observer l’endroit avec les sourcils levés. Est-il déjà venu ici, lorsqu’il était étudiant à Poudlard ? Il en doute fortement. En observant ainsi les alentours, il ne manque pas de voir la porte s’ouvrir une nouvelle fois (la première, après son arrivée, fut pour accueillir un couple mièvre qui lui a aussitôt fait lever les yeux au ciel) pour laisser passer Eurydice. Visage impassible, Regulus ne lui donne aucun signe, attendant simplement qu’elle le rejoigne. Après tout, ils ne sont actuellement que quatre clients au total, elle ne risque pas de se tromper de table, si ?

« As-tu un rendez-vous de prévu après notre rencontre, Eurydice ? C’est la seule explication que je peux voir à ce choix douteux, » l'accueille-t-il avec un ton exaspéré, pour aller de paire avec sa question. Un sourire peint néanmoins un léger coin de sa bouche, preuve qu’il est néanmoins content de revoir la jeune femme. Après tout, il a si brusquement arrêté ses études, cette fameuse nuit où il a fait entrer les Mangemorts dans Poudlard, qu’il n’a pas pu dire au revoir à personne. L’Ordre lui a laissé la vie et le bénéfice du doute, mais l’a gardé prisonnier. Une part de lui est nostalgique à l’idée de ne pas avoir pu terminer l’école avec ses amis, ayant trouvé, malgré tout, une certaine paix parmi les murs du château.

« Ça fait longtemps, » ajoute-t-il ensuite, une manière détournée de dire qu’il est content de la voir. Regulus n’est pas du genre à s’épancher, très peu doué en la matière et, mine de rien, Eurydice et lui viennent du même monde. Cela signifie qu’il a toujours dû garder une certaine distance entre elle et lui, juste au cas. Il a cependant vu qu’il est possible de discuter et même argumenter avec la verte et argent, ce que Regulus a trouvé intéressant. Idéologie puriste, peut-être, mais une forme d’ouverture tout de même. Ça ne peut que le rendre davantage curieux quant au déroulement de leur réunion.

 
Il y avait bien peu de personnes en ce monde qui pouvaient se targuer de me manquer. Ou du moins, de me le faire croire. En ayant eu un impact sur mon existence, malgré eux. Et ces mêmes personnes, elles faisaient toutes partie des Serpentard eux-mêmes. Cette Maison idéale, dans laquelle le Choixpeau n'avait pas hésité une seule seconde à m'envoyer. De toute manière, je ne me voyais nulle part. Et, je m'y sentais alors parfaitement à ma place, même si quelques-unes au sein de cette maisonnée parfaite étaient vacantes.
Orthos. Barty et Regulus.

Regulus Black, le cadet de la famille Black. Celui pour lequel, j'avais développé un affect assez singulier. Et, un attachement plus que certain. L'ancien Vert et Argent, auquel, je n'avais pas pu faire l'ombre d'un adieu parce qu'il avait tout simplement disparu. Évaporé lors de sa dernière année, ce qui m'avait déplu. Parce que je n'avais pas pu énoncer quelques mots maladroits que j'aurais pu lui dire. Et, je ne me voyais peut-être pas les lui souffler dans le Château séculaire ?
Pour sûr que ce n'était pas ce quelque chose de mièvre qui avait coutume de rendre les cœurs moins vigilants et bien plus malléables, que je lui avouerais.

Néanmoins, parce que le manque de sa présence s'était une fois de plus manifesté, j'avais décidé de lui envoyer une missive. Sachant, -je l'espérais tout de même-, qu'il y répondrait de manière positive. Ayant eu tout de même cette idée de nous faire nous revoir dans le salon de thé de Madame Pieddodu. Endroit pourtant réputé, dans lequel, je n'avais jamais osé mettre les pieds. Peut-être, était-ce un léger clin d'œil cocasse au Destin que je lui faisais ? En ayant opté pour cet endroit qui respirait les sentiments doucereux au possible ? Probablement.
Mais, tant qu'il m'y rejoignait ... cela était sensiblement parfait.

Le mieux, serait qu'il soit le premier à s'y être installé, dans cet endroit plus qu'exigu qui ne recevait dès lors que peu de clientèle. Non pas que je n'aimais pas être la première sur un lieu de rendez-vous, mais savoir que l'autre m'attendait quelque part avait ce quelque chose de grisant que je ne saurais expliquer. Et si en plus, cela était du fait de Regulus Arcturus Black, pourquoi m'en priver ?

J'avais alors revêtu une longue robe noire allant jusqu'au-dessus de mes genoux, ainsi que des collants et des hauts talons de cette même couleur. La seule nuance quelque peu vive, fut cette cape émeraude qui finit mon habillement ainsi qu'un sac à main de cette même teinte corindon. Un dernier regard noisette destiné à mes longues mèches rousses, pour les remettre quelque peu en mouvement, et je transplanais.
N'occultant aucunement ce sourire présent sur mes lèvres pleines, quand je vis qu'il était bel et bien présent. Assis devant une tasse de thé, qu'il buvait déjà, en m'attendant.

Retirant de ce fait ma cape pour la poser sur le dossier de la chaise ainsi que la anse de mon sac à main, j'écoutais mon interlocuteur. Ou plutôt, je ressentais sa réserve courroucée à mon encontre. En ce qui me concernait, je lui souriais. Tout en haussant mes épaules avec un air mutin, qui faisait lui aussi froncer mon joli nez parsemé d'éphélides.

- À ce que je vois, tu n'as aucunement perdu de ton venin, Regulus. Lui, il était appelé par son prénom. Alors que pour les autres, je conservais toujours une forme de distance. C'était mieux. Et cela était inhérent au fait qu'Emrys Gaunt, me l'avait toujours démontré. ... pour reprendre tes dires, cela fait même trop longtemps Regulus.

Un silence, qui avait toute son importance :

- Comment te portes-tu ? C'était bien de cela dont il s'agissait, non ? Avant de commander n'importe quelle boisson. Mon vis-à-vis, avait mon attention. Pleine et entière, ce faisant.

S'émanciper du joug autoritaire de ses parents à amener Regulus à changer. Notamment, la prestance parfaite jusqu’au moindre détail de son apparence n’a plus sa place. Il se plaît à trouver son style, un mélange de classe et de rock, plus moldu que sorcier. Moins encombrant, les vêtements moldus sont un vrai charme qui vont avec la grâce naturelle du brun. Lorsqu’il se sent sobre, comme aujourd’hui, il opte pour un pantalon noir, s’arrêtant sous ses hanches. Un pull vert serpent, foncé, couvre ses bras et meurt au début de sa nuque et sur sa pomme d’adam. Avec la douce température extérieure, ce fut assez pour qu’il ne s'embarrasse pas d’une cape ou d’un manteau. C’est probablement une des rares dernières journées d’automne qui pourra se targuer d’être si douce, d’ailleurs.

Malgré cela, c’est un bouillant thé que Regulus réclame devant lui. À sa commande, la température ne change jamais rien; même en été, un thé est la seule chose qui parvient à réchauffer son âme… s’il en possède une, naturellement. Laissant les effluves frapper son visage, il attend, boit, contemple d’un œil critique, jusqu’à ce que la belle Eurydice traverse finalement la porte. Elle s’est fait attendre ou peut-être qu’il est arrivé lui-même trop tôt à cette rencontre improvisée. Tournant en rond chez lui, au milieu de livres et d’un Arcturus épuisé d’avoir trop couru dans l’appartement toute la nuit (le plaisir d’une vie de chaton), Regulus a préféré se présenter plus tôt que de faire comme si.

« À ce que je vois, tu n'as aucunement perdu de ton venin, Regulus. » À la remarque, sa bouche s’étire un peu plus encore, dévoilant une expression qu’Eurydice n’est pas inconnue, chez lui : l’arrogance. « À ce que je vois, mon venin n’est rien comparé à ton sens de l’observation, » réplique-t-il, ton placide, lueur cependant amusée au fond du regard. Répartie qui s’extirpe facilement et, déjà, il a l’impression d’être retourné à Poudlard. L’impression le réchauffe, la confirmation que ces retrouvailles ne seront pas une perte de temps, bien au contraire.
« ... pour reprendre tes dires, cela fait même trop longtemps Regulus. » A-t-elle perçue la dernière année comme un supplice, comme lui ? Il en doute, mais ça ne le laisse pas indifférent de voir qu’outre ses trois meilleurs amis, d’autres ont manqué sa présence entre les murs du château. Ce n’est pas clairement énoncé, mais pourquoi Eurydice l’aurait-elle invité, si ce n’est parce qu’elle a pensé à lui et à désiré le voir ?

« Comment te portes-tu ? » Voilà donc une question difficile à répondre. Par quoi commencer ? Le banal mensonge, l’échange ennuyant habituel si souvent servi sur un plateau d’argent, dans le monde des puristes ? Ou bien oserait-il changer la donne, corser un peu cette conversation pour brandir la vérité devant le visage de porcelaine de la Gaunt ? « Dis-moi plutôt, Eurydice, » commence-t-il plutôt, poussant son thé sur le côté. Il croise sur la table ses coudes, appuyant son menton sur ses mains jointes dessous, « si tu te sens d’attaque pour sortir des banalités puristes pour un brin de controverse ? Car elle teinte chaque parcelle de mon existence depuis plusieurs mois, et joue beaucoup sur comment je me porte. » Sans tourner autour du pot plus que cela, droit au but pour une expérience plus agréable. Une autre chose qu’il perd de plus en plus suite à son émancipation : son désir de perdre du temps à coudre de la dentelle autour de ses paroles. Il garde son regard argenté fixé sur le sien, curieux de voir s’y dessiner une quelconque émotion.
Regulus ne croit pas se tromper sur elle, se doutant qu’elle préfèrera les faits. Il ne voit pas de mal à les lui fournir, sa curiosité le forçant à vouloir voir comment elle prendra ses gestes, durant la guerre. Il a été contre tous ses principes, ceux forgés dans ses veines par sa famille. Il sait que les Gaunt ont des esprits similaires à ceux des Black, mais il a toujours trouvé plaisir à discuter des sujets controversés avec Eurydice, car si elle est puriste, elle n’hésite pas à tendre l’oreille pour entendre autre chose.

 
S'armer d'une telle patience afin de revoir un fantôme de mon passé, est ce quelque chose de novateur que je ne me connaissais pas. Parce que j'aurais pu bien évidemment contacter le cadet des Black bien plus tôt. Si tant est que son manque était bien réel. Parce que son absence, je l'avais vécue comme une forme silencieuse de trahison ou d'abandon. Alors que nous n'étions fondamentalement que des Serpentard. Certes, assez proches mais nullement de la même teneur que ce que Regulus partageait de ce fait, avec Barty.
Mais, il n'empêchait que j'avais éprouvé une sensation disgracieuse de perte. Qu'on m'avait ôté une partie de ce qui me composait.

Sans que je ne me l'explique réellement. Ni même sans que je ne puisse mettre une vérité par-dessus. Toutefois, je m'armais souvent d'une forme de réflexion stratège pour parvenir à mes fins, mais ici ... force était de constater que j'y avais préféré l'action. Tout en ne sachant pas quel mot employer face à l'ancien Roi des Serpents. Alors que désormais, je me retrouvais avec le bien moins enviable, Roi des Rats. Cet imbécile de Yaxley, qui n'avait aucunement la prestance de mon interlocuteur.
Il était beau, le petit frère Black. Et, il serait bien idiot de le nier.

En plus d'un minois des plus charmants, j'avais été toujours subjuguée par sa verve emplie de venin, comme je ne m'étais pas gênée de le stipuler à nouveau, en entame de cette discussion. J'avais de ce fait aussi adoré, les quelques joutes verbales et les argumentaires qu'il m'avait toujours octroyé concernant d'autres paradigmes que ceux inhérents aux Sang-Purs. Curieuse, je l'avais dès lors écouté. Même si je ne mettais pas à profit, ces singuliers préceptes.
Et ici, après cette introduction, j'avais ce sentiment de nostalgie. De retour en arrière. Comme si nous étions dans la Salle Commune des Serpentard à converser sur quelques sujets à la fois triviaux et ô combien plaisants.

- Serais-tu en train de me flatter ? Le questionnais-je en retour, avec un petit rire flûté. Bien que je voulais savoir comment il allait. Qu'est-ce qui pouvait se tramer sous les soyeuses boucles brunes et dans ces iris argentés si perturbants ? Je n'en savais encore rien mais mon ancien acolyte avait toujours enveloppé son être d'un voile de mystère.

Peut-être, était-ce en partie à cause de cet état de fait, que je me retrouvais ici, assise en face de lui. À me plonger dans une mélancolie propre à ce que j'éprouvais à Poudlard, étant donné qu'il n'était pas là ? Je préférais ne pas me laisser aller à ces bien sordides considérations, savourant plutôt la présence de celui qui avait une lumière stellaire en son sein, bien plus brillante que son aîné.
Après tout, Regulus était un petit roi, c'était bien connu.

- Hum ? J'optais pour une position en miroir de la sienne, croisant mes jambes avec une élégance innée, néanmoins. ... avec ce que tu viens de me dire, crois-tu que je veuille seulement explorer cela en surface ? Un silence. Je crois qu'à force tu me connais Regulus. Je veux des faits. Un sourire cette fois-ci, alors que je passais commande à mon tour. Un thé blanc à la douce saveur de baies rouges. ... mais, je me disais que c'était faire preuve de politesse que de te demander, comment tu pouvais aller, très cher.

Accepter d'avouer qu'il me manquait, m'était quelque peu ennuyant. Mais, c'était un aveu bien moindre de celui que je comptais lui faire. Et qui était à la lisière de mes lèvres pleines. Néanmoins, je devais trouver l'instant adéquat pour me révéler à ce propos. Et ce ne sera nullement entre deux tasses de thé encore fumantes.
Pour ce faire, la mienne venait de m'être servie et je la portais à mes labiales. Tout en fixant de mon regard noisette, et ce sans ciller, mon vis-à-vis.

- ... Poudlard n'est plus pareil sans toi. Surtout en ce qui concerne, les Vert et Argent. Une gorgée de mon breuvage. Tu m'as manqué. J'étais connue pour ne pas m'embarasser de fioritures. Car le temps était toujours compté. Et encore ici, cela ne faisait pas exception.