Le ciel s’étirait au-dessus d’Anastasiya comme une toile infinie, un abîme d’encre constellé de minuscules éclats d’argent. Les ailes massives de Sigrid fendaient l’air avec une grâce inouïe, produisant un bruissement continu, presque rassurant, perturbant à peine la sérénité aérienne. Nastia se tenait fermement sur le dos de la dragonne, créature imposante aux écailles luisantes d’un argent métallique, comme tissées de lune. L’air glacé fouettait son visage, faisant danser ses cheveux avec une sauvagerie indomptable, comme un rappel de sa propre nature. Chaque battement d’aile soulevait une légère brise, alors qu’elle savourait chaque instant de ce vol. Elle se sentait invincible, libre, arrachée aux contraintes terrestres, perchée au-dessus de l’immensité insondable du monde.
Le silence des cieux était sacré, une promesse d’évasion, une parenthèse arrachée au tumulte quotidien de Poudlard. Au loin, l’immense silhouette du château s’élevait, ses tours gothiques baignées par la lueur vacillante des étoiles, son reflet à peine visible dans les eaux noires du lac. C’était un paysage familier à Anastasiya, mais ce soir, tout lui paraissait un peu plus mystérieux, un peu plus inconnu. Presque irréel, comme une forteresse de légende perdue au milieu d’un rêve. La profondeur du Lac noir, en contrebas, l’attirait inexplicablement. Comme si les ténèbres insondables de ses eaux étaient un miroir de son propre esprit, plein de pensées non formulées et de désirs secrets.
Elle murmura à sa sublime qu’elle pouvait entamer sa descente, elle était empreinte de cette assurance qui la caractérisait tant en cette présence. La dragonne obéit sans un son, amorçant une lente chute vers le sol, ses ailes se déployant en de larges arcs pour freiner leur course. Mais alors qu’elles entamaient la dernière phase de leur descente, quelque chose changea, soudainement. Nastia le ressentit avant même de l’entendre. Sous elle, les muscles de Sigrid se tendirent, un frisson imperceptible traversa l’épiderme puissant du dragon. La tension du corps de Sigrid devint palpable, comme un arc tendu trop fort, sur le point de rompre. Ses ailes se figèrent dans un étrange battement, puis le grondement sourd s’échappa de sa gorge, rauque, profond, empli d’une angoisse brute et instinctive.
Le serpent bien qu’interpellait par cette brutalité, fronçait déjà les sourcils. Elle glissa sa main sur le cou écailleux de sa belle, cherchant à calmer la créature, mais la tension s’était déjà installée. Le grondement devint un rugissement sauvage, qui éclata dans l’air comme un tonnerre animal, résonnant contre les falaises invisibles du lac et brisant l’harmonie silencieuse de la nuit. Sigrid battait des ailes de plus en plus violemment, ses mouvements devenaient chaotiques, et l’air autour d’elles s’emplit soudain d’une angoisse palpable, presque suffocante. La surprise foudroya Anastasiya. Avant qu’elle ne puisse réagir, elle sentit ses doigts glisser sur les écailles de son âme-sœur. Ses mains cherchaient désespérément une prise, mais trop tard. Dans un instant de déséquilibre total, elle fut arrachée à sa prise et elle chuta dans l’obsolescence programmée du tréfonds du néant.
Le monde se figea. Nastia bascula en arrière, ses bras s’agitant dans le vide, son cœur battant à une vitesse incontrôlable, comme pour compenser la vitesse de la chute. Le temps sembla s’étirer en une éternité suspendue, où chaque seconde paraissait durer une vie entière. Elle voyait le ciel, vaste et indifférent, tandis que la terre se rapprochait dangereusement sous elle. Ses pensées s’embrouillaient, trop rapides, trop confuses. bouse d'hippogriffe… Puis l’impact. Brutal, sec, implacable. Anastasiya s’écrasa littéralement au sol, le ventre contre la terre froide, son souffle coupé comme une lame tranchante. Le choc l’immobilisa, ses poumons refusant de se remplir d’air, et elle resta là, prostrée, à moitié étouffée par la violence de la chute. Un cri sourd résonna dans sa tête, mais aucun son ne franchit ses lèvres. Le monde autour d’elle paraissait lointain, comme plongé dans un brouillard de tourment.
Après de longues secondes – ou peut-être des minutes ? – le souffle finit par revenir. Douleur après douleur, inspiration après inspiration. Nastia se redressa lentement, les muscles engourdis par l’impact. Ses côtes lui faisaient mal, et elle pouvait sentir une légère brûlure sur sa joue, éraflée par la chute.
« хорошее горе !Bon sang… » souffla-t-elle enfin, dans un murmure empreint de frustration et d’amusement. La sensation de l’adrénaline quittant son corps la laissait engourdie, et un léger rire, presque désespéré, s’échappa de ses lèvres. Quelle manière théâtrale de conclure une nuit de vol, songea-t-elle, la douleur palpitant encore dans tout son corps. Autant, elle était douée pour voler, mais alors pour le reste ce n’était pas encore ça.
L’expérience est une lanterne que l’on porte sur le dos et qui n’éclaire jamais que le chemin parcouru. Semblerait-il que la jeune Karkaroff avait encore beaucoup d’obstacles à franchir…
Sigrid continuait de s’agiter et son humaine ne comprenait pas sa détresse. Elle était perdue. La dragonne battait des ailes frénétiquement, ses yeux reptiliens fixant quelque chose dans la nuit. Son grondement se fit plus intense, comme une mise en garde, une alarme instinctive face à une menace invisible. Nastia, la respiration toujours saccadée, se releva tant bien que mal, cherchant à comprendre ce qu’il se passait. Mais la nervosité de Sigrid ne se dissipait pas. Il devait y avoir une raison, et Anastasiya restait sur ses gardes. L’une d’elles était plus éclairée que l’autre.
« Что вас так взволновало?Qu’est-ce qui t’affole autant ? » demanda-t-elle en scrutant l’obscurité autour d’elle. Il était difficile de discerner quoi que ce soit dans la pénombre, le paysage nocturne se fondant en une masse indistincte. Seule la silhouette du lac s’étendait, sombre et paisible, à quelques pas de là. Pourtant, une étrange sensation de malaise envahissait l’air, comme si quelque chose, tapi dans les ombres, les observait silencieusement.
Anastasiya, dans sa pire idée, s’éloigna légèrement de Sigrid, ses yeux cherchant à percer la noirceur environnante. Tout était calme… trop calme. La nuit enveloppante ne lui offrait que des ombres. Chaque bruissement de feuille, chaque craquement de branches semblait amplifié par le silence oppressant de la pénombre. La jeune sorcière avança prudemment, les sens en alerte, alors qu’elle hurlait intérieurement à son cœur de la fermer. Un léger vent se mit à souffler, faisant frissonner à la surface du lac, et dans le même instant un bruit indistinct parvint à ses oreilles. Un bruissement, léger mais distinct, venant de quelque part tout proche.
Un frisson parcourut son échine. Nastia, tendue, accéléra légèrement le pas, s’efforçant à ne pas chavirer dans la peur de l’obscurité installée. Mais plus elle avançait, plus la nuit semblait se resserrer autour d’elle, comme une chape de ténèbres. Sa respiration se fit plus courte, plus arquée, et son esprit commença à s’emballer, transformant chaque ombre, chaque mouvement en une potentielle future détonation. Le monde semblait figé, suspendu entre deux battements de cœur, et seule l’agitation de Sigrid rompait cette immobilité. Nastia, encore sonnée, son regard s’éveilla de nouveau perçant les ombres qui semblaient danser autour du lac. Elle n’était plus seule. Un frisson glacé remonta le long de son échine lorsqu’elle aperçut, à une dizaine de mètres, deux prunelles brûlant dans la pénombre. Elles étaient là, immobiles, braquées sur elle comme des flammèches dans la noirceur ambiante. Leur éclat froid et intense transperçait la nuit, et Nastia sentit un poids indéfinissable se poser sur ses épaules, une menace tapie, prête à frapper.
Le silence était assourdissant, seul le battement précipité de son souffle résonnait dans ses oreilles. Un bruit imperceptible, comme un souffle bref, s’échappa des ténèbres. La créature était là, juste devant elle, dissimulée derrière l’opacité de la nuit, et pourtant sa présence était oppressante, palpable. Anastasiya se raidit, et ses doigts, crispés autour de sa baguette, frémirent légèrement. Au moment où elle s’apprêtait à lever sa baguette, prête à faire face, elle trébucha. Son pied s’emmêla dans une racine, et elle chercha désespérément à se rattraper à une branche à portée de main. Mais celle-ci céda sous son poids avec un craquement sinistre –il était peut-être temps pour elle d’abuser un peu moins des desserts et de se mettre à courir avec la belle
@Thalia Flint, et Nastia fut projetée en avant, sa tête heurtant violemment un tronc d’arbre.
La douleur qui la percuta de nouveau fut fulgurante, éclatant dans son crâne comme une onde de choc. Elle vacilla, une main portée à son front douloureux, le souffle court. Un gémissement de frustration s’échappa de ses lèvres, tandis qu’elle se redressait lentement, tâtonnant autour d’elle. Sigrid toujours en proie à l’agitation, ne cessait de grogner derrière elle. Nastia, massant doucement sa tempe endolorie, ferma les yeux un instant cherchant à reprendre ses esprits. Quelque chose, dans cette nuit, ne tournait pas rond. Mais quoi ? Dans un élan intense, Sigrid se rua vers elle, fendant les airs avec une force inouïe, ses ailes claquant dans la nuit. Nastia, à terre, vit les immenses crocs de la dragonne s’approcher dangereusement de sa jambe. Un instant, elle crut que sa propre dragonne, dans sa frénésie protectrice, allait la happer, mais Sigrid, d’une précision quasi-chirurgicale, s’arrêta à quelques millimètres de sa peau. Mama. Nastia sentit l’effleurement glacial de ses dents contre sa cheville, un contact aussi subtil qu’effrayant. Un nouveau rugissement puissant éclata, résonnant dans la vallée, et Sigrid balaya l’air de sa patte, projetant violemment au loin la créature qui les guettait dans l’ombre. Toujours à soulager son souffle, Nastia roula sur le dos, observant la scène avec un mélange d’effroi et de fascination. Sigrid s’élança plus loin dans l’obscurité, traquant l’ombre qui avait osé menacer son humaine. Le dragon disparut momentanément dans la nuit, et le bruissement de ses ailes sembla s’éloigner avec elle. Pendant un court instant, Anastasiya resta là, prostrée, étourdie par les événements, sa main cherchant fébrilement sa baguette, son esprit embrouillé par l’adrénaline.
La menace semblait s’être dissipée, comme si la force même de Sigrid avait suffi à faire fuir la créature. La jeune Karkaroff se redressa lentement, portant une main à sa tempe encore douloureuse. Elle tituba légèrement, sa vision floue, mais bien présente, les étoiles tourbillonnant anormalement au-dessus des cieux. Magnifique vision.
« Par toutes les forces du ciel… » murmura-t-elle en essuyant une mèche de cheveux collée à son front, encore secouée par l’intensité. Sauf que la paix ne dura pas. Un nouveau bruit, plus proche cette fois, s’éleva dans l’air. Nastia sentit ses muscles se raidir. Son cœur tambourinait dans sa poitrine, comme un écho sourd dans la nuit profonde. Elle se redressa, vacillante sur ses jambes encore engourdies par sa chute, tentant de chasser ses doutes. C’en était trop pour cette nuit. Sans réfléchir, Nastia tourna brusquement sur elle-même, dans un geste rapide et presque désespéré, elle pointa sa baguette dans la direction du bruit.
« Stupefix ! » Le sortilège fusa dans la nuit, illuminant brièvement l’obscurité d’une lumière rougeâtre. Il filait droit, tranchant l’air avec une intensité fébrile, frappant violemment quelque chose…