Rédemption - Peter

Les pensées, flot incessants qui te tambourine le crâne, tous les jours, toutes les nuits, à chaque heure qui passe. Allongé dans ton lit, dans ton appartement se situant au-dessus de ta boutique, tu penses. C’est ce que tu fais, depuis des mois. Tu ne fais que ça. Penser, penser, penser. Tu vas réussir à ouvrir cette boutique de botanique à Pré-Au-Lard. Elle n’a pas encore son écriteau, il devrait arriver demain. Enfin tout à l’heure, quand tu jettes un œil à l’horloge. Tu n’as pas encore de clientèle, il faut avouer que tu as ouvert il y a peu aussi. Tu passes la journée à t’occuper de tes plantes et les soirs à tenter de faire taire ton cerveau. Tu as essayé bien des façons de le faire taire, mais il est bruyant, veut se faire entendre. « Pourquoi tu as fait Peter ? T’as trahi tes amis pour un deuil ? Il est où le courage et la bravoure des Gryffondor ? Et tes amis, tes frères, ils sont où maintenant ? Ta famille serait fière tu penses ? Après tout vous êtes des sang-pur, mais de quel côté sont-ils ?» Tu te tapes le crâne, voulant que ça se finisse, voulant juste dormir. Une heure de répit, tu n’en demandes pas plus, pas moins. Dans ton petit appartement, il y a bien des choses qui te rappelle ta vie d’avant, ta vie à Poudlard quand tout était simple, quand tout était beau, lumineux.

Cette photo de vous quatre dont tu n’as jamais pu te séparer, trône sur ta table de nuit, toujours à tes côtés. Vous riez, vous êtes heureux. Heureux d’être ensemble, heureux d’être amis, liés comme aucun groupe avant. Tellement liés que vous avez fini par devenir des Animagus pour soutenir Remus, pour l’aider quand les pleines lunes étaient trop violentes, trop brutes. Un processus long, compliqué, où il vous a fallu être patients. Mais vous l’avez fait, par amitié, par amour pour lui, par solidarité. Tout aurait dû être comme ça, tout aurait dû reste comme ça. Vous auriez dû rester amis, pour la vie. C’était la promesse faite dans la salle des Maraudeurs à de nombreuses reprises. Maintenant, ce ne sont que des paroles qui tournent encore et encore dans ta tête, te rappelant toutes les erreurs que tu as faites.

La première a été de ne pas savoir gérer tes émotions, de ne pas savoir gérer le deuil. La perte de Rhaegar a été comme un coup de poignard, ou plutôt comme des coups de poignards qui n’ont jamais cessé. Tu n’as jamais su faire taire la douleur entrainée par sa perte, tu n’as jamais su passer au-dessus. Tu ne peux pas l’oublier, comment le pourrais-tu ? Il était tout pour toi, il était ton soleil, ta lune, il était l’amour de ta vie. Jamais tu n’aimeras comme tu l’as aimé, et jamais tu ne seras aimé comme tu l’as aimé. Une larme coule sur ta joue. Il n’est plus là désormais, tu ne verras plus son sourire, ses cheveux blonds emmêlés au petit matin, tu n’entendras plus sa voix, ni même son rire qui te donnait envie de l’embrasser encore et encore.

La seconde erreur a été de prononcer ce sort impardonnable, ce sortilège de la mort pour venger Rhaegar. Ils avaient causé sa mort, ils devaient mourir. Aveuglé par le chagrin, par la douleur de sa perte, tu n’as su faire que ça, te tournant vers la magie noire. Tu as tué pour lui, ces deux morts qui te restent dans la cervelle, qui te hante. Tu ne l’as jamais avoué à personne, ce que tu avais fait ce soir-là. Ça, c’était le début de ta descente aux Enfers.

La troisième a été de faire confiance à Evan Rosier et à Allegra Greengrass. Ô bien sûr qu’ils disaient vouloir ton bien, des promesses de vengeance prononcées. La vengeance, c’est tout ce qui t’animait, tout ce qui te faisait vivre et te lever chaque matin. Mais se venger de qui ? Du monde entier ? Des moldus ? Qu’importe, du moment que n’importe qui payait pour ta perte, du moment que d’autres souffraient, du moment que tu pouvais éteindre ta tristesse. Tu bossais pour eux, pour les mangemorts.

La quatrième a été de te battre contre James, ton propre ami. Il t’a trouvé, un soir, à menacer quelqu’un au nom des mangemorts. Rosier et Mulciber, ces noms sont connus de tous. Un combat où tu as failli le tuer. Mais comment aurais-tu pu ? Même dans la noirceur de ton âme, trois étincelles de lumière brillaient intensément. Et il en faisait partie.

Puis tu as disparu de la circulation, décidant de te terrer pendant presqu’un an. Tu avais ce projet de boutique de botanique à ouvrir et pendant un an, ça a occupé tes pensées. Tu n’as pas fait ton deuil, tu ne le feras peut-être jamais en réalité. Mais la boutique va ouvrir et aujourd’hui elle aura enfin son enseigne. Son enseigne jaune et noir. La dernière chose qu’il te manquait pour l’ouvrir. Le soleil commence à se lever, balayant les dernières ombres de la nuit. Alors tu te lèves, en soupirant. Encore une nuit passée sans sommeil. Mais tu préfères, sans sommeil il n’y a pas de cauchemars.

Ton enseigne arrive enfin, tu signes et tu l’installes d’un coup de baguette. Tu te recules pour admirer ta boutique, un sourire aux lèvres. Rhae’s est officiellement ouverte.

Tu marches dans Londres, souhaitant acheter deux trois choses pour ta boutique, des pots déjà achetés entre les mains. Tu espères ne croiser personne, surtout ne pas les croiser eux. Tu tournes dans une grande rue, avec beaucoup de monde. En même temps, la rentrée approche et le chemin de Traverse se remplit. Soudainement, tu te stoppes net, les yeux écarquillés, tu fais tomber tes pots qui s’explosent dans un brouhaha pas possible. Tu restes figé, de marbre. Là, devant toi, qui vient de se perdre dans la foule, tu en es sûr, tu es sûr que c’est lui. Ou alors c’est la fatigue qui te joue des tours. Des hallucinations. La drogue de la veille. Rhaegar.