le lionceau A ce moment-là elle est morte. Elle portait le deuil noir sur sa robe en mousseline, affinant les traits de son corps parfait - sur son visage un fin voile pour cacher les larmes qui coulent, qu'elle refuse au monde pour ne pas avoir à répondre aux questions et aux moqueries. Elle le sait - les émotions sont moquées, elles sont la trace de la faiblesse des humains portés devant le reste du monde. Sa mère lui a apprit à n'en rien dire, à ravaler les sentiments pour qu'ils n'explosent jamais - mais devant la tombe enflammée de sa mère, elle ne peut pas s'en empêcher. Enfant abandonnée par l'existence, jeune encore, assez pour être mère à son tour, pas assez pour enterrer la sienne. L'injustice qui dépeint ses traits terni aussi son visage - c'est qu'être mère est un rêve qu'elle ne pourra plus atteindre désormais.
En revenant le soir, elle ouvre la porte du sanctuaire, de ce lieu caché du monde où se retrouve les divines créatures qui forment la Confrérie de Morgane. Elle plonge vers le trône des lions, s'y assoit comme tant de chefs l'avaient fait avant elle, et sort de la poche de son manteau long, la fiole aux couleurs violines. Elle ravale ses larmes, cette fois, visage parfaitement impassible, alors qu'ouvrant la fiole l'odeur nauséabonde vient lui arracher une grimace. Elle boit, rapidement, essayant de ne pas trop y penser - puis vient la douleur qui la tord pour une heure au moins. Chez elle, son mari l'attend, pour une étreinte qu'elle ne veut pas lui refuser - cette nuit, elle se laisse aller à fêter l'existence le plus fort possible. Elle l'aime, cet homme, cet homme et cette vie qu'ils se forgent dans les promesses de puissance. C'est trois mois plus tard que le miracle est dévoilé, qu'après une nausée violente, elle laisse sa collègue l'entrainer
juste pour voir à Sainte-Mangouste pour être sûre. Et c'est là :
Vous êtes enceinte que clame le miracle alors que la possible infertile elle l'a bu - après tout, c'est le fardeau porté par tous les chefs du signe du lion.
le cheval Les hurlements autour du stade résonnait jusqu'au château. Elle se laissait bercer par les cris, les chants, les crépitements des sortilèges au-dessus de leurs têtes. La final de la coupe de Quidditch de l'école était toujours un évènement fantastique - mais pour sa dernière année, elle avait la chance d'être sur le terrain. Tenant son Nimbus 18 dans la main, elle inspira profondément, se concentrant sur le bois qui chauffait dans sa main, sur la vibration de cette magie qui l'appelait, sur ce désir qu'elle ressentait à être dans les airs et à virevolter autour du souaffle et de ses camarades. En face, les aigles sifflaient et soufflaient fortement. Elle les ignora, fermant les yeux pour se concentrer sur l'instant présent.
Elle était certaine de l'emporter - elle ne doutait pas de ses capacités, et c'est sans doute pour cela qu'elle était parmi les meilleures unes fois sur un balais. Elle jouait au Quidditch depuis longtemps - c'était une habitude dans la famille, d'avoir un amour certain pour ce sport, pour la célébrité, pour la réussite. Elle prenait à bras le corps le challenge et elle monta sur son balais. Dans les tribunes, le silence dura une demi-seconde avant que ne soit hurlés les surnoms de chacun. Puis dans la foule, des figures magiques s'ébrouèrent pour courir autour du stade : un lion, un aigle, un serpent et un cheval. Eblouie par la beauté du sortilège, elle le regarda qui allait et venait - il vint autour d'elle avant d'aller exploser dans les airs en million d'étoiles. Et elle se sentit bien.
Elle l'emporta, cette fois encore, avant d'échanger quelques mots avec l'entraineuse d'une équipe professionnelle. Elle les rejoignit pour quelques années - avant de continuer à s'élever, à toujours vouloir plus, à toujours espérer aller plus haut. Pour un jour, toucher les étoiles.
la lionne C'était rarement arrivé, qu'elle sente l'angoisse lui étreindre la gorge et lui ôter toute parole ingénieuse. Elle savait que ce moment était important - personne ne saurait en douter, alors qu'habillée de sa robe blanche, elle s'apprêtait à remonter l'allée du temple pour rejoindre son désormais mari. La dernière fois qu'elle était restée aussi longtemps à fixer son reflet, elle avait onze ans. Elle se souvenait parfaitement de cette soirée, portant sur ses lèvres un sourire attendri pour l'enfant qu'elle avait été. Grandissant dans la demeure familiale des Greengrass, éloignée du monde, elle y avait appris les lettres, les mathématiques, l'histoire, l'équitation et l'histoire de la magie. Quelques sortilèges qu'elle avait depuis perfectionné, et à voler sur un balais - la seule folie qu'elle s'était permise en tant qu'héritière. Elle s'était surtout préparée à ce moment, celui où - enfin - elle serait intronisée dans le grand monde. C'était une tradition, pour les membres de sa famille. Les enfants étaient présentés au monde, le jour où ils recevaient leurs lettres pour Poudlard - ainsi ils pouvaient apprendre à être des grands de ce monde, sans subir les défauts du reste du monde.
Là encore, elle s'apprêtait à faire un saut dans le grand monde. Elle n'était plus aussi novice en la matière - elle avait grandit, elle était diplômée de l'école de magie Poudlard, et elle était une athlète de haut vol. Elle allait épouser Bartholomew Mulciber et elle s'en sentait chanceuse. L'amour entre eux était une évidence, comme lorsqu'on se retrouvait face à une âme jumelle - elle l'aimait, ne pouvait le nier, mais ne saurait dire si elle en était amoureuse. C'était si étrange comme sentiment, et à la fois ce n'était guère important. Leurs familles étaient puissantes et espéraient cette union depuis longtemps. Elle ne serait personne pour la leur refuser et Barth était un ami - au moins elle avait cette certitude qu'ils se respecteraient.
Une fois au bout de l'allée, face à l'ensemble du monde pur des sorciers, elle se tourna vers lui, leurs mains enlacées par un sortilège de promesse -
Je le veux prononça-t-elle sans regret.
le serpent Noël était un moment qu'elle aimait beaucoup - l'occasion de ressortir des encens parfumés, de préparer un grand repas et de voir l'ensemble de leurs familles se réunir pour échanger des souvenirs et des douceurs. La fête avait été volée par les moldus, mais fêtait la naissance de Merlin - des traditions autour de cette date étaient toujours bien présente à la table des Mulciber et Helen tenait à ce que son fils puisse les vivre encore et encore. Il serait à jamais son seul enfant - un état de fait que Barth n'acceptait pas, mais dont il ignorait encore la cause. Pas qu'elle lui en parlerait -
le secret de la Confrérie sera toujours préservé - et préférait s'excuser de n'être pas la parfaite épouse qu'il attendait.
Adriel était revenu de Poudlard pour les fêtes - sa première année était aussi fantastique qu'il l'espérait, et il ne cessait de parler encore et encore de ses camarades. De sa cousine, Allegra, qu'Helen avait en affection. Et du jeune héritier Rosier : Evan.
Il ne cesse d'en parler, comme si c'était lui le meilleur sorcier qui soit. elle reconnaissait la frustration dans la voix de son mari, devinait la méfiance et l'agacement qu'il ressentait à voir son seul héritier si proche d'Evan Rosier. Helen ne savait que faire de cet état de fait - Adriel était un enfant merveilleux à ses yeux, un miracle qu'elle aimait avec toute sa rage de lionne - mais il était aussi épris d'un désir d'être aimé et entouré. Il avait
besoin d'Evan, semblait s'attacher à lui et ne plus pouvoir exister autrement. Comme une âme, trouvant son âme soeur. Quelque chose qui allait au-delà des conventions auxquels ils étaient si habitués.
Il le rend meilleur. Répondait-elle, espérant que la chose soit vraie - mais son fils était un Serpent - non point une vipère vicieuse, mais un cobra. Un serpent majestueux, s'élevant avec superbe pour anéantir son ennemi d'un coup de croc. Agressif, violent, venimeux - il apprit à être une arme, sans même s'apercevoir qu'il abandonnait une partie de son innocence.
le lion Il n'y avait plus personne dans les bureaux du Service des sports magiques et du divertissement. Juste elle, terminant de regarder les dossiers des élèves qui avaient intégré les équipes de Quidditch à Poudlard. C'était là, majoritairement qu'elle trouvait les étoiles montantes de son sport. Depuis plus de vingt ans, elle était reine sur cette montagne de célébrité - d'abord joueuse, puis entraineuse, elle était à présent Directrice de la ligue nationale de Quidditch au Royaume-Uni. Faisant la pluie et le beau temps, décidant des réussites et des défaites des sorciers qui voyaient là leur vie se jouer. Elle aimait avoir ce pouvoir, cette prestance, la capacité de changer la vie de tout à chacun en un claquement de doigt.
Tu travailles tard. Elle sourit, se tournant vers lui pour le regarder dans sa tenue parfaite. Sa robe de sorcier noire et blanche, brillant sous la lune de quelques scintillements. Il s'approcha et elle réalisa qu'elle n'attendait que cela - cela faisait longtemps que ces sentiments que l'avaient pas traversé et elle en fut si étonnée qu'elle perdit la parole. Il vint devant elle, l'attirant contre lui pour l'embrasser - le baiser rapidement s'enflamma et elle oublia où elle se trouvait.
Elle n'était pas une femme farouche - elle aimait le sexe, les étreintes, le désir, la chaleur. Depuis longtemps elle savait être une femme qui plaisait. Elle savait qu'elle pouvait attirer les hommes qu'elle voulait - les femmes aussi à l'occasion, se délestant de son rôle de matriarche, de cheffe, de directrice, pour n'être que femme. Et elle vivait cela avec une fougue et un sentiment libertaire dont elle ne voulait pas se délester. Le mariage était une promesse de pouvoir, mais sa vie lui appartenait toujours.
Elle gémit, s'oublia un moment, le visage ouvert d'émotions qui l'envahissaient. Il se pencha pour l'embrasser encore et elle sourit :
Hannibal... Essoufflée. Elle se redressa dans son lit, le corps encore brûlant du rêve qu'elle venait de faire, recherchant l'étreinte de son amant qu'elle ne trouva pas. Dans le lit, il n'y avait que la trace de Barth qui depuis longtemps s'était levé. Ca arrivait, souvent, constamment, et ce n'était pas plus mal. Ils avaient la liberté d'être avec qui ils le souhaitaient, mais c'était la première fois que son rêve révélait ses désirs, pour un homme qui était loin de la laissait indifférente et qui - elle le savait - pouvait lui faire perdre le contrôle sur son existence.