Après toi, le chaos - Beth & Othello

T'es pas le genre mauvais élève mais tu n'es pas non plus excellent partout. Du moins tu es bon dans quelques matières, celles que tu préfères évidemment et tu négliges sans problème la divination ou l'étude des runes. Par chance tu n'aurais bientôt plus cette dernière car c'est une option que tu ne vas pas prendre cette année mais concernant la divination, tu n'as pas le choix. Réel désintérêt ou plaisir d'agacer celle qui enseigne cette matière, tu ne saurais dire. Pourtant c'est intéressant, tu ne peux pas le nier et surtout tu es certain que cela pourrait t'aider avec tes petit soucis de rêves et de flashs mais... Ce serait admettre que tu as besoin d'aide et que tu dois rester en plus à la fin des cours, voir ta mère et ça ce n'est pas possible. Alors tu l'évites, tu te fais petit lors de ses leçons et tu t'enfuis en volant presque de sa classe quand la sonnerie annonce la fin du cours.

Pour le moment ça te réussit sauf que depuis la rentrée, tu es littéralement collé avec elle. Bon ce n'est pas exactement cela, disons que l’administration a décidé de mettre en place des cours en plus, comme du rattrapage, pour les élèves qui ont des lacunes dans certaine matière mais qui semblent quand même largement comprendre le cours. Qui ont juste besoin d'une heure ou deux en plus, voilà tout, rien de terrible. Sauf que le cours où tu as été collé, oui car pour toi c'est aussi affreux qu'une retenue, c'est celui de ta mère. Et après avoir demandé à tous tes camarades, il semblerait que tu sois le seul à devoir rester une heure de plus, le jeudi soir, en compagnie de ta mère et dans sa salle de divination. Pour revenir sur ses cours, t'aider dans tes devoirs ou simplement t'apporter le soutien dont tu manques pour réussir. Ce n'est pas obligatoire mais largement conseillé, tu sais en plus que si tu rates tes études alors Gaunt ou pas tu seras viré... Et tu n'as pas envie de tout gâcher juste parce que tu fuis celle qui t'a mis au monde.

Alors, jeudi soir, à l'heure, tu es devant la salle de divination pour un cours de rattrapage. Tu frappes à la porte avant de l'ouvrir, remarquant que tu es tout seul, ce qui ne t'empêche pas de jurer dans ta barbe car tu aurais aimé, au moins, ne pas être le seul élève de 5eme années à avoir besoin d'un coup de main. Tu ne te serais pas trompé d'heure ? Un coup d’œil à l'horloge t'assure que non alors, agacé et la mine basse, tu vas t'asseoir à un bureau libre dans la première rangée, attendant que soit le cours commence, soit l'aide dont tu as besoin. C'est vrai que tu n'as pas forcément tout compris lors de la première leçon de l'année, qui portait sur la divination chamanique cependant de là à l'avouer, il faudra t'arracher les vers du nez.

Puis tu sors tes affaires, à savoir un carnet vierge et une plume ainsi que son encrier et tu attends, posant ton regard noir sur le professeur qui est aussi ta mère et que tu fuis comme la peste depuis si longtemps, que tu as oublié quand cela a commencé. Sans doute quand tu n'étais qu'un petit enfant et que tu as compris qu'en plus d'être abandonné, ta mère ne comptait pas te reprendre. Comme si tes sentiments n'avaient pas d'importance ni tes besoins. Certes tu n'as manqué de rien chez ton oncle et ta tante mais tu mentirais en disant que tu n'avais pas besoin d'elle, de ta mère, présente bien plus souvent pour ses élèves que pour toi. Ces pensées ne font que rendre ton humeur encore plus sombre, comme si il te manquait cela finalement.

 

A bien des égards, depuis tout ce temps où j’enseignais au sein de l’une des plus prestigieuses écoles de sorcellerie du monde, on m’avait souvent qualifié d’excellent professeur. Maîtrisant les sujets que j’enseignais, j’avais à coeur de les aborder de façon pédagogue car, qu’il s’agisse de la matière optionnelle et celle obligatoire, de la divination ou de l’astronomie, elles étaient souvent de prime abord nébuleuses et avaient tendance à dérouter si ce n’était effrayer les élèves. Cette année plus encore, la nouvelle direction de Poudlard avait insisté pour que le programme soit plus poussé qu’il ne l’était déjà, et surtout le niveau attendu bien plus haut. Mes exigeances étant déjà bien souvent supérieures à celles de mes -pour beaucoup anciens- collègues, je n’avais guère trop rehaussé le niveau attendu, mais c’était suffisant pour inquiéter plusieurs étudiants. Nombreux étaient ceux à venir à des cours supplémentaires, eux aussi réclamés par l’administration et qui augmentait drastiquement notre nombre d’heures d’enseignement. L’aide régulièrement apportée par Sibylle prenait alors toute sa valeur.

A l’inverse, bien que je ne puisse prétendre exceller dans tout ce que j’entreprenais, il y avait un domaine dans lequel j’avais sciemment laissé passer ma chance. Une fuite en avant commise bien des années plus tôt, et qu’une part de moi regrettais amèrement.
Nos vies avaient pris des routes différentes, bien qu’actuellement parallèles, et je ne pouvais que suivre de loin l’évolution de ce fils que j’avais perdu, ou plutôt abandonné. Je ne pouvais pas même le blâmer pour son comportement, puisqu’il avait été la première victime du mien.
Et c’était face à lui, et à lui seul que je me trouvais en cet instant. Ce genre de moment que je chérissais et maudissais tout à la fois, car s’ils me permettaient de le voir, de passer un peu de temps en sa présence, ils me remettaient aussi de façon violente en pleine face à quel point un fossé s’était creusé entre nous, et qu’aucune de mes pitoyables tentatives d’apaisement n’avait d’impact.

Et puisque personne d’autre ne semblait vouloir passer le seuil de la porte ce soir-là, je laissais filer un discret soupir en me redressant, délaissant le livre que j’avais un temps plus tôt sous les yeux.

« Othello. » commençais-je en guise de salutations.

Même si dans mon coeur, pour l’heure, il restait immanquablement “Owen”, je ne tenais pas à envenimer la situation et augmenter le ressentiment qu’il avait à mon égard. Il devenait donc Othello; du même nom que mon beau-frère et l’homme qui l’avait élevé.

« Puisque tu es le seul présent, y a-t-il un thème que tu souhaiterais aborder ou revoir en particulier ? »

Je gardais une certaine distance, étant en cet instant sa professeur plutôt que sa mère. Et je devais bien admettre que cette situations m’offrait un certain refuge, là où je ne savais guère comment m’y prendre avec cet adolescent dont je ne savais finalement que bien trop peu de choses.


 

Tu n'es pas enchanté d'être ici, mentir ne te servirait à rien et puis tu n'as jamais su faire semblant. Tu es un fier Poufsouffle et comme tous ceux de ta maison tu portes tes humeurs sur ton visage, tu ne sais pas vraiment afficher un masque quand quelque chose t'agace. Et là tu es prodigieusement agacé, plus encore de voir que tu es seul dans cette grande salle de classe pour affronter ce cours de rattrapage avec une professeur que tu espères fuir de toutes tes forces quand tu es avec les autres membres de ta maison, en classe. Mais ici il semblerait que le destin s'amuse à tes dépends, car c'est face à ta propre mère que tu te retrouves alors que tu fais en sorte de la fuir depuis des années. Considérant que vous n'avez presque rien à vous dire tu restes distant lors de ses visites estivales. Et le reste du temps elle est professeur Gaunt quand tu n'es rien d'autre que monsieur Rowle-Gaunt en retour. Si chacun sait quel est votre lien alors aucun de ta classe n'a osé te faire de remarque, comme si ils avaient tous compris qu'il ne fallait pas aborder le sujet au risque de se récupérer une remarque acerbe comme unique réponse. Tu n'es pas vraiment aimable quand on essaye de mettre le nez dans tes affaires privées et clairement, concernant tes parents, c'est de l'ordre de l'interdit.

Cependant tu ne peux pas te montrer difficile car il en va de ton avenir et surtout, tu as à cœur de réussir cette année plus que les autres. D'ici quelques mois tu passeras des examens pour déterminer si tu restes à Poudlard ou pas et surtout, dans quel domaine tu pourrais briller, ce qui va te permettre de choisir tes prochaines options pour l'année suivante. Autant dire que tu comptes bien avoir les notes qu'il faut pour choisir tes options, notamment rejoindre les cours de métamorphose avancée car c'est une matière qui te passionne de plus en plus et tu as hâte d'en découvrir davantage. Concernant le reste, Poudlard est devenue une arène où chacun devra trouver sa place. Et ton nom ne peut te sauver si le conseil des purs décide que ton niveau est trop faible, de toute façon tu ne cherches pas à attirer leur attention. Tu veux avoir de bons résultats et passer sans effort, inutile de te rajouter des problèmes liés à l'école par dessus ceux que tu as déjà.

Tu fais un mouvement de la tête en direction de ton professeur, comme si ton cœur ne s'était pas accéléré en sa présence puis tu sors tes affaires, te doutant bien que malgré la rentrée récente elle ne va pas te faire de cadeau. Et tu n'es pas ici pour attendre que le temps passe, au moins le travail t'empêchera de penser à la présence de ta mère toute proche de toi. Alors, avant de lui répondre, tu ouvres un de tes parchemins du jour, celui comportant les notes concernant son cours. « J'aimerais revenir sur le cours de cet après midi, concernant le fait de monter un thème astral. On doit en faire un pour la semaine prochaine mais... Je m'embrouille dans les calculs malgré mes efforts. Je crois que je me perds entre les dates, les planètes, les heures et les degrés. » Tu regardes un de tes parchemins brouillons et malgré toute ta bonne volonté, lorsque cet après midi pendant le cours vous avez commencé à travailler sur votre devoir, tu as fini par abandonner avant de t'arracher les cheveux.

Et puis soudainement une idée te vient, notamment parce que ça collerait avec le cours et tu pourrais poser discrètement des questions sans éveiller les soupçons de ta mère. « J'aimerais parler des rêves prémonitoires et ceux qui nous font revivre les scènes du passé... Si vous n'y voyez pas d'inconvénient. » Dis-tu avec le ton le plus neutre que tu possèdes en toi. Alors qu'il suffit de quelques secondes pour comprendre que cette question dépasse le cours qui a été donné cet après midi. « Je me demande comment on sait que c'est réel ou que ça ne l'est pas... Où s'arrêtent les rêves et les souvenirs. » Et pourtant la seule à pouvoir t'expliquer cela, c'est bien la femme qui se trouve en face de toi et qui n'est autre que ta propre mère.

 

Lors de cours en classe entière, il m'était aisé d’ignorer qu’Owen était mon fils. Noyé dans la masse, au milieu de ses pairs, il devenait un élève dont le traitement n’avait pas à être différent du fait de sa naissance et du lien que nous entretenions. Ce genre de ligne directrice, l’équité quant à ma façon de gérer mes élèves, je l’avais toujours eu et ce bien avant d’avoir mon propre enfant en cours. Me forcer à la suivre maintenant que les choses avaient changé m’apportait un certain confort mais surtout un sentiment de sécurité car je n’avais pas à me questionner sur mon positionnement. Mais les rares fois où je me retrouvais juste avec Owen à Poudlard, même si elle se comptait à peine plus sur les doigts d’une main, me renvoyait constamment à un sentiment de vulnérabilité. Je ne savais jamais réellement quelle attitude adopter entre la professeur ou la mère ratée, ou même un étrange mélange des deux, et n’était pas certaine non plus de savoir ce que mon fils attendait de moi. Cette incapacité que nous avions à communiquer me donnait un profond sentiment de malaise.

La question fut vite élucidée lorsqu’Othello déroula un parchemin sur lesquelles se trouvaient des notes sur le cours concernant le thème astral. Cours où astrologie et astronomie se mêlaient et qui était loin d’être aisé puisqu’il faisait appel à plusieurs connaissances acquises les années précédentes sur les mouvements planétaires et positionnements de constellations. De quoi commencer en beauté la cinquième année.
J’hochai la tête, songeant rapidement par où reprendre les explications pour l’aider dans sa compréhension du sujet, mais Owen en changea de façon assez soudaine, avec ce genre de regard propre aux illuminations. Mes iris clairs se posèrent sur lui, écoutant avec attention sa demande, et je restais silencieuse un moment. Ce genre d’interrogations venaient rarement de nulle part, et presque à chaque fois que je les avais entendues, c’était lorsque de jeunes étudiants peinaient avec un don qu’ils se découvraient. Ce qui ne serait pas vraiment surprenant pour Owen compte tenu des antécédents familiaux. Je ne posais néanmoins pas de questions à ce sujet : s’il n’avait pas tenu bon de m’en informer, c’est qu’il estimait sans doute qu’il n’était pas temps de le faire. En outre, il pouvait tout autant s’agir de simple curiosité, ou d’une façon de venir en aide à un proche qui rencontrait cette problématique.

« Il n’y a pas de réponse universelle à ça, mais par expérience un voyant finira par le sentir. Cependant, il y a plusieurs façons pour apprendre à discerner la voyance du simple rêve. »

Je m’installais contre une table, sans réellement m’y asseoir, et cherchais mes mots l’espace de quelques secondes avant de reporter mon regard sur le jeune homme.

« Sur l’instant où se produisent rêves et visions, il y a peu de personnes pouvant dire s’il s’agit de l’un ou l’autre, mais nous y reviendrons après. Le fait est qu’en général, lorsqu’une personne dort, elle n’a pas accès à la réflexion lui permettant de discerner sa “présence” dans ce qu’elle voit. C’est au réveil qu’il faut alors se poser la question : était-ce moi qui vivait réellement l’action ? Lors de rêves, quelle que soit la forme prise par le dormeur… qu’il s’agisse de lui-même ou d’une apparence tierce, il saura que c’était bien lui, même s’il n’en avait pas l’apparence. Ce sera une conviction. Une certitude. »

Le cas des visions était très différent, mais il existait tant de styles de visions différentes qu’il n’était pas aisé de toutes les aborder en l’espace de quelques minutes. En outre, je pourrais sans doute survoler les plus communes et répandues. Pour l’heure, je préférais encore rester dans le thème du rêve, et évoquer ce qui me semblait être l’outil le plus radical pour apprendre à faire la part des choses.

« Sais-tu ce qu’est un rêve lucide ? »

Te retrouver en présence de ta mère t'est pénible mais tu ne peux pas faire autrement, tu dois accepter cette situation et espérer que vous n'aborderez pas des sujets que tu ne veux pas affronter pour le moment. Ni pour l'instant ni même jamais pour certain, après tout que pourrais-tu lui dire qu'elle ne sait pas déjà ? Tu as tes secrets et c'est bien comme ça, lui en révéler davantage voudrait aussi dire que tu veux créer un lien avec elle ou te rapprocher et ça tu ne le veux pas, pas pour le moment. Tu ne sais pas si un jour cela changera et si tu seras prêt pour une conversation entre adulte mais pour l'instant tu peux te cacher derrière tes cours, ton emploi du temps et tes occupations pour ne pas rester avec elle. Et par chance, tu connais assez ta mère pour savoir qu'elle est pudique et qu'elle va se comporter avec toi comme avec n'importe quel élève. Alors que justement tu n'es pas n'importe qui, tu es son fils et il y a longtemps que tu aurais aimé être traité en tant que tel et pas comme une sorte d'étranger qui ne compte pas vraiment. Maudissant tes sales notes dans ce domaine que tu ne maîtrises pas vraiment, tu finis par te mettre au travail en mettant de côté ce bouclier que tu lèves devant toi à chaque fois que tu es dans une situation qui ne te convient pas. Mais bien vite tu dévies du cours pour poser une question qui te brûle la langue et surtout, pour élucider un mystère qui ne te lâche pas depuis cet été, depuis que tes rêves ont commencés et que tu es forcé de les subir plutôt que de les contrôler. Tu sais que c'est possible, tu l'as lu dans un des livres de la bibliothèque mais tu dois te rendre à l'évidence, apparemment tu n'es pas très doué pour appliquer ce que tu lis sur un ouvrage ancien.

Après tout si quelqu'un peut t'aider c'est bien une professeur de divination et d'astronomie non ? Elle est la mieux placée, tu n'es simplement pas chanceux parce qu'elle n'est autre que ta mère et serait en droit de te poser plus de question que ça. Après tout, tu sais que ta famille regorge de quelques voyants qui ont maîtrisés leur don mais pour cela ils n'étaient pas seuls et s'aidaient entre eux, ce qui n'est assurément pas ton cas. Ils sont rares ceux qui savent pour tes capacités qui s'éveiller de nuit en nuit et tu ne souhaites pas que cela change, les particularités magiques ne sont pas toujours bien vues et puis tu ne veux pas qu'on vienne te poser des questions sur un avenir que tu n'es pas capable de voir, pour le moment tu es entièrement tourné vers le passé bien malgré toi. Le début de son explication te laisse perplexe, tu ne sais toujours pas faire la différence entre un songe et une scène du passé qui revient et tu te demandes soudainement si tu as un problème ou si c'est normal. Mais non, tu dois être patient, voilà que ton don s'est réveillé il y a deux mois, tu ne peux pas espérer avoir autant de pratique qu'un voyant qui l'est depuis des décennies. Comme ta mère, justement.

« J'ai lu que lors d'un rêve on a quelque chose en plus. Une jambe, un doigt ou un bras. Notre cerveau aurait du mal à nous représenter parfaitement lors d'un songe mais apparemment lorsque c'est une vision... On est obligé de la subir et on ne peut pas lutter. » Ce qui expliquerait largement que tu peines à te sortir de ce que tu vois quand cela se produit. « C'est lorsqu'on a conscience qu'on rêve ? » Que tu réponds à la suite de sa question. Tu ne penses pas te tromper, depuis des semaines tu lis à ce sujet et même si tu peines à tout comprendre, tu as fini par enregistrer parfaitement quelques informations. « Il y a différente forme de vision ? On peut au début avoir des visions du passé puis... Du présent et ensuite du futur ? » Tu as bien conscience d'être soudainement très curieux et tu espères qu'elle ne finira pas par comprendre. Quoi que peut-être que ça serait plus simple pour briser la glace et enfin vous parler vraiment.

 

Parler avec Owen n’avait jamais été quelque chose d’aisé, et plus encore depuis que l’adolescence s’était installée. C’était comme si un mur s’était érigé entre nous. Mur dont j’avais malheureusement posé les bases par mon attitude, et sur lequel mon fils avait méticuleusement rajouté des pierres en grandissant. Et je ne pouvais pas lui en tenir rigueur, quand bien même cet état de fait me puisse que m’attrister. La femme de mon beau-frère -sa tante donc- avait assurément mieux rempli le rôle de figure maternelle que je ne l’eus fait, moi, la mère absente et fuyante. Celle qui avait privilégié sa carrière à sa famille. Et il m’était bien impossible de revenir en arrière.

Ironiquement, j’avais fait tout l’inverse de mon frère aîné, Percival, que je blâmais pour son attitude envers son fils, mais au bout du compte nous n’étions pas mieux l’un que l’autre. Il avait vécu auprès d’un enfant en qui il ne voyait qu’un avenir pour sa fichue confrérie et hors de tout réel affect, et moi j’avais vécu loin de mon fils malgré l’affection que j’avais pour lui, laissant tout s’effondrer lentement. Nous étions de bien médiocres parents, nous les Gaunt.

Alors je profitais maladroitement de ces quelques instants, bien qu’incapable d’y prendre l’attitude maternelle que j’aurais dû avoir et me réfugiant une fois de plus derrière le statut de professeur qui m’allait si bien. J’écoutais ce garçon qui s’interrogeait, sur quelque chose qui le touchait sans doute plus que ce qu’il voulait bien faire savoir, et usait de mon rôle et mes connaissances pour l’aider au mieux. Comme j’aurais sans doute dû le faire maintes et maintes fois, non pas dans une salle de classe mais auprès de lui, dans sa chambre.

« Il y a de ça, mais ce n’est pas toujours aisé à déceler, d’autant plus qu’il est difficile de remettre une situation en question lors d’un rêve. Mais effectivement, un rêve lucide c’est lorsqu’on a conscience du rêve, et surtout qu’on est capable d’y agir. Tu n’es plus simplement spectateur passif, mais tu choisis les actions en fonction de ce que tu vis, tu influences l’environnement total, tu brises les limites, et tu en as totalement conscience. Ce n’est pas quelque chose qui se fait naturellement, mais ça s’apprend. »

Avec du temps, de la patience, et un peu d’investissement. En outre, ce n’était pas ce qui était le plus reposant pour l’esprit, qui troquait un abandon pour une forme de réflexion.

« A l’inverse, tu ne peux en aucun cas influencer le cours d’un vision, tu ne peux que la subir. Ainsi… savoir faire des rêves lucides est un bon moyen de t’apprendre à faire la différence entre le rêve et la vision : dans un des cas tu peux changer le cours des choses sciemment, et pas dans l’autre. »

Mes iris se posèrent un moment sur l’adolescent, observant sa réflexion, son regard tantôt investi, tantôt fuyant ou courroucé. J’y revoyais les traits de son père -dont il avait le regard- à son âge, ce qui me serra un instant le coeur. Je chassais cette image, m’attardant finalement sur tous ces autres traits nous rapprochant, avant de revenir à notre sujet initial.

« Il y a une multitude de formes de visions. Certains voyants n’ont accès qu’à un type précis, plus ou moins rare. La forme la plus commune reste en effet les visions concernant globalement le passé, présent et futur. »

La question, plutôt orientée, d’Owen, laissait clairement penser qu’il était concerné par ses propos. Et si la question me brûlait les lèvres, je la retins malgré tout, par égards pour ses secrets.

« Il faut que tu gardes à l’esprit que ces trois temporalités sont interconnectées, et ne font qu’une. Si t-... quelqu’un a accès à l’une de ces temporalités, il a fatalement accès aux autres. Mais le contenu des visions n’est pas quelque chose de maîtrisable, alors le schéma que tu évoques est tout à fait plausible. »

Comme c'est difficile de parler, de t'exprimer face à cette mère dont tu ne sais pas grand chose, alors que pourtant tu as été élevé dans une famille où on se dit tout, on se parle facilement et surtout on ne laisse pas les émotions enfermées dans une boite mais on apprend à les écouter. Car si on les refoule alors elles finissent par nous dévorer n'est-ce pas ? Alors depuis que tu es chez les Rowle tu n'hésites pas à le dire quand ça va mal, quand tu peines à mettre des mots alors tu t'exprimes avec des dessins qui ne veulent pas toujours dire quelque chose au premier abord ou alors de la musique que l'on pourrait qualifier d'agressive. Mais ça fini toujours par passer et tu parviens enfin à t'exprimer comme il faut, pourquoi aujourd'hui tu es incapable d'en faire de même devant celle qui est ta mère ? Justement parce que vous ne vous connaissez pas assez et même si tu veux te donner un genre, ça te touche malgré tout. Et tu voudrais qu'il en soit autrement sauf que tu es un adolescent et comme tous les bons ados, tu préfères être en colère et parfois même injuste plutôt que de dire les choses simplement. Il faut dire aussi que ta mère ne fait rien pour t'inciter à parler, elle ne fait pas un pas vers toi et se cache derrière un masque de professeur qui t'agace prodigieusement, sans doute parce que c'est à cause de cette fonction que tu n'as plus ta mère. Et c'est une chose que tu digères bien mal.

Tu hoches la tête, apprenant alors par la même occasion que tu ne fais pas des rêves lucides justement mais que tu subis bien des visions car malgré tous tes efforts, tu ne parviens pas à les changer de quelque façon que ce soit. Tu es là à regarder, à vivre le moment et personne autour ne semble te voir toi alors que toi, tu ne rates aucun moment de ce qui se déroule devant tes yeux. Et quand ta mère te parle, manquant de te demander indirectement si tu vis ces visions, tu lèves les yeux vers elle en sentant ton cœur rater un battement et une sorte d'excitation couler dans tes veines à l'idée qu'elle comprenne. Mais elle n'est pas idiote évidemment et si elle ne le dit pas, tu es certain qu'elle comprend déjà que tes questions ne sont pas innocentes. Au mieux ce serait pour quelqu'un de proche mais qui pose autant de question pour quelqu'un d'autre ? Tu n'aimes pas mentir et tu ne le feras pas si elle te le demande mais c'est bien difficile de reconnaître de vive voix que vous partagez bien plus que tu ne l'imagines. Alors tu te lèves, faisant grincer la chaise sur le sol en ardoise de cette salle de classe ancienne qui a vue défiler des milliers d'élèves. Tu lèves les yeux, observant un instant cet endroit que tu retrouves bien trop souvent quand tu t'endors pour vivre ce que d'autres n'imaginent pas.

Tes pas te mènent vers la fenêtre qui se situe non loin de ta mère, vous enfermant au passage dans une bulle de confidence alors que tu as l'impression que quelqu'un pourrait t'écouter, si tu n'étais pas si proche. Et sans la regarder, tes yeux se posent à travers la vitre qui donne sur le parc où tes camarades jouent. « Tu savais que l'école était un nid d'acromentules quand les Fondateurs sont arrivés ? Ils ont dû les chasser avant de pouvoir construire Poudlard. » Soudainement tu passes au tutoiement, te rapprochant inconsciemment de cette mère qui pour une fois, a la chance de pouvoir être une maman pendant quelques minutes. Parce que tu as désespérément besoin d'aide car tu ne sais plus gérer ce que tu vois, ce que tu vis. « Il y avait des dragons dans le parc, des hippogriffes et des sombrals. C'était les montures des sorciers de l'époque, Godric Gryffondor montait d'ailleurs un Noir des Hébrides. Tu le savais ça aussi ? Non... Les livres d'histoire n'en parlent pas. »

Le parc qui se dessine devant toi et qui était un lieu bien plus sauvage à l'époque. « Je sais pourquoi Gryffondor et Serpentard se sont disputés. Je l'ai vu... La chambre des secrets était les appartements de Salazar et son nom vient du fait que dans ses appartements il pouvait vivre son histoire d'amour en toute tranquillité. » Et tu te tournes vers ta mère pour lui sourire en coin. « Leur conflit n'est pas à cause d'une histoire de né-moldu à Poudlard. C'est une rupture sentimentale. Ils sortaient ensemble, je les ai vus s'embrasser dans un couloir. Mais il ne reste rien de leur amour si ce n'est le conflit entre les deux maisons. Tu imagines si les Gryffondor et les Serpentards savaient tout ça ? » La simple idée qu'ils l'apprennent te faire rire silencieusement avant que ton regard ne soit légèrement plus sombre quand te recommences à regarder le parc à travers la fenêtre. « Ca a commencé cet été. J'ai cru que je devenais fou et puis mon oncle m'a rassuré, m'a dit que ça arrivait souvent chez les Gaunt et que je ne devais pas avoir peur. Sauf que c'est toutes les nuits, j'ai peur de m'endormir et quand je tombe d'épuisement, c'est pour me réveiller une heure après à cause d'une nouvelle vision. Qu'est ce que je peux faire ? Je ne sais pas les travailler. » Et tu as besoin d'aide. Comme un jeune ado qui demande à sa mère de ne pas l'abandonner, encore.

 

Nombreux étaient les dons reçus par la famille Gaunt au cours des siècles de son existence. Héritage des illustres familles dont elle était issue. Nous descendions du sang le plus noble et le plus pur de la sorcellerie de Grande Bretagne. Et si ces pouvoirs nous avaient élevés au plus haut dans la société magique, ils avaient sans nul doute participé à la déchéance progressive dans laquelle s’était embourbée notre lignage. A ainsi vouloir conserver et renforcer la puissance de notre sang, plusieurs de nos aïeuls avaient fait le choix de nous couper des autres familles, ce qui nous avait immanquablement privé des apports financiers liés aux alliances du mariage. Par chance, et ce malgré les nombreux atouts dont faisaient montre ses enfants, mon père avait fait preuve d’une plus grande ouverture d’esprit que ses propres parents. Par le mariage que j’avais eu avec Edgar Rowle, j’avais pu acquérir une situation financière plus que confortable dès la fin de mes études. Situation dont bénéficierait également Owen à partir de ses 17 ans, car le notaire m’avait conseillé de bloquer la majorité des fonds dont il avait pu hériter au décès de son père pour qu’il lui reste tout ce dont il aurait besoin au moment de s’engager dans la vie. Même si je doutais du fait que son oncle lui laisse un accès total à son coffre, ce choix m’avait paru être le plus raisonné.

Ce même fils n’avait jamais manqué de rien, sur le plan matériel tout du moins, et était devenu un splendide garçon, intelligent, et avec de belles valeurs. De quoi gonfler de joie le coeur de cette mère absente que j’avais été… et c’était sans doute la seule chose qui avait manqué dans la jeunesse de cet enfant devenu grand : des parents.

J’observai les traits de ce jeune homme qui se levait de sa chaise, et qui était si proche des miens et de ceux de son père. En tant que professeur, il était indéniable que je l’aurais questionné sur son attitude avant de l’inviter à se rasseoir, mais nous n’étions que deux dans cette salle de classe… et même si je me cachais derrière cette attitude professorale, Owen n’en restait pas moins mon fils. Et mon attitude allait fatalement de pair avec cet état de fait, bien que ça ne soit souvent que de façon très indistincte.
Ainsi, l’adolescent vint se placer face à une fenêtre, non loin. Et si son regard se perdait dans le parc, moi je pouvais en discerner le reflet dans la vitre face à laquelle il se tenait. Et lorsqu’enfin Owen reprit la parole, un certain trouble m’envahit. Un mélange d'étonnement et de chaleur. Une étrange petite flamme qui s’était allumée dans mon coeur, pour un simple mot : “tu”. Un terme que, pourtant, mon fils avait déjà largement employé, mais plus depuis bien des mois. Et je savais que je n’y étais pas étrangère. Le reste de ses propos, lui, m’arracha un discret sourire, car c’était bien sa manière à lui d’évoquer ce don qui l’habitait.

Je me tournais alors vers lui, l’observant avec sans doute plus de chaleur dans le regard que je n’avais l’habitude d’en montrer. Et ça n’avait rien à voir avec le fait que le don de voyance se soit réveillé chez mon fils, car contrairement à mon aîné, je ne vouais pas l’entièreté de ma vie à cet héritage.

« Ça lui correspond plutôt bien. » répondis-je avec un sourire lorsqu’il fut question de la monture de l’un des Fondateurs. Assurément le plus ardent de tous.

Le jeune homme poursuivit dans la description de ces savoirs et connaissances qu’il avait acquis seul, d’une façon que bien peu de sorciers auraient pu expérimenter, et se retourna vers moi, le regard brillant et le sourire aux lèvres. Une simple image qui fit un peu plus chavirer mon coeur de mère et me ramenait à bien des années en arrière, à une époque dont Owen ne devait sans doute plus garder de souvenirs. A des émotions qui s’étaient peu à peu raréfiées du fait de ces absences prolongées.

J’hochais la tête en retour, une pointe discrète d’amusement dans le regard suite à ses propos.

« Lorsque l’on prend du recul sur cette rivalité exacerbée, ces deux maisons sont bien plus proches et complémentaires qu’on ne le pense. Malheureusement je pense que cette animosité a encore de beaux jours devant elle. »

Mais bien vite, une ombre se projetta dans les iris jusque là rieuse de l’adolescent, et son regard revint à la contemplation du parc. Il était évident que la situation lui pesait, et il l’exprima par ses propres mots que j’accueillis en silence. Il arrivait parfois, de façon tragique, que des voyants sombrent dans la folie lorsqu’ils n’étaient pas en mesure de maîtriser leurs dons… et il était évidemment hors de question que cette tragédie touche l’un de mes proches ou élèves. Et encore moins mon propre fils.
Pour ma part, je ne gardais même plus souvenir de mes premières visions et avait la sensation d’avoir toujours vécu avec. S’il n’était pas évident de conseiller vis à vis de ma propre expérience, j’avais cependant accompagné suffisamment de nouveaux voyants pour ne pas être novice en la matière.

Mes iris étaient posés sur la silhouette d’Owen, un temps songeuse quant aux conseils que je pouvais lui donner. Sa situation, en plus d’être déroutante, était épuisante, à n’en pas douter. Et j’avais de la peine pour lui.

« Avant toute chose, il va être nécessaire que tu te reposes. Ton esprit est épuisé et ça pourrait être délétère à force. J’irais te trouver des potions de sommeil sans rêve, leur effet est suffisamment puissant pour couper ton esprit de tout ça. Il ne faut cependant pas en abuser. D’abord deux nuits de suite, afin de récupérer, ensuite une nuit sur deux pour te préserver. »

Car un esprit épuisé pouvait faiblir et craquer à tout moment. Il était urgent de préserver la santé mentale d’Owen. Sans parler en plus de l’augmentation du niveau d’exigence par le Conseil des Purs, qui se montrerait intransigeant envers tout retardataire. Et la fatigue était mauvaise conseillère en termes d’apprentissage.

« Et quand ton esprit et ton corps seront reposés, si tu le veux je t’apprendrai à maîtriser les bases de ton don. »

Sourire qui traverse aussi ton visage alors que tu clignes des yeux en observant les nuages et que pendant un instant, juste un seul petit instant, il te semble voir l'immense Godric Gryffondor sur sa monture, prenant possession des cieux avec un dragon noir comme la nuit et dont la flamme pourrait détruire une partie du château. Tu comprends pourquoi la plupart des Gryffondors admirent le fondateur de leur maison, parce que c'était un homme fort et courageux qui ne courbait l'échine devant personne, tu peux affirmer cela maintenant car tu l'as vu de tes propres yeux. Cependant celle qui a donnée son nom aux Poufsouffle n'avait rien à envier à ce héro médiéval incorruptible, Helga Poufsouffle était la douceur et la tolérance même, ouvrant ses bras à quiconque voulant un peu de réconfort et tu as pu voir toi aussi qu'elle écrivait ses recettes dans des ouvrages avant de les donner aux elfes, la plupart des plats que vous mangez à présent viennent de son esprit fantastique. Et encore un millénaire après l'ouverture de l'école, Helga Poufsouffle régale les étudiants de Poudlard chaque soir et lors des fêtes, avec son fantastique pudding à ses damner. Et dont personne ne connaît la recette si ce n'est les elfes qui se la passent de génération en génération. Ainsi elle vit encore.

« Parce qu'ils n'accepteront jamais l'idée que toutes les maisons dépendent des autres pour s'élever. Même les Serdaigle qui pensent avoir les esprits les plus brillant, dépendent des autres pour briller. » Mais si la rivalité entre Gryffondor et Serpentard n'était pas si vive alors les deux maisons seraient-elles là où elles le sont à présent ? Feraient-elles briller le courage ou l'ambition des serpents et cela même en dehors des frontières écossaise ? Non sans doute pas, le courage des lions et la ruse des serpents n'a aucun secret et même à l'étranger on ose vous envier vos maisons aux qualités merveilleuses. Comme si chacun avait définitivement sa place qu'importe son caractère, Poudlard est un modèle d'après toi. Mais même si tu aimes l'école où tu vis une bonne partie de l'année, tu dois reconnaître que c'est aussi un lieu qui t'épuise. Parce que trop connecté avec ton ancêtre et bien tu sens tout plus que jamais, tu vois et tu vis des événements que tu n'aurais pas put observer si tu n'étais pas entre les murs de l'école et si c'est formateur, si c'est passionnant de découvrir l'étendue de Poudlard à ses débuts alors c'est aussi quelque chose qui va finir par te détruire. Toi plus que ton cousin Luke qui semble ne pas souffrir autant de son don, de ce que tu sais. Parce qu'il le maîtrise mieux ou que le sien ne va pas si loin ? Tu ne saurais dire.

Tu as pourtant lu à ce sujet et de ce que tu sais, habituellement les voyants ne voient pas si loin justement. Mais il semblerait que le sang de Salazar dans tes veines te permette de voir Poudlard si loin, que ça draine toute ton énergie. Presque vitale, il te semble que tu pourrais t’effondrer si tes nerfs ne te tenaient pas éveillé en permanence. Et quand le professeur recommence à parler alors il te semble voir une mère devant toi et plus une enseignante qui tente de t'apprendre quelque chose. Une mère qui comprend pour la première fois que tu as besoin d'elle, que tu as vraiment besoin d'elle au risque de tomber dans des profondeurs dont tu ne te sortiras jamais. Et tu lâches un soupir parce qu'enfin tu es écouté, enfin tu es entendu, enfin tu vas être aidé. Ton oncle a essayé lors de l'éveil de ton don mais il ne maîtrise pas la voyance et son conseil a été de lui parler autant de fois que tu le voudrais, ce que tu as fait. Puis de te confier à ta mère, ce que tu as fini par faire aujourd'hui même. Non sans mal, la rancune que tu as pour Beth est encore vive dans ton cœur d'adolescent qui hurle à l'injustice dès qu'on le laisse ouvrir la bouche. Mais tu acceptes les conseils, même mieux tu les réclames.

« Bien, je n'abuserais pas et je serais prudent, merci. » Dis-tu en hochant la tête parce qu'il y a bien une chose qui te fait peur c'est justement de devenir accro à ces potions efficaces. Et ne plus réussir à dormir de toi même si ce n'est en prenant ces produits. Alors tu feras attention, tu vois bien que certain de tes camarades ne peuvent trouver le sommeil sans cela. Mais toi pour une fois tu acceptes d'en prendre, tu en as besoin et tu ne peux plus roder dans le château ou la salle commune en espérant te reposer une fois que le jour sera levé, ce n'est pas viable. « Tu le peux ? Je sais que tu as un don de voyance toi aussi mais... » Tu penches la tête sur le côté avant de te détourner de la fenêtre pour t'adosser contre un mur qui semble tenir ce qui était un tableau représentant une galaxie. Mais étant donné qu'il manque la moitié des planètes du système solaire alors tu devines que cette toile est ancienne voire même, partiellement effacée. « J'ai lu que le don de voyance allait rarement aussi loin. C'est normal que je puisse remonter jusqu'à un millénaire ? J'ai aussi lu que lorsqu'il est trop puissant alors les voyants tombent indéniablement vers la folie. » Sous entendu laissant entrevoir une de tes pires angoisses, à savoir que la folie peut s’emparer de ton esprit au bout d'un moment afin de marquer à jamais ta raison. Et détruire ce qui te relie au monde des vivants. Est-ce arrivé ? Oui trop souvent d'après ce que tu as lu.

Et tu regardes ta mère, celle qui t'a portée pendant de longs mois et qui a souffert pour que tu vives. Ta mère dont tu ne reconnais plus l'autorité mais qui a encore ce rôle même si tu lui en veux toujours. Et tu la met au défis de te mentir en te disant que tout ira bien ou alors d'être franche et de te dire tout haut ce que tu sais, à savoir que le risque de folie est présent dans un esprit si jeune et déjà attaqué par un don trop puissant.