Where the drifts get deeper ☽ Percival

S O U N D 

En ce premier samedi du mois de février mille-neuf-cent-quatre-vingt-un, j'avais profité d'une missive de ma très chère mère reçue quelques semaines plus tôt, pour prétendre à accepter un déjeuner en compagnie de mon père et d'elle-même. Un arrangement tacite dont ils avaient tout deux convenu et dont visiblement ma présence était requise. Moi, j'y avais surtout vu un prétexte pour m'adonner à quelques emplettes sur le Chemin de Traverse, de l'ordre du privé.
Mes géniteurs n'avaient nullement besoin d'être au courant, que ces mêmes achats seraient destinés à une personne en particulier. Cette même personne, fêtant son anniversaire le jeudi de la semaine suivante.

Bien que certaines âmes eussent été au courant de ma perdition avec le Yaxley, il était toutefois strictement hors de question, que cela en vienne aux oreilles d'Emrys Gaunt. Car, ce repas où j'étais bien malgré moi obligée d'assister, c'était une volonté d'Alanah Rowle de réparer les pots cassés.
Parce que, même si la relation avec mon père n'avait jamais été au beau fixe, force était de constater que reconduire Orpheus chez ses géôliers, n'avait pas arrangé les choses. Bien au contraire. J'en voulais atrocement au Langue-de-Plomb, qu'était mon satané père et dans une loyauté propre à la famille qu'était la mienne, je me disais que je pouvais potentiellement faire un effort ?

... ce ne serait pas dans son bureau à lui que je m'attarderais.

Ce serait dans celui de mon oncle et estimé Parrain. Percival, le père de Luke, que je voyais plus comme une figure réellement paternelle que comme le frère de celui dont je portais le nom de famille. Et, même si je savais ma mère être prompte à être emplie de liesse de retrouver son époux, cette dernière ne serait pas contre une visite à son beau-frère.
Parce que je l'avais surprise, lors des vacances d'hiver, peu après avoir accueilli le fils Yaxley en notre demeure, écrire quelques lignes à Percival. Lignes qu'elle avait faites traduire en braille par une amie, pour son confort.

Dans sa prose, la volonté de savoir comment il se portait en cette nouvelle année, s'excusant par ailleurs du comportement certain de son mari. Mais, l'exhortant aussi, à venir prendre le thé chez nous, afin de discourir de certains sujets.
Alors, suite à cette découverte, j'étais certaine qu'elle irait le saluer avant de rejoindre Emrys. Parce que je lui avais toujours soupçonné une affection forte à son envers, sans qu'elle ne la verbalise pour autant. Après, je pouvais aisément me fourvoyer.

La retrouvant alors, avec mes achats bien cachés au fond de mon sac à main sans fond, nous nous dirigeâmes vers le Ministère de la Magie. L'Institution séculaire, où j'avais hâte de pénétrer en tant que Magistrate implacable. Sûrement la plus jeune Juge du Magenmagot et dans un avenir certain, la plus jeune Présidente. Cela était mon aspiration la plus pure et la plus souhaitée, dussé-je piétiner mon très cher paternel, d'un coup de talons pour y arriver.

Dans l'ascenseur, je voyais l'index de ma mère se poser sur le niveau trois. Celui où se trouvait le bureau de mon oncle et Parrain. Et, je savais que nous avions du temps, avant que celui-ci ne soit la pause pour tous les employés. Cette visite, elle serait une surprise ... parce que je ne pense pas que ma génitrice ait prévenu notre futur interlocuteur. Peut-être, est-il en réunion ? Occupé avec l'un de ses employés ? Ou en discussion avec mon père ?
Sincèrement, plus je reculais le moment de voir Emrys Gaunt, mieux je me portais.

- Nous allons saluer Percival et prendre de ses nouvelles. Après, nous rejoindrons ton père. Souffla ma mère avec un sourire tendre et entendu, alors que je déportais mes iris noisette vers la porte de l'ascenseur qui venait de s'ouvrir.
- Sache que je préfèrerais déjeuner avec oncle Percival qu'Emrys. Ce sale-
- Eurydice. Ton langage, je te prie. Il n'est pas digne d'une demoiselle de ton rang.

Avec un soupir, je jetais une œillade désabusée au plafond, tandis que nous marchions dans les couloirs, jusqu'à nous arrêter devant le bureau de Percival Elias Gaunt. Dès que ce dernier nous fut accessible, je vis ma mère s'approcher de ce grand homme que j'aimais par-dessus tout. Du moins, de ce que cette affection profonde signifiait pour nous, les Gaunt.

- Percival ... excuse-nous de cette intrusion dans ton bureau. Mais d'un repas futur avec Emrys, nous profitons de te faire une visite. Comment vas-tu, en ce début du mois de février ? Le ton de ma mère était doux, alors qu'elle venait poser sur le bras mon oncle, l'une de ses mains. ... Eurydice est avec moi.
- Parrain ! Cela fait si longtemps que l'on ne s'est vus ! M'exclamais-je, tout en venant prendre mes mains dans les siennes afin de les serrer. Et de lui sourire avec une infime bienveillance.

Même s'il ne le voyait pas ce témoignage d'épanchement, au moins ... j'étais certaine qu'il le ressente, malgré tout.