Sang pour sang Manoir Abbot, Londres, Angleterre – «
Félicitations, c’est un garçon ! », annonce la sage-femme tout en tendant le nourrisson à la mère qui le prend délicatement dans ses bras – une expression à la fois fatiguée et soulagée sur son visage en sueur tandis qu’un large sourire de bonheur étire ses lèvres. «
Bienvenue dans ce monde, mon fils. Bienvenue dans ta nouvelle famille, Cole. », «
C’est comme ça que tu as décidé de l’appeler ? Encore un C. Pour un peu, on pourrait penser que tu le fais exprès. », lance un homme dans l’encadrement de la porte. Si ces mots sonnent comme un reproche, il n’en est rien. Au contraire, Atticus est heureux de pouvoir rencontrer son deuxième fils, deux ans après la naissance de son aîné. Heureusement, Amelia est assez perspicace pour déceler la tentative d’humour derrière les paroles maladroites de son mari. «
Approche un peu pour voir ton fils de plus près. », les pleurs du nouveau-né n’effraie pas l’homme qui s’approche, laisse un baiser sous le front de sa femme avant de reporter son attention sur son bébé. «
Bonjour, Cole Richard Abbot. Je suis ton père et je suis ravi de faire ta connaissance. »
5 ans – «
Maman !! Cole a recueilli un boursouflet, il le cache dans sa chambre depuis deux semaines !—
T’es qu’une balance, Chris ! Tu m’avais promis de rien dire ! bougonne le cadet, furibond contre son frère.
—
J’avais dit que j’y réfléchirais et ça y est, je l’ai fait. T’as pas voulu le dire aux parents, faut pas agir dans leur dos. »
Si jeunes et déjà, la place de chacun se dessine dans la famille Abbot. L’aîné droit, qui répond à toutes les attentes des parents, qui ne s’autorise jamais la moindre entorse aux règles imposées. Et puis le cadet, plus libre, plus enclin à aller contre l’avis de ses parents, qu’importe qu’il n’ait pas gain de cause, il fait valoir son avis. Comme ce jour-là, face à sa mère, arrivée en trombe en attendant les cris. «
Il était tout seul et il avait peur, maman. Je pouvais pas le laisser se débrouiller… Pickles était tout seul. », dernière tentative pour qu’Amelia change d’avis, pour qu’elle ne le prive pas de cet ami auquel il s’est déjà attaché. «
Tu lui as même déjà donné un nom ? », demande-t-elle en haussant les sourcils, retenant un rire devant l’aplomb et l’imagination de son plus jeune qui hoche la tête. «
Je te promets que… Pickles sera bien traité mais on ne peut pas le garder. Tu comprends, Cole ? », non, il ne comprend pas, le gamin mais il affirme que c’est le cas parce qu’il voit bien qu’il n’a pas d’autre choix. A contrecoeur, il va chercher la petite créature, les affaires qu’il avait déjà mis de côté pour elle et il tend le tout à Amelia qui sourit, lui ébouriffant les cheveux au passage. Il déteste quand elle fait ça et elle en a conscience mais cette fois, il ne dit rien, prenant plutôt le parti de bouder tandis qu’il regarde Pickles s’en aller pour toujours…
En revenant et dans l’espoir d’apaiser la déception de son fils, Amelia lui annonce ce qu’elle pense être une bonne nouvelle. «
Tu sais ce que m’a dit la personne là-bas ? », il secoue la tête de gauche à droite. «
Qu’elle était agréablement surprise de la façon dont ce boursouflet a été traité. J’ignore comment tu t’es débrouillé mais tu as été remarquable avec lui, mon coeur. », et l’air de rien, ces paroles apportent une légère chaleur réconfortante dans la poitrine de Cole. Lui non plus ne sait pas trop comment il a fait. C’est juste venu naturellement, sans qu’il ne se pose de questions. Ce n’est que plus tard, avec les cours de soins aux créatures magiques, que Cole comprendra que c’est une passion, un véritable amour qu’il a pour ces êtres aux capacités uniques.
Envole-moi Salle des banquets, première année à Poudlard – «
Cole Abbot ! », poussant une longue expiration, le première année s’avance en entendant son nom, passant devant ses camarades et devant le reste de l’assemblée d’élèves qui attendent impatiemment chaque verdict. Nerveux, Cole s’assoit sur la chaise pendant qu’on pose l’inéluctable chapeau sur sa tête. «
Un nouvel Abbot… vous avez certaines dispositions qui semblent génétiques. », commence la voix, faisant ainsi craindre le pire à Cole. «
Pas à Gryffondor, pas à Gryffondor… », il n’a aucune envie de rejoindre la même maison que son frère. Pour être considéré uniquement comme
le frère de ? Non, il veut avoir l’opportunité de se démarquer, de faire sa vie, de suivre son propre chemin sans être constamment associé à Chris. «
Non, je perçois d’autres qualités chez toi. Créativité… ingéniosité… curiosité… une vision atypique du monde… SERDAIGLE ! », cette fois, c’est un puissant soupir de soulagement qui franchit les lèvres du cadet Abbot. Ce choix, il l’accepte sans mal et c’est donc le sourire aux lèvres qu’il part rejoindre ses nouveaux camarades aux couleurs bronzes et bleues pour suivre le reste de la répartition.
Salle commune des Serdaigle, deuxième année à Poudlard – «
T’as vu ça ? Serdaigle a remporté son match contre Poufsouffle. Cette année, je le sens bien, la coupe est pour nous ! … Eh Cole, tu m’entends ? J’te parle ! », il l’entend, oui. Pas distinctement, plutôt comme un bruit de fond – assez désagréable, par ailleurs. «
Hum, oui, je t’entends mais je suis un peu occupé, là. », rétorque le Serdaigle allongé sur l’un des canapés. Il ne prend même pas la peine de répondre en levant les yeux du livre qu’il est en train de lire.
Runespoor, la conciliation de trois cerveaux, un livre sur le mode de vie de cette créature, comment il fonctionne et la manière dont on peut l’apprivoiser. Autant dire que ça le passionne bien plus que de voir des sorciers voler et se balancer des cognards à travers la tronche. «
Sors un peu la tête de ton bouquin, je te parle du tournoi ! », et il insiste. Cole pousse un soupir agacé avant de se résigner. Il se redresse pour fixer son meilleur ami et colocataire. «
J’avais compris et ça ne m’intéresse toujours pas. Pourquoi t’insistes ? Tu sais très bien que je m’en fiche du Quidditch. —
Je sais pas. Peut-être parce que j’ai encore espoir que mon meilleur copain accorde un peu d’intérêt au plus grand sport du monde sorcier ?—
Aucune chance, Wally. Laisse tomber. »
Dortoir des Serdaigle, chambre de Cole & Wallace, troisième année à Poudlard – Cole tourne et vire dans son lit. Ce soir, il ne parvient pas à trouver le sommeil. Depuis quelque temps, une idée revient dans son esprit – ça a commencé par une simple supposition puis c’est devenu récurrent. N’y tenant plus, il ouvre les yeux vers son camarade de chambre. «
Hey, Wally… tu dors ? », demande-t-il dans un souffle. «
... non, je reposais juste mes yeux. », grommelle Wallace qui se tourne dans sa direction en se forçant à s’éveiller et à ouvrir ses yeux pour qu’ils s’habituent au noir. «
Qu’est-ce qu’il y a ?—
Tu parles encore à ce type ? Comment il s’appelle, déjà… Gary. C’est ça.—
Parfois, oui, pourquoi ?—
Je me suis décidé. Je veux qu’il m’apprenne.—
T’es sûr ? Oh et puis ça m’est égal ! On ira le voir à Pré-Au-Lard demain, après les cours. En attendant, bonne nuit, Cole.—
Bonne nuit. »
La légilimancie. C’est ce que ce
Gary a déjà proposé d’enseigner au cadet Abbot. Pourquoi avoir jeté son dévolu sur lui ? Le Serdaigle l’ignore mais si cette idée persiste, ce n’est probablement pas sans raison. Il n’a simplement pas envie de creuser la question plus profondément. Il doit dormir maintenant : dès demain, c’est un apprentissage difficile qui va débuter. Mais il est prêt. Preuve en est qu’il ne cessera jamais de perfectionner cette nouvelle capacité, même en étant seul.
Every breath you take Salle des banquets, quatrième année à Poudlard – D’ordinaire, il ne suit la répartition des premières années que d’une oreille distraite, ne relevant le nez que lorsqu’il entend un sorcier être envoyé dans la même maison que lui. Pourtant, cette fois, s’il en ignore la raison, sa tête se relève à l’écoute d’un nom :
Piper Fawley. Ce nom, il le connaît bien. Chris est ami avec ce qu’il suppose être un de ses frères, Rémi mais en cet instant, ça lui importe peu. Il ne voit qu’elle, petite blonde timide et introvertie au cœur de pronostics enflammés concernant la maison qui va l’accueillir. Cole, il s’en fiche d’où elle va aller. Du moins, c’est ce dont il tente de se convaincre parce que même s’il le niera sûrement toute sa vie, il se souvient encore de ce petit pincement au cœur. Celui qu’il a ressenti lorsque le verdict du Choixpeau est tombé. Ce sera Poufsouffle.
Cour intérieure de l’école, cinquième année à Poudlard – «
Oh, c’est pas vrai… tu as remarqué ?—
De quoi tu parles ? demande Cole en haussant un sourcil.
—
Donc je suis le seul à avoir vu la deuxième année qui te mate… elle n’est pas très douée pour se cacher, pourtant. C’est la petite Fawley, je crois. »
A la simple entente de ce nom, Cole se sent rougir. «
Sois pas ridicule. », il tente une diversion, faisant comme si ça ne le touchait pas et espérant que son ami n’ait rien vu… «
Tu rou… ah, d’accord. Tu l’aimes aussi. Il faut dire qu’elle est jolie. », c’est sans compter sur la capacité d’analyse de Wallace. Pris au piège, Cole hausse les épaules. Inutile de sortir le couplet des années de différence, il connaît trop bien son ami pour savoir que ça ne prendra pas.
«
Pas un mot de ça à mon frère.—
Pourquoi ? T’as peur qu’il te la pique ?—
Je plaisante pas, Wally. Il ne faut rien lui dire. »
L’empressement dans la voix de Cole finit effectivement de convaincre son ami que cette nouvelle doit absolument rester entre eux. Ce que Cole ne dit pas, c’est que tout cela est simplement dû à la réaction que leur père pourrait avoir. Atticus a déjà eu du mal lorsqu’il a appris pour l’amitié de Chris et Rémi alors qu’une relation amoureuse de ce genre parvienne aux oreilles du patriarche par l’intermédiaire de son frère ? Cole préfère ne pas y penser. Non, ça ne
doit pas s’ébruiter.
Mariage de Rémi Fawley & Mina Selwyn – Il s’en est passé des choses, depuis cette première véritable rencontre dans la tour d’astronomie, à Poudlard – ils ont eu nombre de conversations et d’entrevues, depuis. Il a vingt ans, Cole et ça fait quelques années qu’il a quitté l’école de sorcellerie, non sans son diplôme en poche. Aujourd’hui, c’est à un mariage qu’il se trouve. Celui de Rémi et de Mina. Ironie de tout cela, les frères Abbot sont conviés à l’événement contre l’avis du père Fawley parce qu’il s’avère que Chris est le témoin du marié. Évidemment, Piper est présente pour son frère. Autant d’éléments susceptibles de perturber cette cérémonie montée de toutes pièces. «
Viens là toi, il faut que je te parle. », surpris, Cole ne résiste pas quand son frère l’entraîne avec lui en le tirant par le bras. «
Eh mais… doucement ! Qu’est-ce qui te prend ?! », aucune réponse ; il se fait emmener à l’écart et ce n’est visiblement qu’une fois certain que personne ne les entend qu’il reprend.
«
Bon, je t’apprends rien en te disant que nous ne sommes pas en odeur de sainteté ici.—
Et alors ?—
Alors pas de vague, petit-frère. C’est compris ?—
Tu me connais.—
Justement. »
Autant le dire : sa méfiance n’aura sans doute jamais été autant justifié qu’à cet instant.
Je t’aime. Il a fallu vite disparaître. Que Sybille ne le voit pas au bras de sa fille. Désormais seul, il prend quelques secondes pour se remettre de ses émotions.
Je t’aime. Des mots qu’il rêvait de prononcer face à elle depuis des années, sans jamais en avoir eu le courage.
Je t’aime. L’entente de sentiments réciproques.
Elle l’aime. Un instant trop fugace, il a l’impression de ne pas l’avoir assez savouré.
Je. t’aime. Malgré cela, il sent encore le goût des lèvres de Piper sur les siennes, comme une envie d’y retourner tandis qu’il passe le bout de ses doigts au bord de ses lèvres. Tout cela s’est réellement produit, ce n’était pas une illusion, pas un mirage. Seulement la réalité.
«
Bordel, COLE ! », il sursaute et pivote pour faire face à son frère. A l’expression raide de son visage, il sait ce qui l’attend : une soufflante en bonne et due forme. Qu’importe, il ne regrette pas son geste. Plus encore, il est soulagé de l’avoir fait.
«
Je t’ai vu ! C’était pas très malin de l’emmener dans un des seuls lieux de cette fête que nous connaissions précisément tous les deux.—
J’ai rien fait de mal, Chris. A moins qu’aimer ne soit un crime.—
Ne joue pas à ça. Tu sais très bien pourquoi ce que t’as fait pose problème. Enfin, Cole… tu as le charme Abbot, tu pourrais trouver n’importe qui. Pourquoi faut-il que ce soit la seule fille qui te soit inaccessible ?—
Je l’aime, c’est ce que je ressens. Je n’ai pas choisi.—
Si papa l’apprend…—
Il n’en saura rien. Et dans tous les cas, c’est ma vie, pas la sienne. Je refuse que mon avenir soit dicté par une vieille rancune d’adolescents.—
Il l’apprendra, vous ne pourrez pas vous cacher toute votre vie. Tu devras prendre tes responsabilités, Cole.—
Désolé, Chris. Tu es mon frère et je t’estime beaucoup mais avec tout le respect que je te dois, je suis pas comme toi. Je veux vivre comme je l’entends. sur ces mots, il signe la fin de cette conversation en tournant les talons pour s’éloigner. Ce jour-là pourtant, peut-être aurait-il dû écouter les mises en garde de son frère. Il ne voulait que son bien, après tout… »
Manoir Fawley, trois ans plus tard – Ils ont pris leur décision. Après trois ans de relation secrète – davantage pour Piper que pour Cole – et un dernier dîner aux chandelles, il lui a fait sa demande. Si ça n’avait tenu qu’à Cole, il l’aurait fait avant mais elle n’était pas prête à révéler leur relation aux yeux du monde et ça, il l’a toujours respecté. Une patience récompensée puisqu’elle va enfin annoncer leur fiançailles à ses parents ; elle lui a promis qu’elle le ferait, cette fois. Pourtant, au lendemain, les heures passent et il s’inquiète de ne pas avoir de ses nouvelles. Piper aurait dû le contacter, d’une manière ou d’une autre. Ce n’est pas normal et ça, il le ressent au plus profond de ses entrailles. Ni une, ni deux, il attrape son blouson et se rend chez les Fawley, que cela plaise ou non.
Devant la porte, il s’apprête à sonner lorsque cette dernière s’ouvre sur Max Fawley. «
Tu n’as rien à faire ici. Rentre chez toi. », le regard haineux de l’homme n’échappe pas à Cole alors qu’il n’a rien fait pour ça, si ce n’est de tomber amoureux de sa fille. «
Écoutez… j’aime votre fille et je veux l’épouser, j…—
Elle va se marier, c’est certain mais pas avec la mauvaise graine que tu es. »
Il grimace, Cole, encaissant ces mots difficilement. Et sa souffrance semble faire plaisir au Fawley qui en profite pour enfoncer le clou.
«
Elle va épouser Goyle, que ça te plaise ou non. C’est un fils de bonne famille, lui.—
Comment vous pouvez faire ça ? Votre propre fille… Elle ne l’aime pas et vous le savez ! il hausse le ton, profondément dégoûté par un tel comportement.
—
Je te déconseille de me pousser à bout, jeune homme. »
Soudain, il sent la pointe d’un objet contre son ventre. Nul besoin de se baisser pour savoir de quoi il s’agit. «
Vous n’en ferez rien. », rétorque Cole en soutenant le regard de Max. «
Et qu’est-ce qui te rend si certain de ça ?—
C’est simple. Si vous faites usage de votre baguette sur moi, ce n’est pas simplement votre stupide rivalité avec mon père qui va prendre une autre dimension. Il faudra expliquer votre geste auprès des autres sang-purs, il y aura des conséquences et vous n’êtes pas en mesure de les assumer.—
Tu n’es pas si idiot. Pour un Abbot. il grimace.
Mais c’est trop tard. Elle a déjà oublié ce désir complètement stupide de t’épouser. Je m’en suis assuré personnellement.—
Vous n’avez pas… horrifié à cette idée, il ne termine pas sa phrase et l’expression affichée par le père Fawley vient confirmer ce qu’il redoutait.
—
Va-t’en. »
Il était jeune, Cole. Il espérait que l’amour pourrait tout résoudre et passer par-delà les conflits. Mais il s’est trompé et ce jour-là, il en fait l’amer expérience. Grimaçant, il se résigne à tourner les talons, jetant un rapide dernier regard vers la chambre de Piper, qu’il aperçoit rapidement. Puis, il s’éloigne, quittant la propriété pour ne plus y remettre les pieds.
Nouvelle vie, autres désillusions Ministère de la magie britannique, département de la justice magique – «
Encore une plainte contre toi. Si tu continues de les accumuler, ça va devenir compliqué de les faire passer sous le radar. », il balance le dit dossier de plaintes sur le bureau, stoppant net un Cole en pleine réorganisation d’emploi du temps de certains avocats travaillant ici. Portant un rapide regard sur l’enveloppe cachetée avant de reporter son attention sur son frère, Cole ne semble pas inquiet de ce que son aîné vient de lui annoncer. «
Normalement, on toque à la porte avant d’entrer dans un bureau, quel qu’il soit. », laisse-t-il, pas le moins du monde inquiet. «
C’est quoi ton problème ? Tu cherches à te faire virer ? », un rictus vient déformer le visage de Cole l’espace d’une seconde tandis qu’il se lève de sa chaise, se plaçant ainsi à la hauteur de son interlocuteur. «
C’est une vraie question ?—
Je saisis pas.—
Ce que tu me demandes là, c’est une vraie question ? Tu veux vraiment savoir mon problème ?—
T’es mon frère, Cole. Évidemment que je veux savoir.—
Je sais que tu fais ça pour moi. Tu m’as trouvé ce job pour assurer des revenus, t’as toujours été derrière mes fesses mais m*rde, Chris, ouvre les yeux. J’suis une p*tain de secrétaire ! Alors à ton avis, est-ce que j’ai envie de me faire virer ? »
Ce n’était pas ce qu’il désirait, cette vie. Il aurait aimé arpenter les couloirs de ce département dans des circonstances différentes – en étant lui-même auror, par exemple. Mais non, il se retrouve là, à gratter du papier et à prendre les rendez-vous. Depuis qu’il a dû la quitter, Cole n’arrive pas à remonter la pente, il a cette sensation d’être au trente-sixième dessous et d’être incapable de revenir. Son frère est là et certes, et il fait de son mieux, il le sait mais ce n’est pas suffisant.
1961 – C’est une rencontre bête et banale. De celles qui arrivent tous les jours et qui n’ont rien d’extraordinaire, la plupart du temps. Il marche simplement dans la rue, des dossiers soigneusement triés et glissés dans ses coudes. Son esprit vagabonde ; il le laisse aller où il veut. C’est une habitude qu’il a prise et qui lui fait beaucoup de bien. Il est moins agressif, moins sur la défensive quand des gens tentent d’entrer en contact avec lui. C’est encore très loin d’être la vie parfaite à laquelle il aspirait mais il progresse. Et soudain, tandis qu’il avance sans vraiment faire attention à sa direction, c’est la collision. Cole percute une jeune femme et les deux individus finissent les fesses sur le sol. «
Je… je suis désolée, pardon. », dit-elle pendant que le cadet Abbot regarde avec dépit ses dossiers éparpillés dans la rue. «
Je vais vous aider… », l’inconnue commence à rassembler les feuilles éparses pendant que Cole secoue la tête. «
Ce n’est rien. Attendez, c’est pas à vous de faire ça. », à deux, ils rattrapent rapidement les feuilles avant même que l’une d’entre elle ne disparaisse à cause d’un potentiel coup de vent. «
Je m’appelle Haley Lewis. », laisse la femme en souriant, une fois les dégâts réparés. «
Et moi Cole. Cole Abbot. », rétorque le sorcier, sourire aux lèvres. A la vue de la prénommée Haley, quelque chose d’étrange commence à agiter son cœur. Un sentiment… qu’il n’a connu qu’à une seule autre reprise au cours de sa vie et c’était il y a des années.
C’est donc ça, l’effet d’un cœur qui recommence à battre ?Chez Cole & Haley – «
Duncan Abbot ! Je t’ai déjà dit de ne pas courir dans les couloirs ! », c’est le rire d’un enfant amusé qui parvient aux oreilles de son père en guise de réponse. Et malgré le reproche teinté de l’inquiétude qu’il se fasse mal, un sourire apparaît sur le visage de Cole. Le sourire sincère d’un homme qui a retrouvé un semblant de stabilité depuis qu’il s’est marié à Haley Lewis et qu’il a eu un enfant avec elle. Une situation et une union qui ont trouvé grâce auprès des proches de Cole, notamment de son père – Atticus n’a rien eu à redire et s’est même réjoui que son fils daigne enfin entrer dans le rang. Satisfaction démontrée d’une petite tape dans le dos lorsque le cadet Abbot a annoncé ses fiançailles puis ses épousailles. «
Dis papa ! Quand je serai à Poudlard, tu crois que je vais aller dans la même maison que toi ? », demande le garçon en sautant sur les genoux de Cole, sourire malin jusqu’aux oreilles. «
Aucune idée, fils. C’est le Choixpeau qui te répartira mais quoi qu’il décide, ce sera pour une bonne raison. », il fait la moue, Duncan, peu enclin à faire l’effort de comprendre ces paroles. Évidemment, ce n’est pas la réponse qu’il attendait mais c’est celle dont il devra se contenter.
«
J’aimerais bien être un Serdaigle. Comme toi !—
Et pourquoi pas un Gryffondor, comme tonton Chris ? Ou ailleurs. Tu sais, tous les membres d’une même famille ne se retrouvent pas forcément dans les mêmes maisons.—
Hum, non. C’est comme toi que je veux être. Puis tonton Chris, il est parfois trop sérieux même si je l’aime beaucoup ! laisse le garçon en secouant la tête, après quelques secondes de réflexion intense. Cette fois, Cole éclate de rire. »
«
Cole ?—
Non.—
Cole ?—
J’ai dit non.—
... Cole ?—
Je refuse d’en parler, de le mentionner ou d’y faire référence, Wally. C’est rendre tout ça beaucoup trop… vrai. Laisse-moi tranquille, j’ai envie d’être seul. »
Pour essayer de réaliser, à défaut d’être capable de l’accepter. Pour pleurer aussi, sans aucun doute. Une fois de plus, il s’est approché d’un bonheur illusoire et éphémère. Son fils unique, Duncan, est décédé en ce mois de janvier 1979 et la culpabilité ronge Cole. Il n’aurait jamais dû lui dire qu’il faisait partie de l’Ordre du Phénix. S’il ne l’avait pas fait, Duncan ne se serait pas mis en tête de les rejoindre dans le futur et surtout, il ne se serait pas pris pour un héros durant cette tragédie. Le célèbre Tournoi des Sorciers a fini en véritable carnage… et Duncan fait partie des victimes de ces Mangemorts. Cole n’y était pas ; auquel cas, il se serait jeté dans la mêlée sans la moindre hésitation. Ironie dramatique du sort, on lui a rapporté que c’est précisément ce qu’a fait Duncan. Baguette à la main, il s’est dressé devant les adeptes de Voldemort. Il n’a suffi que d’un geste, un seul Avada Kedavra de la part d’un Mangemort pour que la vie quitte le corps d’un innocent garçon de dix-sept ans. Duncan Abbot avait des rêves plein la tête et l’insouciance de son âge. Il ne méritait pas ça – aucun de ces gamins ne le méritait. Et Cole se flagelle parce
s’il n’avait pas malgré lui rempli le cerveau de son fils d’espoirs utopiques,
s’il avait été là pour assister à ce tournoi… il aurait pu protéger son enfant. Comme un parent doit toujours le faire.
Mais tu le sais, Cole. Avec des « si », on refait le monde. I lost the kid… Caveau familial des Abbot – Les yeux rougis par les larmes, fixés sur l’épitaphe funéraire de la chair de sa chair, Cole reste muet depuis la fin de l’enterrement. Perdu dans son esprit, il n’entend même pas les pas lourds d’un homme qui descend les escaliers pour s’arrêter dans son dos. «
Tu devrais réagir au lieu de rester là à t’apitoyer. », le ton de Chris est dur, presque dénué de compassion. Lentement, Cole se retourne, venant faire face à son frère. «
J’ai pas besoin que tu viennes jouer le grand-frère moralisateur. Dégage de là. », il le fixe, soutenant le regard de Chris avec un air de défi. «
Qu’est-ce que tu crois que ça va t’apporter de rester ici ? C’était ta responsabilité mais être planté là, ça te fera pas avancer.—
C’était mon fils… ton neveu. laisse Cole en serrant instinctivement les poings.
—
Tout juste. Et je l’ai perdu aussi, Cole. Je l’ai perdu aussi. Mais tu dois assumer. Et passer outre.—
Marrant ça comme remarque, venant de la part du type qui s’est jamais remarié depuis qu’il a perdu sa femme. Tu veux que je passe outre ? Comme tu prétends l’avoir fait pour Elisabeth ?! »
Il hurle presque ces mots. Des paroles de trop qui, il le sait, viennent heurter Chris qui saisit son frère par le col pour le plaquer violemment contre le mur du caveau, le faisant gémir de douleur.
«
Retire ça.—
Vas-y, frappe-moi. Peut-être que ça te soulagera, en plus de te prouver que t’es pas le surhomme que tu penses. »
Cette carapace qu’il s’est construite n’est qu’une vaste fumisterie. Et ça, il l’a toujours su, Cole. Il espérait seulement que son frère change de lui-même. «
Arrête de te sentir obligé de me donner des leçons. J’en ai marre que tu sois toujours derrière moi, prêt à sauter sur la moindre de mes conneries. J’suis plus un gamin, Chris. JE gère ma vie et tu devrais songer à la tienne. Alors maintenant, soit tu me frappes un bon coup, soit tu me lâches.—
Tu n’es qu’un petit c*n ingrat, Cole. dit-il en desserrant son étreinte, laissant Cole respirer de nouveau. »
Quelque chose vient de se briser entre les frères Abbot. Et tandis que Chris quitte le caveau, Cole porte un dernier regard embué de larmes nouvelles là où repose désormais son fils. «
Je suis désolé, Duncan… tellement désolé… », un murmure laissé pendant que ses doigts effleurent la plaque funéraire…
Chez Cole & Haley, future ancienne maison commune – Silencieux, Cole termine de rassembler ses affaires. Il a besoin de s’éloigner de tout ça ; pour mieux faire son deuil, accepter les événements, accepter que son mariage ne survive pas à cela – aucune surprise là-dedans, il se doutait qu’un divorce serait inévitable. Avec Duncan, c’est dix-huit années de sa vie qu’il a enterré. Encore une fois, il va falloir tout recommencer… «
J’ai presque fini. », dit-il en apercevant Haley dans l’encadrement de la porte de leur ancienne chambre. «
Je ne suis pas venue te presser, Cole mais… je pense qu’on doit l’avoir, cette discussion. », annonce la Lewis de sa voix douce. Cole a une vague idée de ce dont elle veut discuter et à vrai dire, il avait encore espoir de pouvoir disparaître sans avoir à éclaircir ce point
précis. «
Mes sentiments pour toi sont sincères, Haley, ça a toujours été le cas. », commence Cole en se mordant la lèvre inférieure. «
Je le sais, j’ai jamais eu le moindre doute à ce sujet. Tu me l’as assez prouvé. Mais au fond, je sais aussi que tu ne m’aimes pas… de la même manière que tu l’aimes, elle. », elle. Elle qu’il n’avait pu épouser et qui l’avait toujours regretté. Il est arrivé qu’il mentionne son nom certaines fois à Haley, celui de Piper. Il ne pouvait cacher cette relation alors que les deux femmes sont cousines. «
Je suis désolé. Tu mérites de trouver quelqu’un qui sache t’aimer à ta juste valeur. », la mine est basse mais ses paroles sont franches. Il a parfaitement conscience qu’elle ne lui reproche rien mais ça lui semblait important de le dire. Simplement. «
Tu l’as fait. J’ai passé dix-huit années merveilleuses à tes côtés. T’as rien à te reprocher et je te souhaite de trouver ta voie. », elle le pense et il ne comprend pas qu’elle puisse encore se montrer si tendre à son égard après tout ce qui s’est passé. Et en même temps, il reçoit sa chaleur et sa bienveillance comme un cadeau plus que bienvenu. «
Au revoir, Cole. », dit-elle en venant adresser un dernier délicat baiser sur le front du sorcier avant de quitter la pièce.
Haley l’a sauvé, à leur rencontre. Et pour ça, il sera à jamais reconnaissant. The road never ends «
Monsieur Abbot ?—
C’est mon père, « monsieur Abbot ». Ou mon frère, parfois. Vous pouvez m’appeler Cole.—
Quelqu’un veut vous voir.—
Qui ?—
Une personne à qui on ne refuse pas une entrevue. »
La messe est dite. N’ayant de toute façon aucune autre alternative, Cole accepte de suivre cet inconnu. Ils marchent pendant plusieurs minutes avant de s’arrêter devant un homme leur faisant dos. Quand cette dernière daigne leur faire face, les yeux de Cole s’écarquillent. «
Si je m’attendais à ça… je ne pensais pas vous revoir, Professeur. », Dumbledore, précisément. Des retrouvailles surprenantes qu’il n’attendait pas. Albus lui propose de remettre le couvert, pour l’Ordre. Avec quelques changements, néanmoins. Officiellement, l’Ordre est dissous, ils opèrent donc dans la clandestinité. En soi, ça ne change rien pour Cole qui opérait déjà seul car très peu de personnes savaient qu’il en faisait partie. Ce qui change, c’est qu’il ne doit simplement plus l’évoquer. Ou en tout cas, plus en tant qu’entité existante. Du reste, c’est un travail d’espion qu’il lui propose – il serait connu uniquement de Dumbledore et de la ministre Aloysia. Au sein de Poudlard, école désormais aux mains des Puristes. Cole peut prétendre au rôle de professeur, il a repris des études en ce sens il y a quelques années et il a obtenu tout ce qu’il fallait pour pouvoir exercer. Seulement, il hésite… pour lui, l’Ordre a accompli son objectif à la mort de Voldemort. Son existence n’a donc plus lieu d’être. De plus, il a déjà tout perdu la première fois qu’il les a rejoints. D’un autre côté, cette demande, c’est l’occasion d’aider les plus jeunes. De leur assurer un avenir qu’ils auront eux-mêmes décidé. Alors malgré ses réticences envers l’Ordre, Cole accepte de rempiler. Il ne sait pour combien de temps. Tout comme il ignore que c’est aussi un moyen pour le Ministère de garder plus facilement un œil sur sa magie métallique. Capacité apparue peu de temps après l’ouverture du monde magique aux moldus ainsi qu’à leur technologie.
Retour à Poudlard, 1980 – Il y a un certain sentiment de nostalgie à repasser dans ces couloirs après tant d’années loin de cette école. Aujourd’hui pourtant, c’est en tant que professeur et directeur de Serdaigle que Cole revient à Poudlard – en plus d’avoir hérité d’une mission qu’il doit désormais honorer. Parcourant les couloirs et les étages qu’il reconnaît autant qu’il les redécouvre, l’Abbot avance sans vraiment avoir de destination précise en tête. Ce sont ses pas qui le guident et quand il comprend où il se trouve, un sourire apparaît sur son visage. Évidemment, la tour d’astronomie.