Il était une fois, un couple de Cardiff tout à fait lambda. Cette histoire n’est pas grandiose ni épique; en fait, elle est plutôt banale. Comme bien des couples au Royaume-Uni et dans le monde entier, Nelson Bishop et Helena Richards filent le parfait amour et décident d’unir leur vie avec la ferme intention de fonder une famille. Malheureusement pour eux, avoir des enfants est une tâche fastidieuse. Pourtant, après trois fausses couches, ils n’avaient pas encore perdu espoir. Comme pour récompenser leur ténacité, la quatrième tentative fut la bonne, et une petite fille finit par pointer le bout de son nez au terme de neuf longs mois d’attente. On la prénomma Ophelia Kathleen, en l’honneur de l’héroïne de l’œuvre shakespearienne et de sa grand-mère paternelle qu’elle ne connaîtrait jamais.
Cette petite fille, Nelson et Helena l’avait tant espéré. Chacun de ses rires, de ses sourires ou de ses petits cris les comblaient de bonheur. Inutile de vous dire que, malgré leurs moyens limités, Ophelia ne manquaient jamais de rien. Ragaillardi et gonflé à bloc, le couple tenta même d’offrir à leur trésor un petit frère ou une petite sœur. Toutefois, quand des complications menacèrent la vie d’Helena, ils décidèrent d’un commun accord qu’il valait mieux avoir une petite famille en santé qu’une famille composée d’un veuf et de ses deux enfants sans maman. Ainsi, la petite Ophelia reçu tout l’amour de ses parents et eut une enfance paisible. Du moins, jusqu’à ses six ans.
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« Ophelia…? Qu’est-ce que tu fais? »Cela faisait maintenant plusieurs minutes qu’Helena observait sa fillette de six ans déambuler d’un pot de fleurs à l’autre dans sa boutique de fleuriste. Armée de son arrosoir bleu surmonté d’une petite coccinelle en plastique, la petite secoua la tête en soupirant, l’air exaspéré.
« Bah, j’arrose les fleurs, maman. »Oui, c’était une grande évidence. C’est ce qu’on faisait normalement avec un arrosoir, c’était d’une logique implacable. Seulement voilà, Helena ne voyait pas sa fille arroser les fleurs; elle semblait plutôt aspirer l’eau des fleurs. Des gouttelettes semblaient flotter en apesanteur autour de ses petits doigts effilés. Le filet d’eau descendait, mais semblait remonter, puis redescendre. Helena se frotta les yeux et prit une autre gorgée de café. Elle devait être encore endormie et s’imaginer tout ça. Ce n’était pas comme si le même genre de phénomène s’était produit l’autre jour quand elle lui avait donné un bain, si…?
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Au grand désespoir de Nelson, il avait dû mettre huit bougies sur le gâteau d’anniversaire de sa fille. Huit ans, déjà. Assis devant son ordinateur, le comptable s’arrêta un moment pour laisser libre court à sa nostalgie. Ses yeux noirs se posèrent sur le cadre posé sur son bureau, lequel contenait une photo de famille prise lors de leurs virées au camping l’été dernier. Le temps passait trop vite. Il n’y a pas si longtemps, Ophelia n’avait d’yeux que pour ses peluches. Or, au camping, elle avait manifesté un vif intérêt pour les étoiles et l’univers dans son ensemble. Pour son anniversaire, d’ailleurs, il lui avait acheté un télescope; pas le plus dispendieux ni le plus puissant, mais certainement un outil assez satisfaisant pour pouvoir observer les creux de la lune et émerveiller une fillette de huit ans. La sonnerie du téléphone mis un terme à ses rêveries.
« Nelson Bishop, que puis-je faire pour vous? »« M. Bishop, c’est Mme Di Palma, la directrice de l’école de votre fille... »Le ton de la femme était quelque peu nerveux, ce qui l’inquiéta immédiatement. Ouvrant de grands yeux, il colla le combiné contre son oreille, un peu paniqué, mordant le bout de son stylo.
« Tout va bien? Il est arrivé quelque chose à ma fille? »« Je vous rassure, votre fille va très bien. Seulement voilà, nous avons quelques… soucis à l’école. Il faudrait venir chercher Ophelia. Vous pouvez vous libérer? »« J’arrive tout de suite. »À peine avait-il raccroché qu’il était debout en train d’enfiler son manteau. Il passa rapidement dire à son patron qu’il s’absentait, monta dans sa voiture et partit en direction de l’école qui, heureusement, ne se trouvait qu’à deux pas. Sur place, il trouva plusieurs parents qui s’étaient également déplacés, deux camions de pompier… et des enseignants et des enfants complètement trempés dans la cour de récré. Certains pleuraient, d’autres étaient juste heureux de ne pas avoir cours. Peu importe leur état d’esprit, ils étaient tous trempés. Tous, sauf une petite fille aux yeux humides, un gros pansement lui traversant l’arête du nez, un autre sur son genou frêle. C’était sa fille. D’un pas rapide, Nelson alla vers elle, saluant Miss Charlotte, son enseignante, au passage.
« Qu’est-ce qui s’est passé…? »La jeune femme remonta ses grosses lunettes rondes en tournant vers lui, replaçant l’une de ses mèches détrempées derrière son oreille.
« On se pose tous la question… Nous étions dans le gymnase, en train de jouer au ballon chasseur. Ophelia a reçu un ballon en plein visage et est tombée à la renverse. Je viens de lui mettre des pansements, on n’a pas eu le temps d’aller à l’infirmerie. Tous les gicleurs de l’école ont explosé simultanément! »Elle salua un autre parent venu chercher son enfant, pendant que Nelson prenait la main de sa fille complètement sèche. Il le remarqua, contrairement aux autres adultes présents. Cela ne semblait toutefois pas être le cas des enfants, qui dévisageaient sa fille. Ah, les enfants… décidément, ils voient des choses que les adultes ignorent complètement.
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Avec le temps, l’épisode des gicleurs était devenu une anecdote farfelue que les adultes se plaisaient à raconter lors d’un premier rancard pour faire rire leur potentielle nouvelle flamme, ou pour se montrer intéressants lors d’une réunion de famille. Les enfants, quant à eux, semblaient ne pas avoir oublié. Particulièrement les camarades de classe d’Ophelia. Et plus particulièrement encore Patrick Gleeson.
C’est un fait : les enfants peuvent être terriblement cruels. Et Patrick Gleeson en était l’exemple type. Élevé au sein d’une famille catholique très croyante et pratiquante, et écoutant un peu trop les commérages de sa mère et des autres femmes à l’église le dimanche, il était convaincu qu’Ophelia avait des pouvoirs diaboliques et qu’elle les avait utilisés pour faire exploser les gicleurs. Il avait réussi à semer la peur dans les esprits des autres enfants, qui s’étaient mis à éviter Ophelia comme la peste. Dans les couloirs, on la traitait de monstre, on lui mimait des gicleurs qui se déclenchaient, et bien plus encore. Intimidation et harcèlement faisaient partie de son quotidien.
Et qu’en pensait Ophelia? Elle trouvait ça bien dommage, mais ne s’en formalisait pas. Ce n’était qu’un groupe de jeunes idiots qui ne savaient pas quoi faire de leur temps libre et qui se laissaient bêtement influencer par des adultes qui carburaient au jugement. Ce qui était alarmant pour le personnel de l’école, c’était le manque de réaction de la jeune fille. Quelle enfant difficile à cerner que cette Ophelia Bishop… Habituellement, les jeunes victimes de harcèlement ressentaient un profond mal-être. Pas Ophelia. À vrai dire, la solitude lui allait à ravir. Elle passait son temps de récréation seule avec un livre, ou bien dans la salle de musique à pianoter ou à gratter quelques cordes. C’est d’ailleurs de cette manière qu’elle découvrit la contrebasse.
Le son merveilleusement grave de cet instrument avait quelque chose d’envoûtant. Lorsqu’elle frottait son archet contre les cordes et qu’elle collait sa joue contre le manche pour ressentir toutes les vibrations, elle ne pouvait faire autrement que de fermer les yeux et de se laisser transporter par cette douce musique. Elle ne parlait pas beaucoup, mais elle savait se faire entendre avec son « gros violon ». Tout le monde savait à quel point la contrebasse était importante pour Ophelia. Y compris Patrick Gleeson.
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« Tu peux me dire ce qui s’est passé, Ophelia? »Assise sur la banquette arrière de la voiture de ses parents, Ophelia avait les yeux rivés sur la glace, regardant les arbres défiler à toute vitesse. Elle referma les doigts sur ses genoux après avoir tirer les manches de son grand pull. Même si elle évitait les yeux de son père qui la fixait depuis le rétroviseur, ceux-ci semblaient lui brûler la peau tellement ils étaient insistants. Sa mère, quant à elle, était retournée vers elle, aussi insistante que son mari.
Ils étaient venus la chercher après que le directeur du camp musical auquel ils l’avaient inscrite pour lui faire plaisir les aient appelé en panique, accusant Ophelia de vandalisme et « petit terrorisme ». Il n’a suffi d’un seul échange de regard entre les deux parents pour que les deux comprennent la situation : ça recommençait. Ni une, ni deux, ils étaient montés dans la voiture pour aller cueillir leur fille qui, pour une fois, semblait perturbée.
Voyez-vous, Patrick Gleeson était aux antipodes d’Ophelia, sauf en ce qui concernait la musique. Il avait trouvé son bonheur en soufflant la trompette, un instrument aussi puissant et bruyant que lui. Évidemment, lui aussi était inscrit au camp musical. Et quand il avait vu Ophelia débarquer avec son sac et son énorme étui en cuir, il avait été profondément frustré. Le monstre, dans son camp d’été? Ça n’allait pas durer. Comme à l’école, il réussit rapidement à s’entourer de camarades qui s’amusaient aux dépends de la jeune fille. Et comme d’habitude, Ophelia n’en faisait rien. Jusqu’à ce que Patrick aille trop loin.
Il avait mandaté Tiffany, l’une des trois autres filles avec qui Ophelia partageait sa baraque en bois. Pendant que sa victime était partie prendre sa douche, la diabolique Tiffany en avait profité pour couper les cordes de sa contrebasse et casser son archet d’un coup sec, à la suite de quoi elle s'était pressée de quitter les lieux du crime pour rejoindre le reste de la bande autour du traditionnel feu de camp. Sans se douter de quoi que ce soit, les cheveux enroulés dans une serviette, Ophelia était revenue dans sa baraque. En entrant, elle se figea lorsqu’elle vit son instrument ainsi défiguré. Si tout semblait bouillonner à l’intérieur d’elle, son visage, lui, restait impassible.
Mais là était bien le problème. Véritable miroir de ce qui se passait en elle, l’eau du lac commença à bouillonner, des bulles de plus en plus grosses se formant en son centre comme une marmite à feu vif. La serviette qui retenait les cheveux d’Ophelia se défit lentement, libérant ses cheveux mouillés qui semblaient se mouvoir dans un courant d’air imperceptible. Soudainement, les grillons se turent et les grenouilles cessèrent de croasser. Le vent cessa de souffler l’espace d’un instant, puis un bourdonnement sourd se fit entendre. Le bourdonnement se transforma en grondement, qui à son tour vira à un bruit d’explosion assourdissant. Encore une fois, le silence s’installa, puis des cris d’effroi retentirent. Ophelia sortit sur la petite terrasse de la baraque, haussant les sourcils en voyant qu’il pleuvait des cordes… et des poissons?
Toute la petite bande de Patrick Gleeson cherchait à se mettre à l’abri pendant qu’ils se faisaient assommer par les truites, les anguilles, les écrevisses et les autres membres de la faune marine qui peuplait le lac. Le lac, il avait explosé. Littéralement. Ophelia se surprit à sourire. La scène était tellement ridicule, mais tellement satisfaisante…
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Le voyage de retour du camp avait été long et pénible. Ophelia avait fini par cracher le morceau et, bien qu’un peu inquiets, Nelson et Helena n’avaient pas pu s’empêcher d’en rire. Bon, si c’était ça, du « petit terrorisme »…
À leur arrivée à la maison, une enveloppe en parchemin cachetée d’un sceau de cire rouge était délicatement posée sur le pas de la porte, et un hibou était posé dans le petit lilas près de celle-ci. Cette lettre à l’allure singulière était adressée à Ophelia. La scène était déjà assez curieuse, surtout qu’elle ne recevait jamais de courrier. Elle ne perdit pas de temps et l’ouvrit.
Chère Miss Bishop,
Nous avons le plaisir de vous informer que vous bénéficiez d'ores et déjà d'une inscription au collège Poudlard. Vous trouverez ci-joint la liste des ouvrages et équipements nécessaires au bon déroulement de votre scolarité.
La rentrée étant fixée au 1er septembre, nous attendrons votre hibou le 31 juillet au plus tard.
Veuillez croire, chère Miss Bishop, en l'expression de nos sentiments distingués.Ah, c’était donc ça. Elle n’était pas un monstre, mais bien une sorcière. Nelson et Helena avaient toujours su qu’elle était spéciale, mais jamais ils se seraient doutés que leur fille avait littéralement de la magie dans le sang. C’était une première dans la lignée des Bishop, et des Richards par la même occasion. Pour Ophelia, c’était le début d’un véritable conte de fées.
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Qui des élèves de l’école du quartier pouvait se vanter d’être transférés dans une école de magie? Dans un véritable château? Un château rempli de vrais fantômes et d’autres êtres magiques, pas comme les ruines de Cardiff. Ophelia se laissait émerveiller par absolument tout. Elle ignorait tout de Poudlard, de son fonctionnement, de son histoire. Après avoir fait l’achat de ses livres de cours, elle n’avait pas tardé à se plonger dedans pour en savoir plus. Quant aux quatre maisons, peu importe si elle allait être placée à Gryffondor, à Poufsouffle, à Serdaigle et à Serpentard. Elle était juste heureuse d’être admise. Finalement, c’est à Serdaigle que le Choixpeau l’envoya.
Même si tout était magique à Poudlard, le château était une école comme une autre, avec des adolescents aussi impitoyables que ceux qui ne brandissaient pas de baguettes. À Poudlard, Ophelia n’était plus un monstre, mais une sale sang-de-bourbe, une impure, une honte. Et comme lorsqu’elle était plus jeune, elle ne faisait absolument rien pour se défendre. Juste une bande de Patrick Gleeson, se disait-elle. Pas de quoi perdre son énergie.
Un jour, alors qu’elle sortait de cours, on lui tapa dans l’épaule pour une énième fois. Elle soupira, levant les yeux au ciel en entendant encore le mot « sang-de-bourbe » glisser d’entre les lèvres du grand gaillard de Serpentard qui venait de la bousculer. Visiblement énervé par le manque de réaction, il la poussa violemment. Sans surprise, elle s’étala de tout son long sur le sol de pierre, s’éraflant mains et genoux par la même occasion. Un peu sonnée, elle distingua des ricanements, un éclair blond lui passer devant, puis des explosions et des cris.
« Hey, ça va? Faut pas te laisser faire, tu sais. »Une main lui agrippa l’avant-bras, l’aidant à se relever. Elle tituba un peu, reprenant son équilibre en s’appuyant contre sa bienfaitrice. Devant elle se tenait une jolie blonde vêtue des couleurs des Poufsouffle, qui lui adressa un adorable sourire. Cet instant qui ne dura que quelques minutes, c’était en fait la signature d’une amitié sincère, profonde et fusionnelle avec Eden Cavendish, sa première vraie amie, sa meilleure amie, la sœur que ses parents n’avaient pas pu lui offrir. Au fil des conversations, les deux jeunes sorcières s’étaient rendu compte qu’elles avaient énormément en commun : sang moldu, affinités avec la magie élémentaire, musique, instruments à cordes…
Ophelia, qui jusqu’alors était reconnue pour être une grande solitaire, commença peu à peu à tisser des liens avec un petit groupe d’individus triés sur le volet, sa famille magique, sa famille musicale. Eden en faisait partie, le flamboyant Mischa Kensington aussi, ainsi que quelques autres que le destin avait décidé de réunir. Ils n’allaient peut-être pas sauver le monde, mais ils étaient bien soudés. Dans leurs bras, les Patrick Gleeson de ce monde avaient encore moins d’atteinte sur elle.
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Ah, l’amour. Tantôt merveilleux, tantôt douloureux, l’amour dictait la vie des êtres humains depuis la nuit des temps, et ce, indépendamment de leur statut magique. Visiblement, l’amour avec un grand « A » avait frappé à la porte d’Eden et Mischa. Ophelia l’avait compris bien avant qu’ils officialisent leur relation en les voyant se tourner autour comme deux aimants. Et ils ne perdirent pas de temps pour passer d’aimants à amants. Tant mieux pour eux, se disait-elle, tant que cela n’affectait pas l’harmonie du groupe. Ils pouvaient bien se bécoter, se toucher, s’embrasser, tant qu’ils étaient heureux. Malheureusement, le bonheur s’en était allé avec Mischa. Ophelia avait passé de longues nuits à éponger les larmes d’Eden, à la serrer contre elle, à la bercer dans ses bras. Souvent, elle ne disait rien. Elle laissait toute la place à la douleur de son amie, à toutes ses incompréhensions. Et, bien honnêtement, elle ne savait pas trop comment la consoler.
D’abord, parce qu’elle craignait d’utiliser les mauvais mots et d’envenimer la situation. Ensuite, tout simplement parce que l’amour avec un grand « A », Ophelia ne le connaissait pas. Ni l’amour avec un petit « a », d’ailleurs. Et ça ne lui manquait pas. Elle ne lui courait pas après; si un jour il devait la retrouver, il saurait bien y arriver. Une chose était certaine : Mischa n’était pas un méchant garçon, et il n’était pas du genre à avoir 6 aventures simultanément. S’il était parti, il devait bien avoir une raison, et une bonne. Seulement, il avait été maladroit. Il aurait dû en parler, à n’importe qui, à n’importe quel membre de leur petite famille. Eden aurait sans doute été bien triste, mais la blessure aurait mieux guéri, et plus rapidement.
Lentement, mais sûrement, les torrents de larmes devinrent des rivières, et les rivières des ruisseaux, jusqu’à ce qu’il ne reste qu’un mince filet qui finit par s’assécher. La fuite était colmatée. La cicatrice demeurait, mais la blessure n’était plus à vif. Ophelia fut rassurée. Même si le violon d’Eden continuait d’hurler son désespoir, le sourire était revenu sur le visage de son amie. La sachant toujours fragile, Ophelia ne la lâchait pas des yeux. Sans connaître l’amour, elle savait bien que celui-ci pouvait pousser les gens à faire des choses complètement folles et insensées…
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Quand Eden se rapprocha des Enfants de la lune, Ophelia lui emboîta le pas. Pas question qu’elle intègre une guilde de sorcières en marge de la société sans elle. Eh puis, il fallait avouer que leur idéologie résonnait avec elle. Comme Eden, Ophelia devint une fille de la lune. Entourée de sorcières bien plus expérimentées qu’elle, et d’autres sorcières qui avaient une connexion avec l’eau comme elle, elle développa sa sensibilité, renforça son lien avec cet élément et parfit ses facultés magiques. Bref, si Poudlard lui avait apporté énormément, la guilde lui permis de s’épanouir pleinement au sein du monde magique.
Elle érigea un autel dans son salon, l’agrémentant de plantes et de cristaux divers, de symboles, de cartes, d’encens et d’autres accessoires prisés par les moldus mordus de spiritisme. Ophelia voulait bien faire les choses; elle prenait son serment à la lune au sérieux. Surtout quand la guerre éclata.
Après avoir convaincu ses parents de quitter Cardiff pour aller vivre un moment dans le chalet familial. Celui-ci était situé dans un endroit tellement reculé qu’elle doutait sérieusement que quiconque les trouve. Elle ne prit toutefois aucune chance, et plaça des cristaux protecteurs un peu partout dans le chalet, en plus d’utiliser les sorts de protection qu’elle connaissait pour le rendre pratiquement impénétrable. Pendant les années du conflit, elle partageait son temps entre la boutique de sa mère, les réunions de la guilde et le chalet à de rares occasions. À sa connaissance, tous ceux qu’elle aimait étaient à l’abri. Du moins, elle l’espérait.
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« Les Hissing Cats. »« Nah, c’est tellement cliché pour un groupe de sorciers… pourquoi pas les Raging Wolves? »« On est pas des enragés… »« Les Dingoes. On est les Dingoes. »Dans la minuscule loge en coulisse de la scène du Drunk Broom, tout le monde se tut et se tourna vers Mischa. Ophelia cessa d’accorder son instrument et hocha la tête.
« Les Dingoes… c’est pas mal. »C’était ça, en fait, le superpouvoir de Mischa : faire l’unanimité et rallier les troupes. La brunette esquissa un petit sourire en voyant comment Eden semblait encore plus emballée qu’elle quant à sa proposition. Son retour avait réuni tout le monde, comme c’était le cas à Poudlard.
« Mesdames, messieurs, goules et monstres en tout genre, veuillez accueillir LES DINGOES! »Des acclamations se firent entendre, et tous les occupants de la loge se pressèrent hors de la pièce, remplis de fébrilité à l’idée de brûler enfin les planches de la scène tous ensemble pour la toute première fois. Assise au milieu, sa contrebasse entre les jambes, Ophelia jeta un coup d’œil à ses amis avant de pincer une corde, donnant le coup d’envoi à la première chanson. Quelle belle période que celle-ci. Le mouvement puriste avait perdu de l’ampleur, Mischa était revenu et toute sa famille était enfin réunie au grand complet. Ophelia était aux anges, et espérait que cette première performance n’allait pas être la dernière.