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 Cendres de Lune

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MessageSujet: Cendres de Lune   Cendres de Lune EmptyLun 19 Oct - 15:51


     
Cendres de Lune

     

31 octobre 1990

Elle pénètre dans la pièce qu’elle redoutait tant et soudain l’obscurité l’envahit. Les repères s’estompent et avec eux toute conscience de la temporalité. C’est tout juste si elle se souvient de qui elle est. Soudain, une particule tombe sur son nez. Infime, à peine perceptible. Sur le moment, Tamsin pense avoir rêvé… Jusqu’à ce que d’autres particules prennent le relai. Intriguée, la jeune femme lève la tête et s’aperçoit qu’il neige. Non, ce n’est pas de la neige. Le contact des flocons blancs n’est pas froid et ils ne fondent pas sur sa peau. Au contraire, ils s’amoncellent sur sa tête, s’accrochant à sa chevelure fougueuse. L’Américaine sait pertinemment de quoi il s’agit.

Il y a douze ans qu’elle a fait ses adieux à cette maudite poudre blanche. Dans la détresse et la douleur, mais elle s’est débarrassée du poison qui foutait sa vie en l’air. Elle n’a pas replongé depuis le jour où Opale l’a ramassée par terre dans l’allée des Embrumes. Pourtant, ce chemin de croix n’a pas été des plus tendres avec elle. De nombreuses tentations se sont mises en travers de son chemin, mais l’attrapeuse les a affronté avec beaucoup de détermination. Entourée par ceux qu’elle aimait, elle s’est sentie portée dans sa quête de renouveau et est parvenue à se libérer de ses démons. Mais aujourd’hui, le souvenir de la cocaïne balaye sans aucune pitié tous les efforts qu’elle a faits pour se reconstruire. Comme si un esprit particulièrement mal intentionné saupoudrait la pièce depuis le plafond, la drogue cascade dans un halo de lumière. Elle s’éparpille jusqu’à recouvrir le sol, forme un petit monticule dans le creux de sa paume ouverte. Comme un sablier égrenant le temps qui lui reste à vivre. Très vite, l’air s’emplit de poudre blanche. Tamsin plaque sa main contre son nez et sa bouche pour éviter d’en absorber. Elle ne veut pas succomber à la tentation et pourtant, elle ne tient pas une minute tant ça devient irrespirable. "Non pitié, pas ça !" La cocaïne s’infiltre dans ses narines dès la première inspiration et monte en flèche jusqu’à son cerveau. Ca pique, ça la brûle. Cette sensation familière lui revient dans la face comme un maudit boomerang. Elle sait que cela va lui procurer une sensation immense de plaisir et de légèreté mais elle sait également que cette montée d’adrénaline lui coûtera extrêmement cher. Chaque bouffée d’air qu’elle absorbe s’accompagne d’une pelletée de cocaïne. Il lui en faut toujours plus, il lui semble qu’elle ne pourra pas survivre sans la dose à venir. Elle ouvre grand la bouche pour appeler à l’aide mais aucun son n’en sort. Pourtant une ombre bouge au fond de la pièce, quelqu’un semble avoir entendu sa plainte silencieuse. La silhouette allongée d’Ezekiel se détache de l’obscurité. Il jongle avec insouciance avec un long couteau de boucher. Il s’avance vers elle sans s’étonner de la quantité de cocaïne tombant du ciel et s’étalant au sol. Il tient son arme en équilibre avec la pointe de sa lame sur son index. "Regarde ce que j’sais faire !" lui lance-t-il avec une insensibilité certaine. Tamsin quant à elle, ne parvient plus à articuler le moindre mot. Des larmes roulent le long de ses joues, accrochant des particules de coke dans leur sillon. "T’as trop sniffé," explique le chasseur. "Faut évacuer ce trop-plein de drogue, sinon tu vas mourir." Sans plus attendre, la lame d’Ezekiel fend l’air et s’abat sur l’abdomen de Tammy pour l’éventrer. La petite blonde étouffe un cri et porte ses mains à sa blessure. Contre toute attente, ce n’est pas un torrent de sang qui s’écoule entre ses doigts mais une cascade de cocaïne. Lorsqu’elle relève les yeux vers Ezekiel, son ex acquiesce d’un air satisfait et s’éloigne d’un pas tranquille.

Tamsin suffoque sous le coup de la douleur mais elle remarque que ses voies respiratoires sont dégagées. Il ne neige plus de cocaïne dans la pièce. Une bonne nouvelle ? Pas sûr… Si la petite blonde n’absorbe plus de drogue et qu’elle se vide de poudre par sa blessure, elle va bientôt ressentir le manque. La jeune femme tombe à genoux dans la coke, sentant la nausée arriver. Elle en saisit une poignée qu’elle place sous sa narine avant de l’inspirer violemment, mais elle ne ressent plus rien. La cocaïne ne lui procure plus aucun effet… Il faut que quelqu’un vienne la sauver. Quelqu’un comme… "Arès ?" Devant elle se tient l’étudiant dont elle est tombée follement amoureuse à Poudlard. Il s’agenouille devant elle, l’air soucieux. "Tu ressens plus rien, hein ? C’est normal, tu as dépassé le stade de la dépendance." Tamsin l’implore du regard, son coeur bat si vite qu’elle a l’impression qu’il va exploser. Le bourdonnement de ses oreilles envahit son esprit. Elle n’espère qu’une chose : qu’on vienne l’achever. "Il te faut quelque chose de plus fort. C’est cadeau." La bouche de Tamsin s’arrondit de surprise en sentant la piqûre dans son avant-bras. Arès vient de lui injecter de l’héroïne à l’aide d’une seringue. Le pire qu’on puisse faire à un cocaïnomane. Les effets ne tarderont pas à se manifester… Vite, elle se relève pour rattraper Arès qui est en train de tourner les talons mais Travers s’évanouit dans l’obscurité.

Tamsin hurle son nom pour qu’il revienne lui retirer toute cette drogue qu’on vient de lui faire ingérer de force. Ses cris se perdent dans un écho sinistre et soudain, le froid l’envahit. Elle s’enveloppe dans son châle pour ne pas frissonner. La neige s’est remise à tomber. A moins qu’il ne s’agisse de la cocaïne, encore une fois. Est-ce le manque qui se manifeste à nouveau ? L’Américaine n’a guère le temps de réfléchir à la question : des mains viennent se glisser sous l’étoffe pour frôler ses hanches. Prise de panique, Tamsin se retourne et découvre avec soulagement qu’il s’agit d’Opale. "Ce n’est que moi," murmure la Française. Soulagée d’avoir enfin quelqu’un sur qui compter, la petite blonde se serre contre elle. "Sors-moi de là, c’est un véritable cauchemar," supplie l’attrapeuse. Mais son aînée secoue la tête d’un air catégorique. "Je ne peux pas t’aider, personne ne le peut. Tu es allée trop loin pour revenir en arrière." Sidérée, Tamsin s'accroche désespérément à sa petite-amie. "Ne me laisse pas..." Trop tard, Opale se détache déjà de son étreinte. Et la cocaïne retombe de plus belle. "Tu es devenue dangereuse pour toi et pour les autres. Mais ne t’inquiète pas, ta fille sera en sécurité avec moi." Cette fois, c’est comme si on lui arrachait le coeur. incapable de la retenir, Tamsin hurle à s’en déchirer les poumons. Elle voit le niveau de la cocaïne monter de plus en plus vite jusqu’à sa taille, prête à l’engloutir pour de bon. Le bourdonnement dans ses oreilles s'intensifie et soudain...

"Maman !" Tamsin cligne des yeux en entendant cet écho lointain. Une petite silhouette blonde se détache des ténèbres. "Maman, tu viens ?" C’est l’électrochoc. Tamsin se reprend et agite sa baguette. "Ridikulus !" L’épouvantard s’évanouit soudain, remplaçant la pluie de cocaïne par des confettis et autres accessoires de fête. Retour à la réalité avec un soulagement indicible. De ses petits bras, Sky entoure sa taille pour attirer son attention. Tamsin s’agenouille alors pour prendre sa fille dans ses bras et la serrer tout contre elle en la bombardant de baisers. "T’as des paillettes partout !" Les larmes aux yeux, l’Américaine laisse échapper un rire de soulagement. De ses petites mains, Sky époussette les résidus colorés accrochés à ses boucles blondes. "Je sais chérie… Allez viens, on s’en va." Elle se redresse en passant une main sur ses joues, l’autre tenant fermement celle de son enfant pour sortir de cette foutue maison hantée. "T’as peur des paillettes, maman ? Moi j’ai vu une grosse araignée mais j’ai couru vite pour pas me faire attraper."

La prochaine fois qu’elle viendra à la fête foraine pour Halloween, elle se contentera de manger de la barbe à papa avec Sky et d’un tour d’auto tamponneuse. Elle se le jure.

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